Conclusion sur la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels
Conclusion sur la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels
No. 98 (LIV) - 2003
Le Comité exécutif,
Réaffirmant ses conclusions No. 39 (XXXVI), No. 47 (XXXVIII), No. 54 (XXXIX), No. 60 (XL), No. 64 (XLI), No. 68 (XLIII), No. 73 (XLIV), No. 74 (XLVI), No. 79 (XLVIII), No. 84 (XLVIII), No. 85 (XLIX), No. 87 (L), No. 91 (LII) et No. 94 (LIII) et, en particulier, la nécessité de lutter contre la violence sexuelle et liée à l'appartenance sexuelle dans les situations de réfugiés, et rappelant également dans ce contexte les buts et objectifs pertinents de l'Agenda pour la protection,
Rappelant les efforts de la communauté internationale pour renforcer le cadre juridique international afin de lutter contre l'exploitation et les sévices sexuels,
Rappelant également le rapport du Bureau des services de contrôle interne des Nations Unies sur l'enquête sur les cas d'exploitation sexuelle de réfugiés par des agents humanitaires en Afrique de l'Ouest1 ainsi que la résolution A/RES/57/306,
Prenant note des rapports inquiétants de ces dernières années selon lesquels des réfugiés et des demandeurs d'asile - en particulier des femmes et des enfants - ont été victimes d'exploitation et de sévices sexuels au cours de la fuite ou dès leur arrivée dans le pays d'asile, et profondément préoccupé par les retombées néfastes de cette situation sur leur accès à la protection et à l'assistance, y compris aux soins de santé, à l'éducation, à l'établissement de papiers d'identité ou à l'octroi d'un statut de réfugié,
Reconnaissant que l'exploitation et les sévices sexuels sont une conséquence d'un rapport de forces inégal; une dynamique souvent exacerbée au cours des crises humanitaires caractérisées par la violence généralisée, le déplacement massif et l'effondrement des structures familiales, des régimes sociaux et des systèmes de valeur; et notant avec inquiétude l'implication d'agents humanitaires, de fonctionnaires et d'autres personnes travaillant aux côtés des populations réfugiées,
Reconnaissant qu'une protection inadéquate ou une assistance inappropriée, particulièrement la quantité et la qualité de vivres et d'autres secours matériels, accroît la vulnérabilité des réfugiés et des demandeurs d'asile face à l'exploitation et aux sévices sexuels,
Reconnaissant l'importance de mécanismes efficaces visant à prévenir et résoudre les cas d'exploitation et de sévices sexuels à toutes les étapes de l'expérience en tant que réfugié,
Reconnaissant que l'intérêt supérieur de l'enfant constituera une préoccupation primordiale dans la conception et l'application de toutes les mesures de prévention et de réponse, pour veiller à la protection des enfants de toutes les formes de sévices, de négligences, d'exploitation et de violence, y compris l'exploitation et les sévices sexuels,
Se félicitant du rapport de juin 2002 publié par le Groupe de travail sur la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels dans les crises humanitaires et de son Plan d'action visant à s'attaquer au problème de l'exploitation et des sévices sexuels,
Rappelant les politiques et principes directeurs antérieurs du HCR sur la violence contre les réfugiés, y compris la politique de 1989 et les Lignes directrices de 1991 sur la protection des femmes réfugiées, la Politique de 1993 sur les enfants réfugiés et les Principes directeurs de 1994 concernant la protection et l'assistance des enfants réfugiés, les Principes directeurs de 1995 sur la prévention et la réponse en matière de violence sexuelle à l'encontre des réfugiés, tels qu'amendés en 2003, et les Cinq engagements pris en 2001 par le Haut Commissaire concernant les femmes réfugiées,
Notant la publication de la nouvelle édition des Principes directeurs du HCR de mai 2003 sur la violence sexuelle et sexiste dans les situations de réfugiés, de rapatriés et de personnes déplacées, ainsi que les Principes directeurs sur la protection internationale et sur la persécution liée à l'appartenance sexuelle, de mai 2002, et notant les efforts fournis par le HCR pour traiter le problème de la violence sexuelle et liée à l'appartenance sexuelle sur le terrain ainsi que les différentes initiatives de formation lancées à ce jour pour offrir au personnel les compétences pratiques nécessaires à la satisfaction des besoins de protection des victimes d'exploitation et de sévices sexuels,
Se félicitant des efforts déployés par le HCR pour s'attaquer au problème moyennant la promulgation et l'application d'un code de conduite à l'intention du personnel du HCR, conformément au plan d'action du Groupe de travail du Comité permanent interinstitutions sur la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels dans les crises humanitaires, et l'amendement des accords subsidiaires de mise en oeuvre du programme comprenant l'exigence pour les partenaires d'exécution de se doter de codes de conduite similaires et de les appliquer sans réserve,
a) Prie les Etats, le HCR et ses partenaires opérationnels et d'exécution d'assurer l'établissement de systèmes appropriés de prévention et de réponse à la violence sexuelle et liée à l'appartenance sexuelle, y compris l'exploitation et les sévices sexuels, en veillant à ce que les besoins des femmes et des enfants ainsi que ceux des personnes vulnérables soient couverts en toutes circonstances; et recommande que les mesures visant à lutter contre l'exploitation et les sévices sexuels des réfugiés et des demandeurs d'asile soient prises dans un souci de :
Garantir une référence explicite dans les codes de conduite et les autres politiques pertinentes aux responsabilités du personnel compétent dans la prévention et la réponse adéquates à la violence sexuelle et liée à l'appartenance sexuelle, y compris l'exploitation et les sévices sexuels;
Garantir une enquête rapide sur les allégations d'exploitation et de sévices sexuels;
S'assurer que les mesures prises en faveur des réfugiés et des demandeurs d'asile, y compris les femmes, les enfants et les personnes vulnérables, renforcent leur participation active aux processus décisionnels, qu'ils reçoivent une information suffisante pour se faire leur propre opinion, qu'ils disposent des voies de communication adéquates pour faire connaître leurs préoccupations aux institutions humanitaires et qu'ils reçoivent une information complète concernant leurs droits, tant en matière de protection des réfugiés qu'en matière d'assistance disponible;
Assurer que les recensements, évaluations et rapports relatifs aux besoins identifient les risques d'exploitation et de sévices sexuels et jettent les bases d'une amélioration de la planification des programmes afin de minimiser les dangers et possibilités d'exploitation et de sévices sexuels et que les processus de protection et d'assistance, compte tenu de la quantité et de la qualité de l'assistance et des méthodes de distribution, y compris la supervision, soient conçus et mis en oeuvre de sorte à réduire les risques d'exploitation et de sévices sexuels;
Veiller à ce que la gestion des camps s'effectue de façon équitable pour permettre aux femmes, aux enfants et aux groupes vulnérables de prendre en main leur destinée et à ce que l'aménagement du camp expose moins ses occupants aux risques d'exploitation et de sévices sexuels;
Garantir l'accès facile et le caractère confidentiel des mécanismes de poursuite et de réparation pour les victimes d'exploitation et de sévices sexuels sanctionnant de façon appropriée les auteurs de ces actes et veiller à ce que ces mécanismes respectent les garanties prévues par la loi pour les inculpés ainsi que le respect de la sécurité et des droits de la victime ou des témoins;
Assurer l'existence de mesures adéquates de recours afin de prendre en charge comme il convient les victimes d'exploitation et de sévices sexuels;
Organiser une formation et développer les capacités en matière de prévention et de traitement de l'exploitation et des sévices sexuels;
b) Demande au HCR de poursuivre ses activités actuelles dans ce domaine en s'attachant tout particulièrement à :
Garantir le strict respect des politiques, codes de conduite, principes directeurs sur la violence sexuelle et liée à l'appartenance sexuelle dans les situations de réfugiés, de rapatriés et de personnes déplacées ainsi que les principes directeurs du HCR sur la persécution liée au genre;
Appliquer les recommandations pertinentes des évaluations des activités du HCR dans le domaine des femmes réfugiées, des enfants réfugiés et des services communautaires;
Assurer un niveau adéquat de suivi et de supervision des programmes aux fins de prévention et de protection contre l'exploitation et les sévices sexuels, y compris moyennant une présence physique et un appui au personnel de terrain pour mettre en oeuvre des programmes d'action concrets;
Elaborer des mécanismes visant à garantir l'obligation redditionnelle, y compris au niveau de l'encadrement, dans la mise en oeuvre de toutes les activités de protection et d'assistance destinées à prévenir la violence sexuelle et liée à l'appartenance sexuelle;
Promouvoir la parité à tous les niveaux du personnel du HCR, tant au Siège que sur le terrain, ainsi qu'au niveau des experts, tout en accordant l'importance due aux critères de choix sur la base du mérite;
c) Exhorte tous les Etats, conformément aux dispositions applicables du droit international des réfugiés, des droits de l'homme et du droit international humanitaire,
A protéger les réfugiés et les demandeurs d'asile, particulièrement les enfants, de toutes les formes de sévices, d'abandon, d'exploitation et de violence;
A coopérer à l'élimination de toutes les formes de discrimination, d'exploitation et de violence sexuelle contre les femmes réfugiés et requérantes d'asile, et à promouvoir leur participation active aux décisions touchant à leur vie et à leur communauté;
d) Prie instamment les Etats de respecter et de garantir le droit de toute personne, sur leur territoire et relevant de leur juridiction, à la sécurité de la personne, notamment en renforçant la législation nationale pertinente conformément au droit international et en adoptant des mesures concrètes pour lutter contre l'exploitation et les sévices sexuels ainsi que pour les prévenir, notamment :
En élaborant et appliquant des programmes de formation, des principes directeurs et d'autres mesures pratiques visant à promouvoir le respect, par tous les fonctionnaires gouvernementaux ainsi que les personnes agissant au nom de l'Etat aux côtés des populations réfugiées, du droit de chacun à la sécurité de la personne, et visant à promouvoir la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels;
En prenant les mesures de suivi qui conviennent dans la réponse aux allégations de violence et d'exploitation sexuelle, y compris, si nécessaire, moyennant des mesures correctrices telles que la facilitation du dépôt de plainte pour exploitation et sévices sexuels, la poursuite des auteurs de ces actes et des sanctions disciplinaires opportunes et proportionnelles dans les cas d'abus de pouvoir ou de faute lourde entraînant l'exploitation sexuelle;
En établissant, si nécessaire, des mécanismes de poursuite et de réparation présentant une facilité d'accès et ne compromettant pas la sécurité des victimes ou d'autres personnes citées en qualité de témoins, eu égard aux critères de confidentialité; ces mécanismes de poursuite doivent, si possible, offrir aux victimes et aux témoins des possibilités d'accès aux services d'appui dotés de personnel ayant la formation requise, y compris un personnel féminin dans le domaine de l'orientation sociale;
e) Encourage les Etats à s'assurer que toutes les institutions humanitaires financées par eux et travaillant auprès des réfugiés intègrent et préconisent une politique générale conforme aux principes fondamentaux du Plan d'action du Groupe de travail du Comité permanent interinstitutions sur la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels dans les crises humanitaires;
f) Prie le HCR de renforcer sa capacité intérieure en matière d'enquêtes au sein du Bureau de l'Inspecteur général afin d'assurer une réponse rapide et efficace visant à vérifier la véracité de toute allégation d'exploitation ou de sévices sexuels de la part d'agents du HCR ou de ses partenaires d'exécution;
g) Invite la communauté internationale, en coopération avec le HCR et d'autres organisations internationales, à mobiliser les ressources nécessaires pour garantir la fourniture d'une protection et d'une assistance matérielle à l'appui des pays hôtes, sur la base de la solidarité, de la coopération, du partage de la charge et des responsabilités, dans la mesure où une protection inadéquate ou une assistance inadéquate, inappropriée ou non contrôlée accroît la vulnérabilité des réfugiés et des demandeurs d'asile à l'exploitation et aux sévices sexuels;
h) Demande au HCR de poursuivre sa coopération avec d'autres acteurs pour assurer la protection des réfugiés et des demandeurs d'asile contre l'exploitation et les sévices sexuels, y compris moyennant la participation au Groupe de travail du Comité permanent interinstitutions sur la protection contre l'exploitation et les sévices sexuels dans les crises humanitaires ainsi qu'à d'autres mécanismes de coordination;
i) Prie le HCR de continuer à présenter régulièrement des rapports sur les progrès accomplis dans la mise en oeuvre des mesures visant à lutter contre l'exploitation et les sévices sexuels.
1 A/57/465