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Survivre en zone de guerre par un hiver glacial

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Survivre en zone de guerre par un hiver glacial

En Ukraine, les températures hivernales affectent des milliers de personnes dont la vie est déjà déchirée par le conflit.
22 Janvier 2019
Une femme attend au chaud dans un bus à un poste de contrôle à Marïnka, en Ukraine.

Depuis 2014, le conflit en Ukraine a forcé 1,5 million de personnes à fuir leur foyer. Pour les personnes affectées par la violence, l'hiver peut rendre la vie particulièrement difficile, avec des températures descendant jusqu'à moins 20 degrés. Après cinq ans de conflit, beaucoup de déplacés ont épuisé leurs ressources et sont souvent forcés de choisir entre acheter de la nourriture et des médicaments ou payer le chauffage.


En 2018, le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, a intensifié la distribution d'aide - notamment des vêtements, du carburant et des allocations d’aide en espèces - à des milliers de ménages déplacés dans l'est de l'Ukraine. En collaboration avec ses partenaires, le HCR consolide également les abris existants et les tentes chauffées aux points de contrôle ainsi que la ligne de contact qui sépare les zones sous contrôle gouvernemental ou non-gouvernemental.

Faites connaissance avec quatre Ukrainiens déplacés qui reçoivent le soutien du HCR et des ONG partenaires cet hiver.

Stefania et son chien devant la maison du voisin où elle réside à Mykolaïv, Donetsk.

Stefania, 71 ans

Je vis à Mykolaïv, dans le Donetsk, depuis de nombreuses années. Les hivers y sont froids et venteux. La température peut descendre jusqu'à moins 10 degrés.

Les bombardements rendent la vie difficile à cette époque de l'année. Quand ça commence, la première chose à faire est de courir à la cave, mais il y fait très froid. Quand ma maison a été bombardée en 2015, j'ai apporté tous les vêtements chauds et les couvertures que j'avais sous la main. Même à cette époque, il faisait froid.

Après les bombardements, je suis allée voir les dégâts chez moi. Curieusement, beaucoup de choses étaient restées intactes, y compris le réfrigérateur et la télévision. Mais il manquait le plafond. L'odeur était terrible. Beaucoup de choses brûlaient et j'ai dû emménager chez un voisin.

Après cet hiver-là, j'ai développé des problèmes de reins et de cœur.

Stefania a reçu quatre tonnes de charbon de la part du HCR, ce qui l'aide à se réchauffer et à cuisiner.

Cette année, j'ai reçu du matériel d'hébergement d'urgence de la part du HCR. On m'a aussi donné quatre tonnes de charbon.

Je rêve de retourner dans ma maison. Et de dormir dans mon lit en chemise de nuit. Nous dormons dans nos vêtements depuis tant d'années. Quand ils commencent à bombarder, il faut immédiatement courir à la cave. Vous n'avez pas le temps de vous habiller.

J'espère que les combats cesseront et que mes enfants reviendront à la maison. Le fils de ma fille n'a que deux ans, mais il a déjà beaucoup de problèmes de santé à cause du stress et de la peur. Il ne peut pas regarder les feux d'artifice parce qu'il a craint que ce soit des bombardements.

J'espère de tout mon cœur qu'un jour ils reviendront.

Vladyslav photographié dans sa maison endommagée à Avdiïvka, Donetsk.

Vladyslav, 64 ans

Je viens d’Avdiïvka, dans le Donetsk. Ma femme est morte il y a des années et mes deux filles vivent en Crimée avec leurs enfants. Beaucoup de gens ont fui notre ville.

Après le bombardement de ma maison en 2015, j'ai déménagé au sous-sol parce que le toit et une grande partie de l'intérieur ont été détruits. Les voisins sont restés chez moi. La nuit, on entendait des bombardements et des explosions de conduites de gaz. Je me souviens d'avoir coupé des arbres dans le jardin pour se réchauffer.

Il n'y avait ni pain, ni lumière, ni gaz. Nous mangions des pommes de terre que nous avions cultivées l'été et, si quelqu'un allait dehors, nous lui demandions où il allait, pour savoir où le trouver s'il était tué.

Maintenant, je ne peux plus être seul. J'ai peur. Je suis reconnaissant envers mes voisins, l'après-midi, je vais chez eux et je me réchauffe. Les prix du charbon sont élevés et je mange à peine l'été pour que je puisse acheter du charbon pour l'hiver. Une subvention du HCR aidera à payer l'électricité. Je ne peux pas le payer avec ma pension, qui n'est que de 1 900 hryvnias (environ 67 dollars) par mois.

Mes filles me manquent beaucoup. Malheureusement, il y a des problèmes avec les lignes téléphoniques dans ma rue, alors je n'ai pas pu les appeler depuis environ un mois.

Je veux la paix. Je ne veux pas que les gens meurent de faim et de froid. Je ne veux pas que les enfants entendent des explosions. J'espère que la paix viendra enfin.

Olena dans son appartement, près de la ligne de contact, avec sa fille Yelyzaveta, 7 mois.

Olena, 23 ans

Je vis dans le village de Majorsk, dans le Donetsk, avec ma fille Yelyzaveta qui a sept mois.

J'ai emménagé ici après la mort de ma mère en 2017. J'étais très déprimée. Je ne voulais pas vivre, alors quand l’une de mes amies m'a invitée à la rejoindre, j'ai accepté son invitation avec plaisir.

Mais l'hiver a été rude. Après m'être rapprochée de la ligne de contact avec un petit enfant dans les bras, je ressens le poids de la situation.

A cause du conflit, il n'y a pas de chauffage central dans mon bâtiment, alors j'étais très heureuse quand le HCR et son partenaire l'ONG Proliska, m'ont apporté un poêle. La chose la plus importante, c’est le chauffage. D'autres organisations aident aussi. C'est difficile quand on a un enfant.

J'espère que nous pourrons déménager dans un autre endroit, plus sûr que celui où nous sommes maintenant. Il n'y a pas d'hôpital ou de pharmacie à proximité, et je m'inquiète toujours de la rapidité avec laquelle l'ambulance arriverait si quelque chose se passe.

Nadiya, ici chez elle à Donetsk, a élevé 15 enfants adoptés.

Nadiya, 59 ans

Vous ne pouvez pas imaginer ce que nous avons vécu depuis le début du conflit.

Pendant les deux premières années, nous avons vécu dans le village de Zhovanka, tout près de la ligne de contact, et nous avons été bombardés presque chaque jour. La maison a été endommagée et nos chiens ont été tués. Nous ne pouvions même pas marcher à cause des mines terrestres.

C'était particulièrement difficile en hiver. Les fenêtres étaient brisées et nous avons lutté pour garder notre maison au chaud. Quand il pleuvait, l’eau fuyait du toit et il n'y avait pas d'électricité, la plupart du temps. Nous avions tous peur, mais nous n'avions nulle part où aller.

Nadiya avec deux de ses enfants adoptés chez eux à Tchassiv Yar.

En 2016, grâce à l’ONG Proliska, nous avons pu déménager dans un endroit plus sûr à Tchassiv Yar. Ils ont été la première organisation à nous soutenir et nous leur en sommes très reconnaissants. Ils apportaient de la nourriture et des vêtements chauds, du charbon et des médicaments.

Ensemble, mon mari et moi avons élevé 15 enfants adoptés et notre propre fille. La majorité de nos enfants ont des besoins spéciaux. Certains d'entre eux ont grandi et ont fondé leur propre famille.

L'année dernière, le HCR nous a donné des vestes d'hiver pour tous les enfants, ainsi que des couvertures chaudes, des draps, des serviettes et un kit d'ustensiles de cuisine.

Récemment, je suis allée à un concert. Pendant que le public s'amusait, je me suis mise à pleurer. La vie est si injuste ! Certaines personnes ont la chance de vivre heureuses, tandis que d'autres sont privées même des services essentiels dans leur village le long de la ligne de contact.

J'espère que le conflit prendra bientôt fin. Les soldats rentreront chez eux et retrouveront leurs familles, et les gens de l'Est du pays retrouveront une vie normale et paisible.