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Un village italien revit grâce à l'intégration des étrangers

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Un village italien revit grâce à l'intégration des étrangers

Une ville pittoresque bâtie au sommet d'une colline en Calabre prouve que l'intégration peut fonctionner dans un pays sous la coupe de politiques d'immigration strictes.
22 Mars 2010 Egalement disponible ici :
Laura Boldrini du HCR discute avec des habitants de Riace.

ROME, Italie, 22 mars (HCR) - En Calabre dans le sud de l'Italie, la ville pittoresque de Riace bâtie au sommet d'une colline semble être une destination idéale. Située à la pointe de la botte italienne, cette ville bénéficie d'un ensoleillement exceptionnel et on y trouve entre autres des champs couverts d'arbres fruitiers, des paysages de montagne, des spécialités culinaires italiennes et, toute proche, la côte méditerranéenne.

Pourtant, dans les années 70 et 80, les gens quittaient la région en grand nombre pour partir vers l'Italie du Nord, vers d'autres parties de l'Europe ou plus loin encore. En effet, les salaires dans cette région ne permettaient pas de vivre décemment. Peu à peu, Riace prenait des allures de ville fantôme. Il n'y avait pratiquement plus de magasins, le dernier bar avait fermé, personne ne travaillait dans les champs et les classes de l'école locale étaient également désertées.

La ville a toutefois renoué avec la prospérité. Ses maisons en pierre se font l'écho de rires et de voix joyeuses, ses rues médiévales sont envahies par les touristes, des artistes et des commerçants y cohabitent. Toutefois un grand nombre parmi les 1 700 habitants de Riace ne sont même pas originaires de l'Italie.

Domenico Lucano, le maire de Riace, est le principal instigateur de ce retournement de situation dans sa commune. En travaillant avec le HCR, il a montré l'exemple sur la façon dont l'intégration peut fonctionner dans un pays sous la coupe de politiques d'immigration strictes. Domenico Lucano a eu l'idée novatrice de repeupler sa ville avec des migrants en situation irrégulière, des réfugiés et des demandeurs d'asile en provenance de pays comme l'Afghanistan, l'Erythrée, l'Iraq, le Liban et la Somalie.

C'est cette histoire qui a enchanté le réalisateur allemand Wim Wenders. Il a tourné sur Riace un documentaire en 3-D d'une demi-heure. Vendredi, à Rome et avec le soutien du HCR, a eu lieu la première de "Il Volo" (le vol) à laquelle le délégué régional, Laurens Jolles, a assisté. « Le film dépeint la vie des réfugiés et des travailleurs migrants dans une perspective largement positive », a déclaré une personne également présente lors de cette projection.

Wim Wenders, qui est notamment le réalisateur du film primé « Paris, Texas » et du documentaire « Buena Vista Social Club », était initialement venu en Calabre en septembre dernier pour y réaliser un court-métrage de fiction sur la migration dans une autre ville voisine, Badolato.

Il a toutefois changé d'avis après avoir rencontré des enfants réfugiés - trois frères roms originaires de Serbie et Ramadullah, un garçon afghan âgé de neuf ans - qui vivent à Riace. Wim Wenders a décidé de tourner un film un peu plus long, qui raconterait leur histoire ainsi que celle du maire et de sa vision pour la ville.

« J'ai réalisé que j'étais davantage attiré par l'histoire de ces enfants plutôt que par celle que je tournais », a expliqué Wim Wenders, ajoutant que les « personnes bien réelles sont toujours plus importantes que la fiction.» En résultat, il a réalisé un émouvant documentaire qui pourrait aider les gens à comprendre la réalité de l'immigration et la manière dont les étrangers peuvent contribuer à la société italienne.

Domenico Lucano, le courageux maire, a rappelé comment a commencé la transformation de Riace il y a 12 ans. « Un bateau transportant 250 Kurdes [des hommes, des femmes et des enfants] a été poussé par le vent vers nos côtes », a-t-il dit, en se référant à un bateau chargé de migrants qui avait probablement quitté l'Afrique du Nord dans l'espoir d'atteindre l'Europe. « À l'époque, Riace se mourait », a-t-il ajouté.

Les Kurdes étaient arrivés à proximité de l'endroit où un plongeur avait découvert les célèbres « bronzes de Riace » - deux splendides statues grandeur nature de guerriers grecs portant la barbe - et il avait contribué à donner très rapidement une renommée internationale à cette petite localité. « Le vent nous a apporté une cargaison particulière et qui sommes-nous pour le détourner ? » avait alors pensé Domenico Lucano. Selon son raisonnement, les réfugiés étaient simplement en train de suivre les traces des Grecs, des Arabes, des Normands et d'autres visiteurs du passé.

Domenico Lucano a créé une association, Città Futura (la Ville de l'avenir), qui a commencé à offrir gratuitement aux migrants, aux réfugiés et aux demandeurs d'asile le logement et la nourriture ainsi que l'électricité dans des maisons vides à Riace aussi longtemps qu'ils accepteraient de travailler pour gagner un salaire et apprendre l'italien. «Les Kurdes [en fin de compte] ont rejoint l'Allemagne, mais leur passage a marqué les esprits », a indiqué Domenico Lucano. « Riace a ouvert ses portes aux Érythréens, aux Éthiopiens, aux Afghans et les écoles ont pu rouvrir. »

Les nouveaux venus payent en retour la confiance qui leur a été témoignée en aidant à faire retrouver à Riace sa bonne fortune. Les femmes fabriquent des produits d'artisanat, tandis que les maris travaillent à la construction et à l'ouverture des magasins. Tous contribuent à faire venir les touristes, qui peuvent désormais loger dans des bâtiments rénovés du centre ville.

Aujourd'hui, environ 250 des 1 700 habitants de Riace sont des étrangers, y compris de nombreux réfugiés palestiniens réinstallés récemment en Italie avec l'aide du HCR, après avoir passé des années dans le camp poussiéreux d'Al Tanf situé dans le no man's land entre l'Iraq et la Syrie.

Pendant ce temps, Laura Boldrini, porte-parole du HCR en Italie, a déclaré que l'agence pour les réfugiés avait été heureuse de faire connaître l'exemple donné à Riace et d'autres villes voisines. Elle a également fait l'éloge du film de Wim Wenders, en disant que « IL Volo » était « un formidable outil de sensibilisation défendant un modèle de cohabitation basé sur l'échange et l'intérêt mutuel, tant pour les réfugiés que pour le développement des communautés locales. »

Par Federico Fossi à Rome, Italie