République du Congo: Loi No. 15-99 du 1999 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi No. 023-92 du 1992 portant sur le statut de la magistrature

LE CONSEIL NATIONAL DE TRANSITION A DELIBERE ET ADOPTE

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE PROMULGUE LA LOI DONT LA TENEUR SUIT:

TITRE PREMIER: DISPOSITIONS GENERALES

Article premier.-

Le corps de la magistrature comprend les magistrats du siège et du parquet de la Cour Suprême et des autres juridictions nationales, ainsi que les magistrats en service dans les administrations de l'Etat et les auditeurs de justice.

Les règles relatives à la fonction publique s'appliquent aux magistrats dans la mesure où elles ne sont pas contraires au présent statut.

Article 2.- (nouveau):

La hiérarchie du corps de la magistrature comprend trois grades comportant, chacun, des échelons.

Il existe, en outre, une catégorie hors hiérarchie.

Les échelons, ainsi que les fonctions exercées par les magistrats de chaque grade, sont définis par un décret du Président de la République pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature.

Article 3.- (nouveau):

Les magistrats de la Cour Suprême, des cours d'appel et de la cour des comptes sont nommés parmi les magistrats hors hiérarchie ou les magistrats du premier grade remplissant en outre les critères de:

·         ancienneté dans la profession;

·         expérience;

·         technicité et compétence;

·         cursus professionnel;

·         probité morale;

·         conscience professionnelle;

·         sens élevé du patriotisme.

Ils doivent attester d'une ancienneté d'au moins quinze année dont dix années effectives passées dans les juridictions ou dans les institutions centrales de l'Etat.

Les chefs de cours sont nommés parmi les magistrats hors hiérarchie ou du premier grade les plus anciens dans ces catégories.

Un décret du Président de la République, pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, fixe les modalités d'application du présent article.

Article 4.-

Les nominations aux divers emplois de la magistrature sont faites, sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, par décret du Président de la République.

Article 5.- (nouveau):

Les magistrats sont indépendant vis-à-vis du pouvoir politique, des groupes de pression et des justiciables.

Ils règlent les affaires dont ils sont saisis en toute impartialité, selon les faits et conformément à la loi, à l'abri de toute influence, de toute pression et de toute menace.

Toute action concertée de nature à arrêter ou à entraver le fonctionnement des juridictions est interdite.

Le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour Suprême et les autres juridictions nationales créées par la loi.

Le Président de la République garantit l'indépendance du pouvoir judiciaire à travers le conseil supérieur de la magistrature.

Les magistrats sont astreints, à l'audience, au port d'un costume dont les caractéristiques sont fixées par décret du Président de la République pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature.

Article 6.- (nouveau):

Tout magistrat, lors de sa nomination à son premier poste et avant d'entrer en fonction, prête serment en ces termes:

"Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes même après la cessation de mes fonctions et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat"

Il ne peut, en aucun cas, être relevé de ce serment.

Le serment est prêté devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle il est nommé.

Les magistrats, nommés à la Cour Suprême, prêtent un autre serment devant cette cour, dans les termes retenus par la loi sur l'organisation et le fonctionnement de cette haute juridiction.

En cas de nécessité, ces serments peuvent être prêtés par écrit.

L'ancien magistrat, révoqué, prête à nouveau serment lorsqu'il est réintégré.

Article 7.-

Les magistrats sont installés dans leurs fonctions en audience solennelle de la juridiction à laquelle ils sont nommés.

Le magistrat doit être installé même si le serment a été prêté par écrit.

Article 8.-

L'exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l'exercice de toute fonction publique ou élective et de toute autre activité, professionnelle ou salariée, à l'exception des activités agricoles.

Des dérogations individuelles peuvent, toutefois, être accordées aux magistrats, pour exercer des fonctions ou des activités qui ne sont pas de nature à porter atteinte à la dignité ou à l'indépendance du magistrat.

Les magistrats peuvent, sans autorisation préalable, se livrer à des travaux scientifiques, littéraires, artistiques ou d'enseignement.

Article 9.-

Les parents et alliés, jusqu'au degré d'oncle et de neveu inclusivement, ne peuvent point, simultanément, siéger à la même audience d'un même tribunal ou d'une même cour d'appel ou de la cour des comptes ou de la Cour Suprême, soit comme juges ou conseillers, soit comme membres du ministère public.

Article 10.-

Nul magistrat du siège ne peut, à peine de nullité de la procédure, connaître d'une affaire dans laquelle l'une des parties est représentée par un avocat, un conseiller, un mandataire, parent ou allié de ce magistrat jusqu'au troisième degré inclusivement.

Article 11.-

Nul magistrat, qui a connu l'affaire, ne peut, à peine de nullité des actes intervenus, se rendre acquéreur ou cessionnaire, soit par lui même soit par personne interposée, des droits litigieux ou des biens, des droits et des créances dont il doit poursuivre ou autoriser la vente.

Il ne peut, en outre, ni prendre ces biens en louage, ni les recevoir en nantissement.

Article 12.-

Aucun magistrat ne peut procéder à un acte de ses fonctions:

·         lorsqu'il s'agit de ses propres intérêts, de ceux de son conjoint, de ses parents en ligne directe ou en ligne collatérale ou de ses alliés, jusqu'au troisième degré inclusivement;

·         lorsqu'il s'agit des intérêts d'une personne dont il est le représentant légal ou le mandataire.

Article 13.-

Les magistrats sont tenus à l'obligation de réserve définie comme l'interdiction de faire état de leurs convictions politiques, philosophiques ou réligieuses dans le cadre de leurs fonctions.

Ils ne peuvent point être membres d'un parti politique.

Article 14.-

Les magistrats, indépendamment des règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, sont protégés contre les menaces et les attaques, de quelque nature qu'elles soient, dont ils peuvent faire l'objet, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions.

L'Etat doit réparer le préjudice direct qui en résulte.

Article 15.-

Les magistrats sont astreints à résider au siège de la juridiction à laquelle ils appartiennent. Ils ne peuvent s'absenter sans congé ou permission, si ce n'est pour cause de service.

Article 16.-

Lorsque le nombre de magistrats en fonction dans une juridiction est insuffisant pour assurer la continuité du service, il peut être remédié par la désignation, à titre intérimaire, par le chef de la juridiction hiérarchiquement supérieur de magistrats titulaires d'autres fonctions.

En aucun cas, le magistrat intérimaire ne peut se voir confier des fonctions qui lui donnent autorité sur des magistrats appartenant à un grade supérieur au sien ou plus ancien dans son grade.

TITRE II: DU RECRUTEMENT

Article 17.- (nouveau):

Les auditeurs de justice sont recrutés par voie de concours.

Le candidat à l'auditorat doit être de nationalité congolaise, âgé de vingt et un ans au moins, de trente cinq ans au plus, et être titulaire du diplôme de fin de deuxième cycle des université de droit ou des facultés de droit..

Avant d'être autorisé à concourir, le candidat à l'auditorat est soumis à une enquête de moralité diligentée par les services compétents.

Article 18.-

Ne peuvent être candidats à l'auditorat:

·         les individus qui ont été condamnés à une peine criminelle ou à une peine correctionnelle résultant de délits intentionnels;

·         les personnes de mauvaise moralité;

·         les incapables majeurs, les individus internés et ceux qui sont pourvus d'un conseil judiciaire ainsi que les individus manifestement atteints d'un trouble ou d'une affection qui amoindrit leurs facultés mentales;

·         les faillis non réhabilités.

Article 19.- (nouveau):

Un décret du Président de la République, pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, fixe l'organisation, le programme des épreuves et les matières des concours.

Article 20.-

Les candidats, admis au concours, sont nommés auditeurs de justice par décret du Président de la République pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature.

Article 21.-

La formation des auditeurs de justice s'étend sur une période de deux ans. Ils suivent une formation théorique, pratique ensuite dans les juridictions.

Ils sont astreints au secret professionnel.

Préalablement à toute activité pratique, les auditeurs de justice prêtent serment, soit par écrit, soit oralement devant la cour d'appel en ces termes:

"Je jure de garder scrupuleusement le secret professionnel et de me conduire en tout comme un digne et loyal auditeur de justice".

Ils ne peuvent, en aucun cas, être relevés de ce serment.

Article 22.-

L'aptitude des auditeurs de justice aux fonctions judiciaires est constatée à la fin du stage par leur inscription sur une liste de classement établie par ordre de mérite par le jury d'examen.

Cette liste est publiée au Journal Officiel.

Le jury d'examen peut écarter un auditeur de justice de l'accès aux fonctions judiciaires ou lui imposer le renouvellement d'une année de stage.

Les auditeurs de justice, déclarés aptes aux fonctions judiciaires, sont nommés au groupe 2 deuxième grade par décret du Président de la République sur proposition du conseil supérieur de la magistrature.

Article 23.-

Sont dispensés du stage après leur admission au concours:

·         les avocats titulaires d'une licence en droit ancien régime ou d'une maîtrise en droit qui justifient d'au moins dix années d'activité professionnelle effective;

·         les notaires titulaires d'une licence en droit ancien régime ou d'une maîtrise en droit qui justifient d'au moins dix années d'activité professionnelle effective;

·         les huissiers de justice titulaires d'une licence en droit ancien régime ou d'une maîtrise en droit qui justifient d'au moins dix années d'activité professionnelle effective:

·         les greffiers en chef titulaires d'une licence en droit ancien régime ou d'une maîtrise en droit qui justifient d'au moins dix années d'activité professionnelle effective.

Article 24.-

Sont admis sur titre:

·         les professeurs agrégés de droit qui totalisent cinq années au moins de service dans le grade;

·         les maîtres de conférence qui totalisent huit années au moins de service dans le grade;

·         les maîtres assistants qui totalisent dix années au moins de service dans le grade;

·         les avocats titulaires d'une licence en droit ancien régime ou d'une maîtrise en droit qui totalisent quinze années au moins d'activité professionnelle effective.

Article 25.-

Le nombre de magistrats nommés au titre des articles 23 et 24 ne peut dépasser le cinquième des vacances constatées dans chacun des deux grades.

TITRE III: DE L'AVANCEMENT

Article 26.-

Nul magistrat du second grade ne peut être nommé au grade supérieur s'il n'est inscrit au tableau d'avancement.

Le conseil supérieur de la magistrature, siégeant comme commission d'avancement, dresse et arrête le tableau d'avancement ainsi que les listes d'aptitude aux fonctions.

Article 27.- (nouveau):

Le tableau d'avancement et les listes d'aptitude sont établis annuellement. Le tableau d'avancement cesse d'être valable à l'expiration de l'année pour laquelle il a été dressé. L'inscription sur les listes d'aptitude est définitive, sauf radiation décidée dans les mêmes formes que l'inscription.

Un décret du Président de la République, pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, spécifie les fonctions qui ne peuvent être conférées qu'après inscription sur une liste d'aptitude. Il détermine les conditions requises pour figurer au tableau d'avancement ou sur les listes d'aptitude ainsi que les modalités d'élaboration et d'établissement de ce tableau ou des listes d'aptitude.

Nul magistrat d'instance ne peut être nommé à la cour d'appel s'il n'a accompli au moins dix années d'exercice de ses fonctions.

TITRE IV: DE LA DISCIPLINE

Article 28.- (nouveau):

Tout manquement par un magistrat au devoir de son été, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité constitue une faute.

Toute insubordination caractérisée et réitérée constitue également une faute.

Article 29.- (nouveau):

Les chefs de cours, en dehors de toute action disciplinaire, ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité.

Article 30.-

Les sanctions disciplinaires applicables aux magistrats sont:

·         la réprimande avec inscription au dossier;

·         le déplacement d'office;

·         le retrait de certaines fonctions;

·         l'abaissement d'échelon;

·         la rétrogradation;

·         la mise à la retraite d'office ou l'admission à cesser les fonctions lorsque le magistrat n'a pas droit à une pension de retraite;

·         la révocation avec droits à pension.

Article 31.-

Si un magistrat est poursuivi en même temps pour plusieurs faits, il ne peut être prononcé contre lui que l'une des sanctions prévues à l'article précédent.

Toutefois les sanctions prévues aux points 3, 4 et 5 de l'article précédent peuvent être assortie du déplacement d'office.

Article 32.-

Le Procureur Général près la Cour Suprême, sur rapport du supérieur hiérarchique du magistrat, dénonce les faits qui motivent la poursuite disciplinaire au conseil supérieur de la magistrature siégeant en conseil de discipline.

Article 33.-

Le conseil supérieur de la magistrature désigne, parmi ses membres, un rapporteur qu'il charge éventuellement de procéder à une enquête.

Article 34.-

Le rapporteur, au cours de l'enquête, entend ou fait entendre le magistrat poursuivi par un magistrat d'un rang supérieur et, s'il y a lier, le plaignant et les témoins. Il accomplit tout acte d'investigations utile.

Article 35.-

Le magistrat a droit à la communication de son entier dossier ainsi que son conseil, soixante douze heures au moins avant sa comparution devant le conseil supérieur de la magistrature.

Lorsqu'une enquête n'a pas été jugée nécessaire ou lorsque l'enquête est complète, le magistrat est appelé à comparaître devant le conseil supérieur de la magistrature.

Article 36.-

Le magistrat, appelé, est tenu de comparaître en personne. Il peut se faire assister de tout conseil de son choix. En cas de maladie ou d'empêchement dûment justifié il est sursis à l'action disciplinaire.

Article 37.-

Au jour fixé pour la comparution et après lecture du rapport, le magistrat est invité à fournir ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui sont reprochés.

Si le magistrat dûment appelé, hors le cas de force majeure, ne comparaît pas, il peut néanmoins être statué et la décision est réputée contradictoire.

La convocation à comparaître est adressée au magistrat par le secrétariat général du conseil supérieur de la magistrature.

Article 38.-

Le conseil de discipline statue à huit clos; la décision, qui est motivée, est susceptible de recours devant la chambre administrative et constitutionnelle de la Cour Suprême qui statue dans un délai de deux mois à compter de la date de recours.

Article 39.-

La décision rendue est notifiée au magistrat par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle prend effet à compter du jour de cette notification nonobstant le recours prévu à l'article précédent.

TITRE V: DE LA REMUNERATION

Article 40.- (nouveau):

Les magistrats perçoivent une rémunération qui comprend le traitement indiciaire et ses accessoires.

Cette rémunération correspond au traitement le plus élevé alloué aux fonctionnaires assimilés de l'Etat.

Un décret du Président de la République, pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, détermine la nature et le taux de cette rémunération et des accessoires.

TITRE VI: DES POSITIONS

Article 41.-

Tout magistrat est placé dans l'une des positions suivantes:

·         en activité;

·         en congé maladie;

·         en service détaché;

·         en disponibilité

·         sous les drapeaux.

Article 42.- (nouveau):

La mise en position de détachement, de disponibilité ou sous les drapeaux est prononcée dans les formes prévues pour les nominations des magistrats. Nul magistrat ne peut être placé en position de détachement s'il n'a exercé comme magistrat sans discontinuer pendant dix années. Aucun détachement de magistrat ne peut excéder cinq ans.

Article 43.- (nouveau):

Un décret du Président de la République, pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, détermine les conditions d'application de l'article précédent.

TITRE VII: DE LA CESSATION DES FONCTIONS

Article 44.-

La cessation des fonctions résulte:

·         de la démission;

·         de la mise à la retraite;

·         de la révocation.

Article 45.-

Tout magistrat, âgé de soixante cinq ans, est admis à faire valoir ses droits à la retraite.

Toutefois, sur demande expresse acceptée par le conseil supérieur de la magistrature, tout magistrat, ayant accompli trente ans de service ininterrompu, peut faire valoir ses droits à la retraite avant l'âge de soixante cinq ans.

Article 46.- (nouveau):

L'honorariat peut être conféré à tout magistrat, à la cessation de ses activités.

Un décret du Président de la République, pris sur proposition du conseil supérieur de la magistrature, détermine les attributions et les privilèges attachés à l'honorariat.

TITRE VIII: DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES

Article 47.-

Les magistrats relèvent du conseil supérieur de la magistrature.

Article 48.-

Sont et demeurent abrogées toutes dispositions antérieures ou contraires à celles de la présente loi, notamment celles de la loi n° 023-92 du 20 août 1992 portant statut de la magistrature.

Article 49.-

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat./-

Fait à Brazzaville, le 15 avril 1999

Général d'Armée Denis SASSOU-NGUESSO.-

Par le Président de la République,

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

Jean-Martin MBEMBA.-

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