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L'aide humanitaire revient peu à peu dans les camps de réfugiés au sud du Tigré

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L'aide humanitaire revient peu à peu dans les camps de réfugiés au sud du Tigré

Le HCR a de nouveau accès aux camps de réfugiés d'Adi Harush et de Mai Aini, alors que deux autres camps de réfugiés érythréens demeurent coupés du monde du fait de l'insécurité persistante.
21 Janvier 2021

Les craintes d’Abraham s’apaisent depuis qu’il voit des travailleurs humanitaires de retour au camp d’Adi Harush. En effet, en novembre dernier, les agences d’aide avaient dû mettre fin à leurs opérations suite à l’escalade de la violence dans la région du Tigré en Ethiopie.


« Après le départ des travailleurs humanitaires, nous nous sentions bien seuls. C’est formidable de voir le retour du HCR », indique ce père érythréen de quatre enfants, qui est réfugié en Ethiopie depuis quatre ans

Il ajoute que les services assurés par le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et d’autres organisations humanitaires, avant la cessation temporaire de leurs activités, leur rendaient espoir.

« A cette période-là, nous savions que nous n’étions pas oubliés. Nous avions une école et une clinique – au moins le HCR faisait tout son possible pour préparer notre avenir, même s’il nous paraissait très lointain », ajoute-t-il. « La vie n’était pas facile dans le camp de réfugiés mais, au moins, nous nous sentions davantage en sécurité. »

Le personnel du HCR a quitté le camp début novembre 2020 dans le contexte de l’escalade du conflit au Tigré qui a forcé plus de 58 000 civils à fuir en quête de refuge au Soudan voisin. Des centaines de milliers d’autres sont déplacés en Ethiopie et certaines zones demeurent inaccessibles.

Richelle Haines, employée du HCR en charge de la protection basée à Shire, dans la région du Tigré, se rappelle du jour où ils ont dû quitter le Tigré.

« Lorsque nous sommes partis, les gens ont demandé avec un haussement d’épaules ‘Pourquoi partez-vous ? Et maintenant, que va-t-il se passer ?’ » explique Richelle Haines qui travaille en Ethiopie depuis plus de 10 ans.

« Nous n’avons pas eu le choix concernant le départ, qui a été ressenti comme un abandon. Bien que ce soit mon lieu d’affectation, c’est aussi devenu mon chez-soi et le quitter signifiait laisser derrière moi beaucoup d’amis proches », ajoute-t-elle.

« Lorsque nous sommes partis, les gens ont demandé avec un haussement d’épaules, ‘Pourquoi partez-vous ? Et maintenant, que va-t-il se passer ?’ »

Aujourd’hui Richelle et ses collègues sont de retour, pour une courte période cependant jusqu’à ce que le HCR obtienne l’autorisation du gouvernement pour un retour permanent. Alors qu’elle se déplace dans le camp et ses alentours, elle salue et discute aussi bien en amharique qu’en tigrigna avec les résidents rencontrés.

« Lorsque nous sommes revenus, ils ont tous fait le même geste de la main, comme s’ils nous disaient, ‘Vous êtes enfin de retour’ » dit-elle.

Environ 96 000 réfugiés érythréens – parmi lesquels certains sont arrivés il y a tout juste un an, et d’autres depuis 20 ans environ – sont enregistrés dans quatre camps du HCR dans la région du Tigré.

Alors que le HCR a retrouvé accès aux camps d’Adi Harush et de Mai Aini, ce n’est pas le cas dans les camps de réfugiés de Shimelba et de Hitsats depuis le début de l’opération de maintien de l’ordre il y a deux mois, et ce malgré ses demandes répétées.

Le HCR demeure préoccupé par la sécurité et le bien-être des réfugiés érythréens, qui n’ont reçu aucune aide dans ces camps durant plusieurs semaines. 

A Adi Harush, les réfugiés vivent dans de petites huttes reliées par des cordes, avec parfois un carré de terrain pour des poulets ou une chèvre. La plupart ont construit leur abri eux-mêmes, à l’aide de pierres collectées aux alentours. Les huttes sont petites, parfois sans fenêtre, et elles n’ont ni l’eau ni l’électricité. Mais, pour la plupart des réfugiés, c’est leur chez-soi et ils s’y sentent en sécurité.

« Ce sentiment de sécurité a disparu », explique Amanuel, un autre Erythréen qui vit à Adi Harush. « Au début du conflit, je pensais que la nourriture et l’eau potable étaient notre principal problème. Mais aujourd’hui c’est plutôt la situation de sécurité. »

Heureusement, les camps de réfugiés d'Adi Harush et de Mai Aini n'ont pas été directement touchés par le conflit. L'infrastructure des camps est en grande partie intacte, mais les vols étaient fréquents, surtout la nuit, et les réfugiés pouvaient entendre les bruits du conflit militaire. Certains se sont fait voler leur téléphone portable qui, pour beaucoup, était leur unique objet de valeur et le seul moyen de communiquer avec leur famille en Érythrée ou ailleurs.

« Toutes les nuits, nous vivons dans la peur, ce conflit va reprendre. Nous craignons que les voleurs et les pillards ne profitent de l'absence d'ordre public », ajoute Amanuel.

Samuel, 36 ans, convient également que la vie est difficile. Depuis plus de deux mois, lui et sa famille de six personnes n’ont reçu aucune aide alimentaire. Les prix des articles de première nécessité au marché ont grimpé en flèche et la seule source d’eau est une rivière, située à quelques minutes à pied depuis le camp.

« La vie est difficile dans un camp de réfugiés », explique Samuel. « Mais maintenant elle est insupportable. »

Il ajoute que l’eau de la rivière, qui est plutôt un ruisseau, est quasiment inutilisable. L’eau est stagnante, boueuse et trouble.

« L’eau n’est pas propre », dit-il.

Mais ils n’ont pas d’autre alternative et ils l’utilisent pour le lavage, la cuisson des aliments et même la boisson.

« Mes enfants ont besoin de boire de l’eau ; nous avons tous besoin de boire. Mais s’ils boivent cette eau, alors ils auront la diarrhée. Que faire ? » demande-t-il.

Juste avant Noël, conjointement avec l’Agence éthiopienne chargée des réfugiés, le Programme alimentaire mondial (PAM) et le HCR ont fourni une première aide alimentaire aux réfugiés à Adi Harush et Mai Aini. « Un miracle de Noël », selon certains. 

« Nous ferons tout notre possible pour les aider. Plus que jamais. »

« Nous vous avons attendus. Tous les problèmes ne sont pas encore réglés, mais ça va déjà mieux », dit Abraham. « Les écoles doivent être ouvertes bientôt, et nous espérons recevoir de l’eau propre. Mais le plus important, c'est de vivre à nouveau en sécurité. »

Richelle Haines, du HCR, commente l'espoir exprimé par Abraham.

« Ce sera difficile de concrétiser cet espoir », dit-elle. « Mais nous ferons tout notre possible pour les aider. Plus que jamais. »