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CONFERENCE DE PLENIPOTENTIAIRES SUR LE STATUT DES REFUGIES ET DES APATRIDES, COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA VINGT-CINQUIEME SEANCE

CONFERENCE DE PLENIPOTENTIAIRES SUR LE STATUT DES REFUGIES ET DES APATRIDES, COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA VINGT-CINQUIEME SEANCE
A/CONF.2/SR.25

27 Novembre 1951
Présents :
Président :M. LARSEN
Membres :
AustralieM. SHAW
AutricheM. FRITZER
BelgiqueM. HERMENT
CanadaM. CHANCE
DanemarkM. HOEG
EgypteM. MAHER
Etats-Unis d'AmériqueM. WARREN
FranceM. ROCHEFORT
GrèceM. PHILON
IrakM. AL PACHACHI
IsraëlM. ROBINSON
ItalieM. del DRAGO
LuxembourgM. STURM
MonacoM. SOLAMITO
NorvègeM. ARFF
Pays-BasM. van BOETZELAER
République fédérale allemandeM. von TRÜTZSCHLER
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du NordM. HOARE
Saint-SiègeMgr. BERNARDINI, Archevêque d'Antioche
SuèdeM. PERSSON
Suisse (et Liechtenstein)M. SCHURCH
TurquieM. MIRAS
YougoslavieM. MAKIEDO
M. BOZOVIC
Observateur :
IranM. KAFAI
Haut-Commissaire pour les réfugiésM. van HEUVEN GOEDHART
Représentants d'institutions spécialisées et d'autres organisations intergouvernementales :
Organisation internationale pour les réfugiésM. SCHNITZER
Représentants d'organisations non gouvernementales :
Catégorie A
Confédération internationale des syndicats libresMlle SENDER
Catégorie B et registre
Caritas InternationalisM. BRAUN
M. METTERNICH
Comité des Eglises pour les affaires internationalesM. REES
Comité de coordination d'organisations juivesM. WARBURG
Conférence permanente des agences bénévolesM. REES
Congrès juif mondialM. RIEGNER
Conseil consultatif d'organisations juivesM. MEYROWITZ
Ligue des sociétés de la Croix-RougeM. LEDERMANN
Union catholique internationale de service socialMlle de ROMER
Union internationale des ligues féminines catholiquesMlle de ROMER
Secrétariat :
M. HumphreySecrétaire exécutif
Mlle KitchenSecrétaire exécutive adjointe

1. EXAMEN DU PROJET DE CONVENTION RELATIVE AU STATUT DES REFUGIES (point 5 a) de l'ordre du jour) (A/CONF.2/1, A/CONF.2/5 et Corr.1) (suite)

i) Article 7 - Statut personnel (A/CONF.2/31, A/CONF.2/36) (reprise de la discussion)

Le PRESIDENT rappelant que le texte français de l'amendement à l'article 3 (B) soumis conjointement par les délégations d'Israël et du Royaume-Uni n'est pas encore prêt, propose que la conférence reprenne l'examen de l'article 7, relatif au Statut personnel, dont le paragraphe 1 a déjà été adopté.

Il en est ainsi décidé.

Le PRESIDENT appelle l'attention des membres de la Conférence sur les amendements de la Yougoslavie et du Royaume-Uni au paragraphe 2 de l'article 7 (qui portent respectivement les cotes A/CONF.2/31 et A/CONF.2/36).

M. HOARE (Royaume-Uni) rappelle les observations qu'il a formulées en présentant l'amendement de sa délégation.1 Il souligne que cet amendement comporte deux éléments : il s'agit d'abord de remplacer les mots « du pays du domicile, ou si le réfugié n'a pas de domicile, par la législation du pays de résidence », qui figurent dans le texte originale, par les mots « dudit Etat ». Il s'agit ensuite d'ajouter la réserve « étant entendu, toutefois, que les droits en cause doivent être de ceux qui auraient été reconnus par la législation dudit Etat si l'intéressé n'était devenu un réfugié ».

Etant donné qu'il s'agit là de deux questions différentes, il serait souhaitable d'examiner séparément les deux éléments de l'amendement.

M. MAHER (Egypte) doute qu'il soit possible de résoudre la question des droits précédemment acquis par un réfugié du fait de son mariage, alors que le droit international privé n'a pas encore réussi à résoudre le problème du lien personnel entre mari et femme.

M. ROCHEFORT (France) voudrait obtenir des précisions sur la situation d'un réfugié divorcé qui aurait obtenu son divorce dans un pays où la législation reconnaît le divorce et se trouverait résider dans un pays, comme l'Italie, par exemple, où le divorce n'est pas admis. Il pense que, dans ce cas, le droit au divorce acquis par le réfugié ne serait pas reconnu par le pays d'accueil.

M. HOARE (Royaume-Uni) ne se sent pas particulièrement qualifié pour répondre à la question du représentant de la France. A son avis, cette question se rattache à la première partie du paragraphe 2 de l'article 7 qui prescrit que les droits en question seront respectés par un Etat contractant. Il faudra réfléchir ce que signifie exactement cette prescription afin d'en déterminer la portée. La seconde paragraphe 2 impose simplement l'accomplissement de certaines formalités et, de l'avis de la délégation du Royaume-Uni, il faut entendre par là les formalités prescrites dans l'Etat où ces droits doivent s'exercer.

M. ROCHEFORT (France) précise que l'interprétation donnée par le représentant du Royaume-Uni correspond à la façon dont il avait personnellement compris le texte. Cependant, il tient à faire observer que, dans le cas qu'il a déjà cité, le réfugié pourrait éprouver quelque difficulté à obtenir, par exemple, un certificat de divorce - pièce dont il pourrait avoir besoin - si la législation du pays où il réside ne reconnaît pas le divorce.

M. HOARE (Royaume-Uni) convient que, si un pays ne reconnaît pas le divorce, il ne peut évidemment pas délivrer un certificat de divorce. On aboutit donc directement au second élément de son amendement où se trouve formulée la réserve que les droits en cause seront de ceux qui auraient été reconnus par la législation dudit Etat si l'intéressé n'était devenu un réfugié.

M. HERMENT (Belgique) constate qu'en principe un Etat n'interdit le divorce qu'à ses propres ressortissants ; c'est uniquement pour des raisons d'ordre public qu'un Etat peut être amené à ne pas reconnaître des divorces entre étrangers ou à ne pas autoriser des étrangers à divorcer sur son territoire. Comme l'a indiqué le représentant du Royaume-Uni, la question d'un divorce obtenu devant des autorités étrangères à celles du pays de résidence relève de la jurisprudence des Etats. Le but de l'amendement du Royaume-Uni est d'assimiler les réfugiés aux étrangers en matière de droits découlant du statut personnel. Ainsi, dans le cas cité par le représentant de la France, les tribunaux du pays d'accueil auront à décider s'ils auraient reconnu un divorce prononcé, dans les mêmes circonstances, entre deux étrangers qui ne seraient pas des réfugiés.

M. ROCHEFORT (France) accepte l'interprétation donnée par le représentant de la Belgique. Il précise que le but de la question qu'il a posée était précisément de déterminer si la rédaction proposée par le Royaume-Uni n'allait pas à l'encontre d'une telle interprétation.

M. BOZOVIC (Yougoslavie) rappelle les explications données par sa délégation2 sur l'idée dont s'inspire l'amendement au paragraphe 2 de l'article 7 qu'elle a présenté (A/CONF.2/31). En raison des objections qui ont été soulevées en particulier des observations présentées par le représentant de la Belgique à la septième séance, il retirera l'amendement. Mais il estime qu'une solution satisfaisante aurait pu être trouvée et que les observations du représentant de la Belgique n'ont pas été absolument pertinentes, étant donné que la proposition yougoslave ne visait que des obligations existant antérieurement à la date à laquelle l'intéressé est devenu un réfugié.

M. ROCHEFORT (France) comprend les préoccupations dont s'inspire l'amendement yougoslave et, pour y répondre il suggère d'ajouter au paragraphe 2 la disposition suivante :

« Le réfugié sera tenu de respecter les obligations contractées en vertu de son statut personnel dans la mesure où sa qualité de réfugié n'y fait pas obstacle ».

Pour illustrer les conséquences qu'entraînerait sur le plan pratique une disposition de cet ordre, M. Rochefort cite le cas d'un réfugié ayant des obligations alimentaires vis-à-vis d'un parent. Si le parent et le réfugié ont tous deux trouvé asile dans le même pays d'accueil, il est normal que le réfugié satisfasse aux obligations qui lui incombent. Si le bénéficiaire est demeuré dans le pays d'origine, il peut être difficile au réfugié, du fait même de sa qualité de réfugié, de faire face à ses obligations.

M. HERMENT (Belgique) éprouve la plus grande sympathie pour les motifs dont s'inspire l'attitude des délégations française et yougoslave. Il fait, toutefois, remarquer qu'il peut être difficile d'exécuter cette disposition dans la pratique. Il s'agit en effet d'une obligation civile, dont l'exécution, le cas échéant, doit être assurée par une décision judiciaire.

M. ROCHEFORT (France) pense que les tribunaux saisis d'une affaire analogue à celle qu'il a envisagée pourront statuer, en se fondant sur le texte proposé par la France, que le réfugié soit ou non en mesure de satisfaire à ses obligations .

M. HERMENT (Belgique) doute que l'autorité judiciaire saisie d'une telle affaire se prononce en se fondant sur la Convention A son avis, la décision sera prise sur la base d'éléments extérieurs à la Convention. En outre, s'il s'agit d'une obligation ayant pour origine une décision rendue dans un pays autre que le pays d'accueil, elle ne pourra faire l'objet d'une exécution forcée que si elle est revêtue d'un exequatur, et la question préalable se posera de savoir s'il existe, ou non, entre le pays d'accueil et le pays d'origine, une convention en matière d'exécution de jugements.

M. ROCHEFORT (France) rappelle que le cas mentionné par lui est celui où le réfugié et le bénéficiaire d'une obligation du réfugié résident tous deux dans le pays d'accueil. Dans ce cas, un exequatur ne sera pas indispensable. D'autre part, l'article 7 de la Convention ne peut être ignoré par les tribunaux. En France, par exemple, la loi internationale prime la loi nationale et l'article 7 deviendra donc l'un des éléments du statut des réfugiés.

M. HOARE (Royaume-Uni) tout en comprenant fort bien l'intention de la délégation yougoslave, n'est pas en mesure d'appuyer l'amendement qu'elle a proposé.

Il fait sienne l'opinion du représentant de la Belgique, selon laquelle s'il s'agit simplement de l'obligation morale, de la part du réfugié, de venir en aide à des membres de sa famille se trouvant dans un autre pays, les autorités du pays où réside le réfugié ne sauraient l'obliger à remplir une talle obligation, qu'il existe ou non une convention. De plus, l'exécution dans un pays de jugements prononcés dans un autre dépend de la législation du premier pays ou de traités relatifs à ces questions. Les Nations Unies examinent un projet de convention multilatérale visant précisément les cas envisagés par le représentant de la Yougoslavie ; il est donc trop tôt pour que la Conférence essaie de traiter cette question. On peut s'en remettre à la législation nationale pour ce qui est des obligations incombant aux réfugiés à l'égard de membres de leur famille, lorsque les uns et les autres résident dans le même pays d'accueil. Enfin, comme l'article 7 a un caractère extrêmement juridique et technique, on ne réussirait qu'à compliquer la question en cherchant à y introduire une disposition affirmant l'obligation morale pour les réfugiés de venir en aide aux personnes à leur charge qui se trouvent dans d'autres pays.

M. ROCHEFORT (France) rappelle que la rédaction qu'il avait suggérée n'avait d'autre but que de répondre aux préoccupations de la délégation yougoslave. Il n'insistera pas sur cette proposition, qui n'avait, d'ailleurs, aucun caractère formel, en soulignant, toutefois, qu'il agissait d'une proposition conçue dans un esprit libéral, donnant au réfugié la possibilité de se dispenser des obligations découlant de son statut personnel, toutes les fois que sa qualité de réfugié ne lui permet pas d'y faire face.

M. HERMENT (Belgique) estime qu'il serait regrettable d'insérer dans la Convention une telle clause de dispense. En outre, il lui semble peu indiqué d'introduire, dans un article qui vise le statut personnel des réfugiés, une clause relative aux droits civils.

M. ROCHEFORT (France) rappelle qu'il n'insiste pas sur le texte qu'il avait proposé, en constatant, cependant, qu'il aurait été équitable de prévoir le cas où un réfugié ne pourrait faire face aux obligations qui lui incombent, pour la raison même qu'il est réfugié.

M. ROBINSON (Israël) déclare que si le paragraphe 2 est pas modifié et s'il n'y a pas de dispositions en faveur des réfugiés, un juge statuera conformément à la législation du territoire, telle qu'elle s'applique aux étrangers. Les préoccupations manifestées par la délégation de la Yougoslavie lui semblent quelque peu injustifiées ; point n'est besoin, en effet, de redouter qu'on abuse du statut de réfugié. L'absence de dispositions précises, du genre de celle que propose la délégation de la Yougoslavie, ne signifie pas que le réfugié sera dispensé de ses obligations, puisqu'il continuera d'être soumis a la législation du pays d'accueil, telle qu'elle s'applique aux nationaux, aux étrangers et aux réfugiés. Ainsi que l'a souligné le représentant de la France, le transfert de fonds d'un pays à l'autre pose également une question de droit public. Mieux vaudrait donc limiter la portée de l'article 7 au statut personnel du réfugié.

M. BOZOVIC (Yougoslavie) déclare que le gouvernement yougoslave n'ignore nullement les obligations qui incomberont aux gouvernements si l'amendement de sa délégation est adopté ; c'est seulement parce qu'aucune disposition de cette nature n'a été formulée que cette proposition a été présentée. Pour la délégation yougoslave, il s'agit là d'un problème humanitaire ; mais étant donné les difficultés apparemment suscitées par cet amendement, il est disposé à le retirer, comme il l'a déjà dit, tout en estimant qu'il aurait été possible de trouver un moyen de tourner ces difficultés.

Le PRESIDENT prononce la clôture du débat et met aux voix la première partie de l'amendement britannique tendant à remplacer par les mots « dudit Etat » les mots « du pays du domicile ou si le réfugié n'a pas de domicile, par la législation du pays de résidence », au paragraphe 2 de l'article 7.

Par 18 voix contre zéro, avec 3 abstentions, la première partie de l'amendement du Royaume-Uni est adoptée.

Le PRESIDENT met aux voix la deuxième partie de l'amendement du Royaume-Uni tendant à ajouter, au paragraphe 2, les mots « étant entendu, toutefois, que les droits en cause doivent être de ceux qui auraient été reconnus par la législation dudit Etat si l'intéressé n'était devenu un réfugié ».

Par 18 voix contre zéro, avec 3 abstentions, la deuxième partie d l'amendement du Royaume-Uni adoptée.

Le PRESIDENT met aux voix le paragraphe 2 ainsi amendé.

Par 18 voix contre zéro, avec 2 abstentions, le paragraphe 2 de l'article 7, ainsi amendé, est adopté.

Le PRESIDENT met aux voix l'ensemble de l'article 7 ainsi amendé.

Par 20 voix contre zéro avec une abstention, l'ensemble de l'article 7, ainsi amendé, est adopté.

M. del DRAGO (Italie) déclare que la délégation italienne a voté pour l'article 7, étant entendu qu'elle pourra éventuellement formuler des réserves après avoir consulté le Gouvernement italien.

ii) Article 14 - Professions libérales (reprise de la discussion de la neuvième séance)

Le PRESIDENT rappelle que le vote sur l'article 14 a été ajourné en attendant, que soient examinées certaines modifications à apporter à la formule « dans leurs colonies ou protectorats et dans les tertiaires sous leur tutelle » au paragraphe 2 de l'article 14.

M. ROCHEFORT (France) ne tient pas à déposer d'amendement formel dans ce domaine. Il lui semble, toutefois, que la formule employée à diverses reprises dans des cas analogues était :

« Les territoires dont ils assument la responsabilité des relations internationales ».

Selon le PRESIDENT, le paragraphe 2 de l'article 14 ayant déjà été adopté, quant au fond, les modifications de rédaction dont il s'agit pourraient être laissées au Comité du style.

Il en est ainsi décidé.

iii) Article 30 - Coopération des autorités nationales avec les Nations Unies (A/CONF.2/31 A/CONF.2/71)

Le PRESIDENT invite la conférence à aborder l'examen de l'article 30, qui traite de la coopération des autorités nationales avec les Nations Unies ; il appelle l'attention des représentants sur les amendements proposés respectivement par la délégation de l'Australie et par la délégation de la Yougoslavie (documents portant respectivement les cotes A/CONF.2/71 et A/CONF.2/31).

M. MAKIEDO (Yougoslavie) présente son amendement ; il déclare que son gouvernement, s'il n'est pas membre de l'Organisation internationale pour les réfugiés (OIR) n'en a pas moins coopéré étroitement avec cette organisation, qu'il a favorisé la création du Haut-Commissariat pour les réfugiés et que son intention est de coopérer sincèrement avec le Haut-Commissaire. Le Gouvernement yougoslave se demande, toutefois, s'il convient d'imposer aux Etats contractants l'obligation de coopérer avec une institution des Nations Unies encore inconnue qui pourrait être créée dans l'avenir. C'est seulement lorsque l'on qui saura à quoi s'en tenir sur une telle organisation qu'il sera possible de prendre une décision de cet ordre. Il est un peu prématuré, en outre, d'envisager actuellement quelle sera la situation au moment où prendront fin les activités du Haut-Commissaire.

M. SHAW (Australie) croit que l'amendement de sa délégation se passe d'explications. Bien des gouvernements partagent les préoccupations du Gouvernement australien devant le fardeau sans cesse plus lourd que leur impose la fourniture de documents demandés par un grand nombre d'organisations internationales. Pour assuré qu'il soit que le Haut-Commissaire ne formulera pas de demandes inutiles, il y aurait lieu, selon lui, d'imposer formellement certaines limites ; d'où sa suggestion tendant à ajouter le mot « nécessaires » après les mots « données statistiques » à la quatrième ligne du paragraphe 2.

M. HERMENT (Belgique) attire l'attention de la Conférence sur la divergence qui existe entre les versions française et anglaise du paragraphe 2 de l'article 30. En effet, le texte français comporte les mots « toute autre institution ... qui lui succédera » ; or, les trois derniers mots ne figurent pas dans la version anglaise. Cette différence de rédaction confère à chacune des deux versions un sens différent. En effet, dans le texte anglais, les Etats contractants sont invités à fournir les renseignements dont il s'agit à toute institution appropriée, même celles qui existent à l'heure actuelle, alors que le texte français ne vise qu'une seule organisation, le Haut-Commissariat ou tout organisme qui pourrait lui succéder.

Le PRESIDENT croit que c'est probablement à un oubli, lors de la traduction, que sont dus les mots « qui lui succédera », qui figurent dans le texte français. Le texte anglais original, présenté par le Secrétaire général, contenait ce membre de phrase, mais le comité spécial ne l'a pas retenu lors de sa première session.

M. ROBINSON (Israël) se demande si la délégation yougoslave apprécie toute la portée de l'amendement à l'article 30 qu'elle a présenté. La Convention demeurera an vigueur aussi longtemps que deux Etats contractants y adhéreront et il est peu probable qu'une nouvelle convention sur le statut des réfugiés soit conclue au cours des dix prochaines années. Le Haut-Commissariat a été créé pour une période de trois ans ; si un autre organisme des Nations Unies doit le remplacer, il faudra convoyer, à cette lin, une nouvelle conférence de plénipotentiaires, dans le cas où l'amendement yougoslave serait adopté.

Quant à l'amendement de l'Australie, la question se pose de savoir qui décidera des renseignements qui seront « nécessaires ». Si c'est le Haut-Commissaire, l'addition du mot « nécessaires » ne sera d'aucune aide aux gouvernements. D'autre part, l'addition de ce mot risque même de susciter des controverses. Les rubriques a), b) et c) du paragraphe 2 déterminent exactement quels sont les renseignements qui pourront être demandés ; si les renseignements demandés par le Haut-Commissaire ne rentrent pas dans l'une de ces rubriques, les gouvernements pourront les considérer comme inutiles.

M. ROCHEFORT (France) comprend le souci qui dicte l'amendement de la Yougoslavie, mais n'estime pas que ce texte soit indispensable. En effet, le libellé actuel de l'article 30 a été conçu de façon à tenir compte du caractère provisoire du Haut-Commissariat. Si un Etat contractant ne s'estimait pas satisfait de l'organe qui serait créé pour succéder au Haut-Commissariat, il pourrait être amené à dénoncer la Convention : la délégation française tient à attirer l'attention de la Conférence sur le fait que l'article 30 constitue une innovation par rapport aux dispositions des précédentes conventions et notamment de la Convention de 1933, qui a fonctionné sans qu'un représentant d'une organisation internationale veille à son application et sans qu'on puisse dire, pour autant, qu'elle n'ait pas donné de bons résultats. La délégation française n'a pas présenté d'amendement à l'article 30 mais elle pense que cet article doit être réglé dans le cadre de l'article qui vise les réserves (article 36) ; le Gouvernement français estime, en effet, que l'article 30 est l'un de ceux pour lesquels il peut être nécessaire de formuler une réserve.

M. del DRAGO (Italie) déclare que l'Italie n'est pas membre des Nations Unies, mais que le Gouvernement italien, appuie en principe l'article 30, sous réserve de la conclusion d'un accord direct entre l'Italie et le Haut-Commissaire pour les réfugiés.

M. SHAW (Australie) croit que l'on pourrait également donner satisfaction à sa délégation en supprimant le mot « any » à la quatrième ligne du paragraphe 2 dans le texte anglais, c'est-à-dire en revenant au texte élaboré par le Comité spécial à sa deuxième session. Le maintien du mot « any » même avec les trois rubriques pour lesquelles des renseignements pourraient être demandés, risque d'embarrasser les Etats contractants.

La délégation australienne voudrait également savoir comment sera assurée la surveillance de l'application des dispositions de la Convention, dont il est fait mention au paragraphe 1. Veut-on que les réfugiés en appellent au Haut-Commissaire d'infractions alléguées à la Convention, et que celui-ci examine ces appels ?

M. MAKIEDO (Yougoslavie) retire son amendement (A/CONF.2/31) à la suite des observations auxquelles il a donné lieu.

M. HERMENT (Belgique) ne pense pas qu'il soit indispensable de formuler un amendement à propos du point de rédaction qu'il a soulevé antérieurement ; il demande si les représentants de langue anglaise seraient disposés à accepter que les mots « qui lui succédera » figurant dans la version française du paragraphe 2 de l'article 30, soient rétablis dans la version anglaise.

M. ROCHEFORT (France) préfère l'expression « qui lui succéderait », formule, à son avis, plus prudente.

M. HERMENT (Belgique) accepte cette modification.

Le PRESIDENT demande si l'insertion des mots « qui lui succéderait » est approuvée par tous les représentants de langue anglaise.

M. HOARE (Royaume-Uni) n'a pas d'objections à première vue ; mais il se trouve un peu gêné, puisqu'il ignore pourquoi cette expression a été constamment omise dans le texte anglais.

Le PRESIDENT explique que l'article 22 du projet de convention élaboré par le Secrétaire général dispose que les Etats contractants doivent faciliter la tâche du Haut-Commissaire et que l'article suivant prévoit la liaison entre les autorités nationales et le Haut-Commissaire. Au Comité spécial, la délégation danoise, estimant que la Convention survivrait probablement au Haut-Commissariat, avait proposé que l'on se référât, d'une façon générale, aux institutions des Nations Unies, le Haut-Commissariat étant cité à titre d'exemple. Cette proposition a été adoptée par le Comité spécial, et l'idée a été incorporée au texte dont la Conférence est actuellement saisie. Les discussions n'ont porté que sur le texte anglais, et il semble que l'expression « qui lui succédera » n'aurait pas dû subsister dans la version française. Il n'y a, bien entendu, aucune raison qui puisse empêcher la Conférence de voter sur le fond de la question.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) fait remarquer que, si l'expression dont il s'agit est rétablie au paragraphe 2, elle devrait l'être également au paragraphe 1.

M. HERMENT (Belgique) fait observer que le paragraphe 1 précise qu'il s'agit d'une organisation chargée par les Nations Unies de la protection internationale des réfugiés. La délégation belge accepte ce paragraphe ; par contre, elle ne saurait admettre l'expression vague « toute institution » qui figure au paragraphe 2, dans le texte français.

M. HOARE (Royaume-Uni) propose que les mots « ou à toute autre institution appropriée » du paragraphe 2 soient remplacés par les mots « ou à toute autre institution analogue », le lien entre les deux paragraphes devenant ainsi parfaitement claire.

M. MAHER (Egypte) demande si le rétablissement des mots « qui lui succédera » implique que les Etats contractants pourront refuser leur coopération aux organisations existantes.

Le PRESIDENT répond qu'il lui impossible de faire aucune déclaration sur l'attitude que pourraient adopter les Etats contractants. Il ne saurait, en tant que Président, fournir une interprétation quelconque sur ce point.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) estime qu'il y aura désaccord entre le paragraphe 1 et le paragraphe 2 si celui-ci est amendé ainsi que l'a proposé le représentant du Royaume-Uni, et s'il est fait mention d'un organisme destiné à succéder éventuellement au Haut-Commissariat. La rédaction actuelle du texte laisse, du moins, la possibilité théorique de voir une autre institution des Nations Unies, en dehors du Haut-Commissariat, bénéficier de la collaboration des Etats contractants. Si l'amendement du Royaume-Uni était adopté, on pourrait en conclure que, pendant toute la durée du Haut-Commissariat, celui-ci serait la seule institution avec laquelle les Etats contractants seraient obligés de coopérer.

Le PRESIDENT déclare que la Conférence doit décider entre trois possibilités : tout d'abord celle d'une coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ; en second lieu, celle d'une coopération avec l'institution qui lui succéderait éventuellement ; et en troisième lieu, la possibilité d'une coopération avec d'autres institutions qui, en vertu d'accords ou d'arrangements différents, pourraient être habilitées à contrôler l'application de la Convention actuelle.

M. Al PACHACHI (Irak) souligne que le paragraphe 1 est tout à fait clair. A son avis, l'expression « toute autre institution appropriée » qui figure au paragraphe 2, se réfère au genre d'institutions mentionnées au paragraphe 1. Il lui semble donc judicieux de se prononcer tout d'abord sur le paragraphe 1, et de remplacer au paragraphe 2 les mots qu'il vient de citer par les mots « toute institution du genre ci-dessus mentionné ».

M. ROCHEFORT (France) voudrait obtenir des précisions sur les relatons existant entre le paragraphe 1 de l'article 30 et la section C de l'article premier. Il existe une contradiction entre ces deux dispositions, étant donné que la section C exclut du bénéfice de la Convention les personnes bénéficiant de la protection et de l'assistance d'autres organes et institutions des Nations Unies, alors que le paragraphe 1 de l'article 30 appelle les Etats contractants à coopérer avec ces mêmes institutions.

Le PRESIDENT estime qu'il est difficile actuellement de lier les dispositions de l'article 30 à la section C de l'article premier, car cette dernière n'a lieu encore à aucun vote.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) demande encore instamment que la référence à un autre organisme, qui figure dans le paragraphe 1, soit nuancée par l'expression : « qui lui succéderait ». Chacun sait ce qu'est le Haut Commissariat ; mais nul ne peut prévoir la nature des futures institutions ni leurs attributions.

M. MAHER (Egypte) présume que s'il était adopté cet amendement équivaudrait à nier toute coopération entre les Etats contractants et les institutions présentes ou à venir, créées par les Nations Unies, le Haut-Commissariat faisant exception :

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) objecte qu'à son avis une telle interprétation de cet amendement est inexacte.

M. ROCHEFORT (France) précise que les Etats qui ne sont pas représentés à la Conférence ont parfaitement le droit de refuser la coopération visée au paragraphe 1, au même titre que les Etats qui ne sont pas représentés à cette Conférence ; et cela d'autant plus qu'il s'agit de la coopération avec des institutions qui ne sont pas encore créées. Il signale, par ailleurs, que le paragraphe 1 ne constitue en fait qu'une recommandation.

M. HERMENT (Belgique) est d'avis que la question posée à la Conférence est de savoir si l'on doit imposer aux Etats l'obligation de satisfaire aux demandes émanant non seulement du Haut-Commissariat, mais encore d'autres institutions appropriées. Le Gouvernement belge, pour sa part, reconnaît qu'il existe un organisme qualifié pour demander les renseignements visés au paragraphe 2 ; c'est le Haut-Commissariat pour les réfugiés. Le texte français reproduit ce point de vue, alors que le texte anglais peut donner lieu à une autre interprétation.

M. ROCHEFORT (France) juge que le paragraphe 1 compote, pour les Etats contractants, un engagement de coopérer avec, par exemple, l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche Orient (UNRWAPRNE) lesquels, aux termes de la section C de l'article premier, sont exclus du bénéfice de la Convention. La délégation française, dont le gouvernement est membre de l'Office en question ne comprend pas pourquoi, aux termes de l'article 30, les Etats contractants doivent s'engager à coopérer avec les institutions s'occupant de réfugiés auxquels la Convention ne sera pas applicable. Les engagements contractés en cette matière par les Etats doivent être précisés.

M. HOARE (Royaume-Uni) rappelle que la section C de l'article premier, si elle n'est pas amendée par la Conférence, exclut les réfugiés arabes de Palestine de la définition du terme « réfugié ». Par suite, l'institution chargée de la protection de ce groupe n'est pas comprise dans l'article 30. L'orateur estime que la solution la plus simple consisterait à rétablir dans le texte anglais les mots « qui lui succéderait ».

Le PRESIDENT prenant la parole en tant que représentant du Danemark, fait observer qu'un organisme s'occupant des réfugiés de Palestine ne songera guère, en pratique, à solliciter la collaboration du gouvernement danois. Si une telle situation se présentait cependant, le Président ne saurait imaginer que le gouvernement danois puisse refuser sa collaboration, ne serait-ce que pour des raisons de courtoisie internationale.

M. MAHER (Egypte) demande si telle est effectivement l'opinion générale de la Conférence.

Le PRESIDENT répond qu'il ne peut imposer une interprétation quelconque à la Conférence ; il se bornera à rappeler qu'il existe trois possibilités différentes. La question est de savoir si la Conférence doit imposer aux gouvernements l'obligation de coopérer avec toute institution chargée de la protection internationale des réfugiés, autre que le Haut-Commissariat.

M. ROCHEFORT (France) fait valoir que, sans entamer pour autant la discussion de la section C de l'article premier, il n'est guère possible à la Conférence d'en ignorer l'existence. La formule proposée par le Président, parlant en tant que représentant du Danemark, lui paraît excellente. Cependant, si le gouvernement du Danemark est en mesure de s'engager vis-à-vis de l'institution X, sans savoir quel sera cet X, le gouvernement français, pour sa part, a trop le souci de la clarté et le désir de ne pas confondre deux problèmes distincts pour adopter la même attitude. La délégation française regrette que certaines des questions posées en cours de séance par diverses délégations, et notamment celle de l'Australie, soient demeurées sans réponse. Elle regrette aussi que certains pays de l'Amérique latine, qu'intéresse ce problème, ne soient pas représentés à la séance.

M. Rochefort considère que, s'il est bon de ne pas créer la confusion parmi des problèmes distincts, il n'en existe pas moins des cas où l'in ne peut examiner un article en faisant abstraction de ceux qui le précèdent et de ceux qui le suivent. L'article 30 est suivi à courte distance par l'article prévoyant des réserves éventuelles. La délégation française, pour sa part, ne saurait se prononcer sur l'article 30 sans savoir s'il lui sera possible par le jeu de l'article 36 de formuler des réserves à son sujet. Elle a entendu avec un certain étonnement les déclarations de diverses délégations qui, tout en acceptant l'amendement proposé par le représentant du Saint-Siège au paragraphe 2 de la section A de l'article premier, se sont réservé le droit de revenir sur leur décision si les articles ultérieurs de la Convention leur paraissaient nécessiter des modifications à l'article premier. La délégation française désirerait savoir si, de l'avis des délégations qui ont pris cette position qu'elle a elle-même quelque difficulté à comprendre, la possibilité de formuler une réserve sur l'article 30 est compatible avec l'accord exprimé par ces délégations en ce qui concerne le texte suggéré par le représentant du Saint-Siège.

M. WARREN (Etats-Unis d'Amérique) estime que, quoi que puissent faire les gouvernements au sujet de la coopération avec d'autres institutions, il devra être nettement établi que la surveillance de l'application de la Convention actuelle doit incomber au Haut-Commissariat des Nations Unies ou à l'institution qui lui succéderait. Si la Conférence admet le principe d'une coopération avec d'autres institutions, des doutes s'élèveront fatalement quant au nombre d'institutions qualifiées pour surveiller l'exécution de la Convention. M. Warren pense que le texte français vise à confier la tâche de surveillance uniquement au Haut-Commissariat ou à l'institution qui lui succéderait : en conséquence, il appuie la proposition tendant à l'adoption du texte français de l'article 30. Ainsi sera écartée toute incertitude concernant le rôle des institutions futures.

M. MAHER (Egypte) explique qu'il s'agissait, dans son esprit, non pas d'un certain nombre d'institutions, mais d'une institution spécialisée ou d'une institution moins importante opérant sous la direction générale de l'institution principale chargée de la protection internationale des réfugiés.

M. HERMENT (Belgique) est partisan de la clôture des débats. A cet effet, il reprend, en une motion formelle, la suggestion qu'il avait précédemment énoncée et qui tendait à mettre le texte anglais du paragraphe 2 de l'article 30 en harmonie avec le texte français, notamment en ce qui concerne les mots « qui lui succéderait ».

M. MAHER (Egypte) fait observer que l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient a été institué en vertu d'une résolution de l'Assemblée générale. En exposant son point de vue sur la coopération, l'orateur songeait, non seulement à cette institution, mais à d'autres qui pourraient être créés ultérieurement en vue de protéger d'autres groupes de réfugiés.

M. HERMENT (Belgique) attire l'attention du représentant de l'Egypte sur le fait que l'article 30 ne concerne que les réfugiés visés par la Convention. Il n'interdit nullement aux Etats contractants de coopérer avec les institutions des Nations Unies qui s'occupent d'autres réfugiés.

M. MAHER (Egypte) est disposé à partager l'avis du représentant de la Belgique, à condition que figure dans le texte une référence expresse au fait que d'autres institutions n'en sont pas exclues. Dans la rédaction actuelle de l'article 30, le verbe « coopérer » n'implique pas une action directe, et le Gouvernement égyptien ne pourrait accepter une négation implicite de la coopération.

M. ROCHEFORT (France) indique qu'il existe une certaine différence entre un instrument invitant les Etats-Membres des Nations Unies à coopérer avec une institution et la réalité de cette coopération. A son avis, cette coopération ne peut s'effectuer qu'à la suite de chartes ou d'accords particuliers signés entre les Etats en cause et l'institution dont il s'agit. Au reste, il faudrait préciser la notion de coopération. C'est ainsi que la Constitution de l'Organisation internationale pour les réfugiés a été votée par 31 Etats Membres. Or, 18 Etats seulement dont certains n'étaient pas membres des Nations Unies, ont coopéré effectivement à l'oeuvre de cette organisation. La délégation française ne pense pas qu'en faisant usage d'un biais quelconque, on puisse amener les gouvernements à prendre des engagements plus larges que ceux qu'ils sont disposés à accepter.

Le PRESIDENT constate que tout accord international, quelle qu'en soit la forme, crée une communauté - celle des Etats participants. La Convention actuelle est destinée à une certaine communauté d'Etats contractants. Le représentant de l'Egypte a dans l'esprit une autre communauté d'Etats, qui opèrent également sous l'égide des Nations Unies. Il va sans dire que certains Etats peuvent faire partie des deux communautés. La Convention n'interdit pas, et ne peut interdire, aux membres de l'une de ces communautés, de coopérer avec des organisations chargées d'appliquer les dispositions arrêtées par une autre. Toute clause à cet effet serait absurde. A juste titre, l'article 30 ne contient aucune disposition sur ce point et laisse tous arrangements et accords internationaux actuels et à venir à la discrétion des divers Etats.

M. MAHER (Egypte) estime interpréter correctement l'amendement belge en considérant que son adoption équivaudrait à exclure des prévisions de l'article 30 toute institution qui pourrait être créée dans l'avenir, à l'exception de celle qui succéderait au Haut-Commissariat. S'il en est bien ainsi, l'article mettrait en péril les institutions futures que les Nations Unies pourraient établir, aussi bien que la position des réfugiés eux-mêmes.

En fait, si l'amendement est adopté, tout amendement de la section C de l'article premier restera sans effet. Le délégué de l'Egypte ne voit donc pas comment, dans l'état actuel de la discussion, il pourrait être procédé au vote sur la question.

M. HOEG (Danemark) propose de modifier l'amendement australien au paragraphe 2 (A/CONF.2/71) par la suppression des mots « any necessary » dans l'expression proposée : « with any necessary data ». (Cette modification ne changerait pas le texte de la version française originale, tel qu'il figure dans le document A/CONF.2/1).

M. SHAW (Australie) approuve la proposition danoise qu'il a d'ailleurs présentée lui-même, bien que de façon moins formelle, au cours de la séance. Les débats qui viennent de se dérouler révèlent bien l'importance que revêt l'adoption de cet amendement, puisque les limitées des obligations que l'on demanderait aux Etats contractants d'assumer seraient alors nettement indiquées dans le texte.

M. HERMENT (Belgique) signale à l'attention du représentant de l'Egypte que deux cas peuvent se présenter. Ou bien la section C de l'article premier sera maintenue et les réfugiés qu'elle concerne seront privés du bénéfice de la Convention ; dans ce cas, l'organisation s'en occupe n'aura pas à demander les renseignements visés à l'article 30. Ou bien la section C sera écartée, et, en ce cas, les réfugiés dont il s'agit pourront à juste titre faire l'objet d'une demande de renseignements de cet ordre.

M. ROCHEFORT (France) constate que la question qu'il a posée au cours de la séance n'a pas encore reçu de réponse. Pour la délégation française, la solution de la difficulté actuelle serait une solution de renvoi, permettant à la Conférence d'examiner l'article 30 en même temps que l'article 36 qui traite des réserves. Dans ces conditions, et comme elle n'a pas obtenu les éclaircissements qu'elle demandait, la délégation française ne participera pas au vote sur l'article 30.

Le PRESIDENT, avant de mettre aux voix l'amendement belge, visant à insérer les mots « qui lui succéderait », dans le texte du paragraphe 1, « tient à rappeler que la situation est la même à l'égard de l'article 30 qu'à l'égard des autres articles de la Convention. En d'autres termes, la Conférence n'en est toujours qu'à la première lecture.

L'amendement belge au paragraphe 1, qui est maintenant mis aux voix, est conçu de la manière suivante :

« ... avec le Haut-Commissariat des Nations Unies ou avec toute autre institution des Nations Unies qui lui succéderait. ».

Par 17 voix contre 2, avec 3 abstentions, l'amendement belge est adopté.

Le PRESIDENT croit pouvoir interpréter le vote sur l'amendement belge au paragraphe 1 comme couvrant également le paragraphe 2. Il appartiendra au Comité du style de faire le nécessaire, en temps voulu, pour mettre en harmonie les deux textes.

Il invite la Conférence à voter sur l'amendement australien au paragraphe 2, tel qu'il a été amendé par le représentant du Danemark, et qui consiste à supprimer le mot « any » avant le mot « data », à la quatrième ligne du texte anglais.

Par 18 voix contre zéro, avec 2 abstentions, l'amendement est adopté.

Par 18 voix contre 2 avec 2 abstentions, l'article 30 ainsi amendé, est adopté dans son ensemble.

iv) Article 31 - Application de la Convention (A/CONF.2/85)

M. HOARE (Royaume-Uni) déclare que l'amendement du Royaume-Uni (A/CONF.2/85) propose de supprimer l'article 31 parce que celui-ci constitue une innovation en matière de traités internationaux. Une telle disposition figure déjà dans un instrument qui n'a pas été adopté d'une manière générale, et également dans un projet d'instrument, où l'opportunité de son introduction a fait l'objet d'un vif débat. Un principe reconnu, en droit international, est que, lorsqu'une convention a été ratifiée, elle entre immédiatement en vigueur dans le territoire de l'Etat contractant intéressé. On profite du temps écoulé entre la signature et la ratification pour apporter à la législation nationale tous les ajustements nécessaires. Il en est de même en ce qui concerne l'adhésion. Dans le cas présent, cependant, il est stipulé que l'Etat contractant adoptera, « dans un délai raisonnable et conformément à sa constitution, les mesures législatives ou autres », ce qui présuppose que la ratification interviendrait avant que les mesures législatives appropriées n'aient été prises sur le plan national. Cela sous-entend, de plus, que l'on laissera à l'Etat le soin de prendre ces mesures dans un délai raisonnable. Une telle disposition s'écarte de la pratique actuellement suivie. En outre, la délégation du Royaume-Uni juge cet article superflu puisque la Convention prévoit des dispositions qui, dans la plupart des pays sont déjà couvertes par la législation nationale. On ne doit pas accorder, après la ratification de la Convention, un délai indéterminé pour procéder aux ajustements juridiques qui pourraient s'avérer nécessaires. Cet article devrait donc être supprimé, car non seulement il créerait un précédent nuisible, mais il aurait également des effets néfastes sur le plan pratique.

M. HERMENT (Belgique) partage entièrement le point de vue de représentant du Royaume-Uni.

M. ROBINSON (Israël) fait observer que le représentant du Royaume-Uni s'est appuyé sur la supposition qu'il n'existe qu'une méthode pour la mise en vigueur des conventions internationales, c'est-à-dire la méthode suivie par des pays comme le Royaume-Uni et Israël. Mais en réalité, il n'en est pas ainsi. Deux autres méthodes existent : d'une part, le processus automatique utilisé, par exemple, en vertu de la constitution des Etats-Unis d'Amérique, et, d'autre part, la méthode selon laquelle la ratification ou l'adhésion précèdent l'adoption sur le plan nationale des mesures législatives appropriées.

Il suffit de rappeler, à cet égard, l'exemple de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide conclue récemment dans laquelle, à l'article 5, les Parties contractantes s'engagent à prendre les mesures législatives nécessaires. Bien que la Convention ait été ratifiée par 25 ou 26 Etats Membres des Nations Unies, deux seulement ont jusqu'ici promulgué les mesures législatives nécessaires. Ainsi, cette convention reste lettre morte puisque les sanctions frappant le crime de génocide doivent être inscrites dans la législation de chaque Etat.

L'orateur admet que l'article 31 est inutile dans le cas des pays qui suivent la procédure en vigueur dans le Royaume-Uni ainsi que dans le cas de ceux qui utilisent le processus d'application automatique. Mais pour les autres - ils sont nombreux en Amérique du Sud et il s'en trouve en Europe également - l'inclusion de cet de cet article est essentielle ; d'autant plus que la Convention doit exercer ses effets dans le monde entier.

Le représentant d'Israël sait par expérience qu'aux Nations Unies, il a été répondu à certaines demandes officieuses visant à la mise en vigueur de la Convention sur le crime de génocide, que les mesures législatives appropriées devaient, tout d'abord, être prises. Il est certain que l'expression « dans un délai raisonnable » est assez vague, mais, si son efficacité est faible du point de vue légal, elle n'en a pas moins une certaine valeur psychologique. En vertu de l'article 31, les gouvernements pourront demander à leur Parlement de mettre au point la législation nécessaire.

M. Robinson ne peut pas non plus s'associer au point de vue du représentant du Royaume-Uni selon lequel les dispositions prévues par la Convention se rencontrent déjà dans toutes les législations nationales. Le représentant de la Suisse avait soulevé une question pertinente sur le même sujet à propos de l'article 7 relatif au statut personnel. Cet article devenait-il applicable automatiquement par le fait de la ratification, ou était-il nécessaire de promulguer une législation spéciale ? Chaque pays devra répondre d'après sa propre Constitution à cette question. Mais l'article 7 n'est pas le seul à poser un tel problème. Il serait particulièrement dangereux, selon M. Robinson, de ne pas tenir compte, dans la Convention, de la procédure suivie par le troisième groupe d'Etats, qui légifèrent après la ratification.

La rédaction de l'article 31 n'est, évidemment, pas entièrement satisfaisante et la délégation d'Israël suggère d'insérer, après le mot « adoptera », à la première ligne, les mots « lorsque la nécessité s'en fera sentir » de cette manière, les pays des deux premiers groupes seront couverts, et l'article exercera ses effets en qui concerne le troisième groupe.

M. HOARE (Royaume-Uni) ne peut se déclarer d'accord avec le représentant d'Israël. Il accepte la définition des deux premiers types de procédure, mais ce serait aller trop loin, selon lui, que de considérer le troisième genre de procédure comme une pratique constitutionnelle reconnue.

Si l'on admettait une telle pratique, aucun Etat contractant ne pourrait savoir quelle est exactement la situation pour la mise en vigueur d'un traité multilatéral. Certains Etats se trouveraient dans une position d'inégalité vis-à-vis d'autres Etats. Comment admettre qu'un Etat puisse ajourner l'application d'une convention qu'il a déjà ratifiée alors que d'autres Etats seraient immédiatement liés par les dispositions de cette convention ? M. Hoare admet que des difficultés peuvent se présenter pour un Etat fédéral mais celles-ci peuvent être surmontées au moyen d'une clause fédérale appropriée. La Convention doit entrer en vigueur au moment de la ratification.

Les observations du représentant d'Israël sur la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, confirment les affirmations de M. Hoare, car il semble que la Convention, bien qu'elle ait été ratifiée, ne soit pas encore en vigueur dans le territoire de beaucoup d pays qui l'ont ratifiée. Il est heureux que la mise en vigueur de cette convention ne soit pas d'une nécessité immédiate.

Il ne fait aucun doute que, selon la doctrine correcte, les droits prescrits dans la Convention doivent être accordés dès la ratification.

M. ROBINSON (Israël) admet les critiques du représentant du Royaume-Uni en ce qui concerne la troisième catégorie de pays, mais il maintient qu'il est impossible d'éliminer cette dernière en supprimant l'article 31. Sans cette disposition, on n'aurait aucune prise sur ces pays. Quel est le moyen de rendre le meilleur service à la Convention : en conservant une disposition qui pourrait être utilisée comme une arme ou en ignorant l'existence de la moitié des pays du monde ? Le maintien de l'article 31 est dans l'intérêt tant de la Convention que des réfugiés.

M. HERMENT (Belgique) estime que le très intéressant exposé du représentant d'Israël demeure dans le domine de la théorie. A sa connaissance, il n'existe pas de cas où des Etats ont ratifié une convention sans la mettre en vigueur.

Si la proposition d'Israël était adoptée avec l'article 31 il serait impossible de savoir avec précision si la Convention est effectivement appliquée dans les pays signataires, ceux-ci pouvant toujours invoquer l'excuse d'« un délai raisonnable », nécessaire pour harmoniser leur législation avec les dispositions de la Convention. Il est certain que la pratique suivie jusqu'à présent peut entraîner des retards, mais la délégation belge, pour sa part, préfère envisager ces retards et être sûre que la ratification sera effectivement suivie d'une mise en oeuvre de la convention.

M. SCHURCH (Suisse) rappelle qu'il avait soulevé une question analogue à propos de l'article 7. Il avait demandé si, au moment de l'adhésion, la législation nationale devait être modifiée pour donner effet à cet article. Cette éventualité aurait suscité quelques difficultés au Gouvernement fédéral de la Suisse, car la législation suisse prévoit que l'adhésion de la Suisse à un instrument internationale fait passer cet instrument dans le domaine de la législation nationale. Pour ces raisons, l'article 31 poserait certains problèmes et la délégation suisse appuie donc l'amendement du Royaume-Uni tendant à supprimer cet article.

M. HOARE (Royaume-Uni) répondra à la question d'Israël par une autre question. Quelle était la pratique courante dans le passé, avant qu'un article comme l'article 31 ne soit introduit dans une convention et qu'une telle concession ne soit accordée ? Le délégué de la Belgique a effectivement répondu à cette demande d'arme. La délégation du Royaume-Uni estime, en ce qui la concerne, que l'arme proposée serait moins efficace que celle de la ratification. Il serait toujours possible de demander aux Etats pour quelle raison ils n'ont pas mis en vigueur une convention ratifiée. Ce serait là une méthode meilleure que l'exhortation accompagnant une clause échappatoire.

M. ROBINSON (Israël) répond que l'ère des traités multilatéraux a commencé en 1907 et que la majorité de ces traités ont négociés après la première guerre mondiale. Dans le passé, selon la pratique alors suivie, les pays agissaient par les voies habituelles de la diplomatie, des avertissements étant échangés par correspondance antre les gouvernements parties à un traité. Il est certainement préférable d'inclure un article dans une convention plutôt que de prévoir l'échange d'innombrables communications diplomatiques.

Passant au pont soulevé par le représentant de la Belgique, l'orateur déclare que le terme « ratification » a une signification claire et généralement acceptée. Rien ne sous-entend que la ratification doive suivre l'adoption d'une législation nationale appropriée. Si l'on admettait une telle conception, il faudrait amender en conséquence le paragraphe 2 de l'article 34 qui, dans sa forme actuelle prévoit que « La présente Convention ... sera ratifiée ». Si l'on pouvait supposer que la conception, défendue par les représentants de la Belgique et du Royaume-Uni selon laquelle la ratification doit suivre l'adoption de modifications des législations nationales trouvait son expression dans l'article 34, la difficulté serait résolue et la délégation d'Israël n'aurait plus d'objections à formuler.

M. van BOETZELAER (Pays-Bas) constate que les Etats qui ratifient une convention sont tenus de l'appliquer. S'ils ne le font pas parce que leur législation nationale n'est pas adaptée aux nécessités de la convention, ils se trouvent en défaut. Adopter l'article 31 serait permettre aux Etats qui se trouveraient en défaut d'invoquer, pour ne pas appliquer la Convention sur leur territoire, l'excuse d'un délai raisonnable. La délégation des Pays-Bas estime donc qu'il serait plus utile de remplacer l'article 31 par une clause imposant aux Etats contractants l'obligation de communiquer au Secrétariat le texte des lois et règlements adoptés en vue de l'application de la Convention. Cette mesure permettrait d'instituer, en la matière, un certain contrôle.

Il est décidé de renvoyer à la prochaine séance la suite de l'examen de l'article 31.

2. REUNION DU GROUPE DE TRAVAIL CHARGE D'EXAMINER LA SECTION E DE L'ARTICLE PREMIER

Répondant à une question du PRESIDENT, M. ROCHEFORT (France signale qu'il n'a pas reçu de son Gouvernement les précisions qu'il avait demandées en ce qui concerne la section E. Il lui sera donc impossible de contribuer de façon constructive aux travaux du Groupe de travail qui doit se réunir après la présente séance. La délégation française n'élève cependant aucune objection contre cette réunion.

La séance est levée à 18 h. 15


1 Voir compte rendu analytique de la septième séance (A/CONF.2/SR.7).

2 loc. cit.