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Un ouvrier ukrainien fuit la zone de guerre à vélo

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Un ouvrier ukrainien fuit la zone de guerre à vélo

Vasily Zubko voulait désespérément rester dans ses steppes bien-aimées mais, quand le conflit est arrivé à sa porte, il a fui à vélo.
6 Juin 2018 Egalement disponible ici :
La famille Zubko (de gauche à droite) : Dmitry, Bogdan, David, Tatyana, Marianna, Pavel et Vasily.

Vasily Zubko espérait jusqu'à la fin qu'il pourrait rester dans ses steppes bien-aimées à l'est de l'Ukraine mais, à l’arrivée du conflit près de chez lui, il est monté sur son vélo et a pédalé hors de la zone de guerre.


Il a parcouru la moitié de la distance jusqu'à la capitale ukrainienne, Kiev, soit environ 400 kilomètres, sous les pluies de l'automne.

« C'était en novembre », indique-t-il. « La première nuit, je suis resté dans un monastère orthodoxe, la deuxième nuit avec des croyants orthodoxes et la troisième nuit avec des gens de notre propre église (pentecôtiste). J'étais trempé. »

« Ils ont vu que j'attrapais froid et que je ne voulais pas continuer à vélo. Ils m'ont mis dans le train pour Kiev. »

La famille de Vasily se trouvait déjà dans la capitale ukrainienne. Il les avait envoyés en lieu sûr dès le début des combats en juin 2014. Il est resté à Kadiyivka, dans la région de Luhansk, car il perfectionnait ses compétences dans l'usine où il travaillait comme tourneur. Il espérait encore que le conflit prendrait fin.

« Nous pouvions nous rendre compte que ça allait mal finir. »

Vasily, 50 ans, Marianna, 47 ans, et leurs cinq plus jeunes enfants sont aujourd’hui installés à Gdansk, la ville polonaise exemplaire pour l’intégration des réfugiés grâce à un programme municipal. Trois enfants adultes se trouvent toujours en Ukraine.

« Entrez », dit Marianna, en ouvrant la porte de la maison louée de la famille. Elle vient de rentrer d'un cours de polonais.

Vasily est dans la cuisine, en train de préparer des tartes aux pommes de terre et aux champignons.

« Nous venions d'acheter une maison et de réparer la cuisine lorsque la guerre en Ukraine a commencé », dit Marianna. « Il y a eu une lutte de pouvoir et des piquets de grève dans les rues. »

« Au début, ce n'était pas si mal, mais des hommes armés sont arrivés et ça nous a fait peur. Quand les tirs ont commencé, notre maison a été endommagée. Nous pouvions nous rendre compte que ça allait mal finir. »

Plus de 10 000 personnes ont déjà été tuées et plus de 1,6 million ont été déplacées en quatre ans de conflit dans l'est de l'Ukraine.

Marianna et Vasily ont été séparés pendant cinq mois après son départ pour Kiev et il est resté à Kadiyivka.

« La guerre s'aggravait. Il était évident que cela n'allait pas se terminer rapidement », dit Vasily. « J'ai compris qu'il y avait un danger, que je puisse rester bloqué à l'est et que nous pourrions être séparés pour une longue période. »

« Je savais qu'il pouvait effectuer cette distance à vélo. »

Il a décidé de partir en vélo, et le trajet aurait duré 825 kilomètres s'il avait pédalé jusqu'à la capitale.

Vasily était un cycliste expérimenté et, habile dans les techniques de survie, il allumait des feux et portait des couteaux pour se défendre contre les loups, si nécessaire.

En novembre 2014, les routes endommagées étaient dangereuses.

« Les gens qui partaient en voiture se faisaient tirer dessus », dit-il. « J'ai dû passer par plusieurs points de contrôle. Quand ils m'ont demandé où j'allais, j'ai dit le monastère de Sloviansk et ils m'ont laissé partir. Ils ont dû penser 'juste un pèlerin, quelque chose qui ne va pas dans sa tête'. J'ai traversé et j'ai su que Dieu m'aiderait. »

Il a séjourné dans une petite communauté de moines sur la route avant le célèbre Sviatohirsk Lavra (Monastère des Grottes de Sviatohirsk) dans la région de Donetsk. La troisième nuit, Vasily a atteint la maison de ses compagnons pentecôtistes dans la région de Poltava et, de là, il a pris le train pour Kiev.

Marianna savait qu'il était en route. « Il m'a appelé. Je savais qu'il pouvait effectuer cette distance à vélo, mais il faisait froid et les routes étaient dangereuses. J'étais inquiète, bien sûr. »

De nouveau réunis à Kiev, la famille dormait sur le sol de ses amis et espérait un logement à long terme. Cependant, ils ont constaté que les autorités de Kiev, submergées par les arrivées en provenance de l'est, tardaient à trouver une solution. « Un ami m'a dit : ‘Qu'avez-vous à perdre ? Pourquoi ne pas essayer la Pologne’ », explique Marianna.

Ils ont voyagé en train jusqu'à Lviv et sont entrés en Pologne, où ils ont déposé une demande d’asile. Le réseau pentecôtiste les a aidés à trouver un logement temporaire dans la ville de Godzisziszewo, près de Gdansk.

« Notre vie est ici maintenant. »

« Nous avons pensé à aller à Varsovie, mais Papa a dit : ‘Non, Gdansk est un port, il y aura du travail pour moi là-bas’ », indique Marianna. Malgré ses craintes car il parlait très peu le polonais, Vasily a rapidement trouvé un emploi dans une petite entreprise de Gdansk qui assure la maintenance des ponts.

Les employés de cette entreprise à Gdansk l'ont bien accueilli. « Dès que j'ai été accepté au travail, je me suis senti chez moi », explique-t-il.

Les enfants de la famille Zubko vont bien. Pavel, 21 ans, continue la photographie. David, 20 ans, suit des cours du soir. Et Bogdan, 18 ans, est à l'université technique. Dmitry, 16 ans, et Tatyana, 15 ans, sont tous les deux à l'école. David et Bogdan sont tous deux doués en dessin et espèrent devenir des artistes.

La famille a obtenu l'asile en janvier 2017. « Quand nous avons eu un ‘oui’, les enfants ont commencé à chanter et à danser », explique Marianna.

Peu après, ils ont emménagé dans la maison de Gdansk. Ils ont même un chat. « Maintenant que nous avons notre propre maison, nous pouvons nous permettre d'avoir un chat », indique Marianna.

Vasily n'a pas de vélo en Pologne. Il n'a pas fait de vélo depuis trois ans et dit que les muscles de ses jambes ne sont plus ce qu'ils étaient. L'Ukraine lui manque aussi. Il souffre pour les rossignols, les chevaux et les fleurs sauvages de la steppe.

L'avenir des enfants est la priorité et les jeunes sont déterminés à rester en Pologne. Dmitry affirme :  « Notre vie est ici maintenant. »