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Il ne faut pas oublier le Soudan du Sud. Chaque crise est importante, parce que chaque vie est importante.

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Il ne faut pas oublier le Soudan du Sud. Chaque crise est importante, parce que chaque vie est importante.

S.A.R. la Princesse Sarah réfléchit sur la façon dont le déplacement forcé affecte les plus jeunes et les plus vulnérables du pays.
19 Décembre 2017
La princesse Sarah a rendu visite à Elisabeth, réfugiée sud-soudanaise, dans sa maison au camp de Kakuma. Cette mère de trois enfants, qui allaite toujours son fils, reçoit l'aide d'autres femmes de la communauté des réfugiés pour effectuer les tâches ménagères.

« Dans un contexte de réalités effroyables et de graves préoccupations, je me suis rendue au Soudan du Sud et au Kenya au début du mois de décembre, à la demande du HCR. Malgré des niveaux de besoin révoltants, cette situation est devenue une ‘crise d’urgence oubliée’.»

Ce fut une leçon d’humilité de rencontrer les personnes les plus touchées, à la veille du quatrième anniversaire de l’éclatement du conflit au Soudan du Sud. Sur les 2,1 millions de réfugiés forcés de fuir la violence, pas moins de 85 % sont des femmes et des enfants.

Sept autres millions de personnes à l’intérieur du pays ont un besoin urgent d’aide humanitaire, dont deux millions de personnes déplacées.

Tragiquement, tout semble indiquer que les civils continueront à fuir vers les pays voisins avec un nombre de réfugiés approchant les trois millions d’ici la fin 2018. Un tel scénario impliquera sans aucun doute de nouveaux déplacements internes accompagnés d’un dénuement croissant à travers le pays, où la résilience des gens est déjà gravement minée par les effusions de sang, la sécheresse et l’insécurité alimentaire croissante.

C’est sur fond de ces terribles réalités et de ces graves préoccupations que je me suis rendue au Soudan du Sud et au Kenya, à la demande du HCR, en ma qualité de conseillère du Haut Commissaire pour la Parité, le déplacement forcé et la protection. Le Soudan du Sud a été choisi car, malgré les niveaux de besoin révoltants, la situation dans le pays est devenue une ‘crise d’urgence oubliée’.

Le Soudan du Sud se classe parmi les situations de réfugiés à la plus forte croissance dans le monde, avec un croissant nombre moyen de 500 000 personnes par an depuis 2013. Pourtant, le financement humanitaire pour la crise a diminué de 10 % par an au cours de la même période.

La dichotomie qui en résulte a laissé la majorité des réfugiés au bord du gouffre, pouvant à peine survivre sans aide extérieure. Pendant ma visite de quatre jours, j’ai pu en apercevoir l’impact dévastateur sur les personnes les plus vulnérables : les femmes, leurs nouveau-nés et leurs enfants.

« La simple survie ne peut pas être l’objectif; l’avenir des citoyens de la nouvelle nation du monde devrait plutôt être le début d’une vie de santé, de bien-être, d’éducation, de dignité et de sécurité. »

Au Soudan du Sud, j’ai rendu visite à des réfugiés dans le comté de Maban, dans l’État du Haut-Nil. Dans les 24 heures qui ont précédé ma visite à l’hôpital de Maban, sept paires de jumeaux sont nées! Les mères et les nouveau-nés étaient en bonne santé parce qu’ils ont eu accès à des services prénatals et hospitaliers de qualité. Il n’y avait aucune explication pour cette abondance de naissances gémellaires; c’était « la saison des jumeaux », m’a-t-on dit.

Quelques jours plus tard, au camp de réfugiés de Kakuma dans le nord du Kenya, je me suis rendue dans une maternité qui compte en moyenne 400 accouchements par mois. Tragiquement - de manière inacceptable - la nuit avant mon arrivée, deux nouveau-nés prématurés sont morts parce que l’établissement ne disposait pas de l’équipement de base et de l’expertise qui les auraient maintenus en vie et auraient épargné ce deuil à leurs mères.

Bien que largement encouragés par les efforts et les contributions permettant aux femmes d’accoucher sans risque et de garantie des taux élevés de survie infantile, quel avenir attendait ces enfants et leurs mères? « La simple survie ne peut pas être l’objectif; l’avenir des citoyens de la nouvelle nation du monde devrait plutôt être le début d’une vie de santé, de bien-être, d’éducation, de dignité et de sécurité ».

« Dès le départ, les circonstances jouent en défaveur des adolescents et des jeunes réfugiés. Le sous-financement chronique prive la majorité d’entre eux de leur seule chance de surmonter les expériences pénibles qui les ont conduits à l’exil. »

Une autre génération d’enfants sud-soudanais grandit en exil, condamnée en marge de la société et privée des services élémentaires nécessaires pour s’épanouir dans un monde moderne, comme une bonne éducation, une bonne alimentation, une formation et des possibilités d’emploi.

Dès le départ, les circonstances jouent en défaveur des adolescents et des jeunes réfugiés. Le sous-financement chronique prive la majorité d’entre eux de leur seule chance de surmonter les expériences pénibles qui les ont conduits à l’exil. Plus de 50 % des 1,3 million d’enfants réfugiés sud-soudanais ne fréquentaient pas l’école en 2017, augmentant ainsi leur vulnérabilité aux risques tels que le recrutement forcé, la défloration, les grossesses précoces, le mariage des enfants et le recours au sexe de survie. Les écoles primaires sont surpeuplées ; très peu d’enfants et de jeunes peuvent accéder à l’enseignement secondaire ou trouver un emploi intéressant.

Le comportement des enfants plus âgés - les adolescents et les jeunes que j’ai rencontrés - a fait ressortir le désespoir qui caractérise l’exil. Même s’ils aspirent à devenir médecins, pilotes et enseignants, et à subvenir aux besoins de leur famille, ils sont tout à fait conscients des opportunités quasi inexistantes pour leur réussite - pour eux-mêmes, leur famille et leur communauté.

En réponse à ma question sur la vie dans le camp, un adolescent apathique avec un visage sans expression dessiné et une voix timide, a répondu « C’est trop dur » d’une voix étouffée.

« Dans l’esprit de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, nous devons d’urgence lutter contre les causes du conflit et créer les conditions pour que les femmes, les hommes, les filles et les garçons puissent vivre dignement chez eux et en exil ».

Il ne faut pas oublier le Soudan du Sud. Chaque crise est importante, parce que chaque vie est importante.

 

SAR la Princesse Sarah Zeid est conseillère auprès du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés sur la Parité, le déplacement forcé et la protection, et fervente militante en faveur de la santé maternelle et néonatale dans le monde. Suivez-la sur Twitter : @PrincessSarahZR