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Exposé presenté par le Prince Sadruddin Aga Khan, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, à la XXIème session du Conseil des gouverneurs de la Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge, La Haye, 5-9 septembre 1967

Discours et déclarations

Exposé presenté par le Prince Sadruddin Aga Khan, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, à la XXIème session du Conseil des gouverneurs de la Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge, La Haye, 5-9 septembre 1967

9 Septembre 1967

Monsieur le Président,

Mesdames et messieurs,

Permettez-moi de vous dire tout d'abord tout le plaisir que j'éprouve à me trouver ici aujourd'hui. J'ai eu l'occasion ce matin, à la cérémonie inaugurale, de rappeler l'étroite coopération que mon Office est heureux d'entretenir avec la Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge, du Croissant-Rouge et du Lion-et-Soleil-Rouge en ce qui concerne les programmes d'aide aux réfugiés. Je voudrais, maintenant vous donner une idée de l'état actuel des problèmes qui se posent présentement à mon Office - tels que je les vois - partager avec vous - si vous le voulez bien - les préoccupations qu'ils m'inspirent, et vous parler de nos plans et de nos espoirs pour l'avenir.

La collaboration établie par le passé entre mon Office et la Ligue est de telle nature que, je n'hésite par à le dire, cas espoirs impliquent un voeu : celui de voir nos deux organisations continuer à travailler ensemble, comme elles l'ont fait depuis 1956, au moment où un soudain afflux de réfugiés en Europe a appelé le HCNUR à coordonner les activité des Gouvernements et des organisations privées. C'est en témoignage de reconnaissance pour les immenses efforts qu'elle a déployés dans cette action - probablement la plus vaste opération de secours d'urgence qui ait jamais été mise en oeuvre par une institution privée - qu'en 1956 la Ligue s'est vue décerner la Médaille Nansen. Il n'est nul besoin par ailleurs, de rappeler les excellents résultats que nous avons pu obtenir ensemble en Afrique du Nord. L'opération conjointe que nous avons menée pendant plus de quatre ans, qui s'est terminé par le rapatriement et la réinstallation de plus de 180.000 réfugiés algériens ayant cherché asile au Maroc et en Tunisie, est toujours présente à notre esprit. C'est l'une des réalisations dont nous pouvons être fiers.

Depuis lors, nous avons travaillé ensemble en faveur des réfugiés du Rwanda qui avaient fui dans la province du Kivu, au Congo, ainsi qu'au Burundi. Dans ce dernier pays, les projets-pilotes de réinstallation mis sur pied par la Ligue ont conduit à une opération conjointe de mon Office et du Bureau international du Travail, qui, à son tour, sera englobée, je l'espère, dans un plan du Gouvernement du Burundi pour le développement de l'ensemble de la région nord-est. Au Sénégal, la Ligue, secondée par la Croix-Rouge sénégalaise et aidée par d'autres Sociétés de la Croix-Rouge a mis en oeuvre, en 1966, un programme médical et sanitaire en faveur des réfugiés se trouvant dans la province de Casamance. Ce programme se poursuit actuellement sous les auspices ils se trouvent généralement dans un dénuement total. Ils ont en conséquence besoin d'une aide immédiate - vivres, vêtements, soins médicaux et abris. Il nous faut toutefois comprendre que, dans les pays africains, des secours de ce genre ne résoudront en définitive aucun problème. S'ils ne s'accompagnent pas d'une action efficace en vue de l'intégration des réfugiés sur le plan local, ils ne conduiront qu'à une opération sans fin ou bien à des interventions d'urgence constamment renouvelées. Dans les pays en voie de développement, un des problèmes les plus graves qui se posent aux gouvernement est le fait que leur infrastructure administrative et sociale n'est en général pas assez solide pour leur permettre d'intégrer rapidement et sans heurts des réfugiés dans l'économie locale, compte tenu tout spécialement des ressources limitées dont ils disposent. Si un programme de fourniture de vivres aux réfugiés devait se poursuivre indéfiniment, cela pourrait donner lieu à de graves difficultés avec la population locale, ainsi, dans les régions où des terres sont disponibles - et cela est très important - la seule solution pratique est d'aider les réfugiés à s'installer sur les parcelles qui leur sont offertes et à devenir le plus rapidement possible économiquement indépendants.

En conséquence, le concept même d'une situation d'urgence critère si important pour la Ligue, doit, en Afrique et en Asie, tenir compte avec réalisme des conditions qui règnent sur le plan local, là-bas, en l'absence d'une action constructive destinée à les réinstaller, les réfugiés resteraient en grand nombre éternellement dépendants d'une aide internationale et constitueraient en même temps, une source de troubles graves dans des régions où la paix la stabilité politique sont souvent si fragiles.

L'expérience a confirmé que c'est réellement la seule façon possible de traiter les problèmes que posent les réfugiés en Afrique. Qu'est-ce que cela signifie en pratique ? A une époque où la question des réfugiés prend de jour en jour une plus grande extension et où de nouveaux exodes se produisent fréquemment, cela signifie que la communauté internationale doit être prête à agir avec toute la rapidité nécessaire chaque fois que son intervention s'avère indispensable. Cela n'est possible que s'il existe une organisation dûment équipée pour fournir non seulement des vivres, des vêtement, des abris et des soins médicaux, mais aussi des semences, des outils, des véhicules ainsi que toute autre assistance nécessaire dans le cadre de plans devant être établis d'une façon appropriée en vue de la réinstallation des réfugiés.

Déjà l'expérience a prouvé à maintes reprises que le succès vient couronner les efforts lorsqu'il est possible d'entreprendre une action rapide et bien adaptée. Par ailleurs, des difficultés s'élèvent lorsque l'insuffisance des moyens provoque des retards, une direction inadéquate et finalement des souffrances humaines. Les moyens dont je parle comprennent à la fois de l'argent, des approvisionnements en nature et des hommes qualifiés capables de diriger l'action ou d'assumer le rôle de chefs de n'importe laquelle des équipes qui pourraient être mises sur pied. Une distinction s'impose, à mon avis, dans ce domaine.

En fait, il a toujours été possible de réunir les fonds et les marchandises indispensables, parfois, il est vrai, au pris d'efforts considérable. La Ligue elle-même se trouve souvent en mesure de fournir une partie des vivres, des médicaments ou de l'équipement nécessaire, et nous pouvons aider à les obtenir d'autre organisations telles que le Programme alimentaire actuel. A une époque où la pensée et les efforts tendent à une utilisation complète et rationnelle des ressources humaines, c'est certainement une contribution précieuse que de permettre à des milliers de réfugiés de travailler et de jouer leur rôle dans le développement et l'exploitation des richesses naturelles encore inutilisées de leurs pays d'asile.

Monsieur le Président, je suis profondément reconnaissant à la Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge de tout ce qu'elle a fait jusqu'à présent dans des situations d'urgence causées par la soudaine affluence de réfugiés, qu'elle ait agi de sa propre initiative ou que son action ait été entreprise en accord et en coopération avec mon Office. Je voudrais également exprimer, à l'avance, ma gratitude pour le travail que la Ligue sera appelée à accomplir à l'avenir pour venir en aide à des réfugiés. En ce qui concerne mon Office, nous serons heureux de toute occasion ce coopérer avec la Ligue, car nous estimons qu'une collaboration de cette nature, active et étroite, entre nos deux organisations, est le chemin le plus direct qui conduit au but vers lequel tendent tous nos efforts.