Fermer sites icon close
Search form

Recherchez un site de pays.

Profil du pays

Site web du pays

Les restaurateurs

Articles et reportages

Les restaurateurs

28 Septembre 2017
Food Sweet Food
Mohammad El Khady, un chef syrien réfugié en France, reçoit les applaudissements des clients du restaurant parisien Poulette, l'un des 11 restaurants à Paris invitant des chefs réfugiés à cuisiner dans leurs cuisines dans le cadre du Refugee Food Festival en juin 2016.

Depuis la naissance du Refugee Food Festival, près de 80 restaurateurs, à travers toute l’Europe, ont ouvert les portes de leur cuisine à des chefs réfugiés afin de mettre en avant leurs talents et promouvoir leur intégration.

« Ce qui est extraordinaire avec la cuisine, c’est qu’elle n’a pas de frontière et qu’elle peut être un formidable levier social, » souligne Stéphane Jégo, chef et propriétaire du restaurant Chez L'Ami Jean à Paris.

« Quand je cuisine avec des réfugiés, je ne vois pas des réfugiés mais des gens qui sont sur le même pied d’égalité que moi, » ajoute ce chef breton, qui a été l’un des premiers à accompagner le Refugee Food Festival dans cette aventure.

« Quand je cuisine avec des réfugiés, je ne vois pas des réfugiés mais des gens qui sont sur le même pied d’égalité que moi. »

Lors du premier Refugee Food Festival, il s’est accordé avec le chef syrien, Mohammad Elkhaldy, sur un menu à quatre mains, une fusion entre les cuisines française et syrienne. Il décrit cet échange gastronomique comme un « accord entre la terre et la mer », qui a ravi nombre de gourmands. Au menu : tartare d’agneau kibbeh nayeh à l’anguille fumée, courgettes au yaourt farcies au bœuf de Galice, pigeon au risotto de freekeh et glace à la gomme arabique.

« Les réfugiés sont des personnes qui ont des compétences et des talents et il est essentiel qu’ils aient l’opportunité d’exploiter leur potentiel », souligne Thanassis Vassilenas, propriétaire du restaurant Vassinelas à Athènes. Il a décidé de prolonger le festival d’une soirée pour permettre à plus de clients de profiter du menu à cinq plats préparés par Hassan Hassan, réfugié originaire de Somalie.

« Aucun de nous ne décide du lieu de sa naissance et il est fondamental de ne pas oublier les valeurs de l’accueil et de l’intégration, qui sont des valeurs stratégiques pour construire l’avenir de notre société », déclare Oscar Farinetti, le fondateur de la chaine Eataly à Milan. Dans son restaurant, la chef étoilée Michelin Viviana Varese a exploré la cuisine éthiopienne avec un chef éthiopien.

« C'est une manière de m’impliquer en tant que citoyen et chef d’entreprise. »

Tout comme Stéphane Jégo, qui s’investit à titre professionnel et personnel dans l’intégration de personnes en difficulté, Hervé Rigaud se dit « indigné » par la situation des migrants en France. Ce directeur de la crêperie Lulu La Nantaise, au bord du Canal Saint Martin, à Paris, a décidé de s’engager en employant des réfugiés dans son restaurant.

« C'est une manière de m’impliquer en tant que citoyen et chef d’entreprise, » dit-il. « J’habite à Paris et je vois des gens dormir dans la rue alors qu’ils ont fui des pays en guerre et bravent des dangers. C’est hallucinant de ne rien faire et cela me choque profondément, » dit-il.

Ravi de sa participation au Refugee Food Festival en juin 2017, il dit être prêt à se lancer dans la même aventure l’année prochaine. « Ce sont les initiatives citoyennes qui font bouger les choses et les politiques, » insiste-t-il.

Hervé a ouvert les portes de son restaurant à Nitharshini, une chef sri lankaise réfugiée en France. C’est lors d’un déjeuner dans un restaurant sri lankais avec un de ses employés, dans le quartier de La Chapelle, qu’il découvre les dosas, des crêpes indiennes. Il a alors l’idée de proposer ce plat dans sa crêperie parisienne pour le Refugee Food Festival.

« Aucun de nous ne décide du lieu de sa naissance et il est fondamental de ne pas oublier les valeurs de l’accueil et de l’intégration, qui sont des valeurs stratégiques pour construire l’avenir de notre société. »

« Ce festival valorise les réfugiés et c’est très positif. S’il ne débouche pas toujours sur un emploi pour les chefs, cela leur permet de commencer à se constituer un réseau. C’est un premier pas vers l’insertion professionnelle, » explique Hervé.

Ce festival permet, en effet, aux chefs réfugiés de se faire connaître. « C’est une expérience qui a permis à Miriam de s’intégrer car je l’encourageais à aller vers les clients. Elle en a rencontré une trentaine, » explique Felix, chef dans le restaurant Symbiose, à Bordeaux, qu’il a ouvert avec trois associés.

Parisien élevé en Bretagne, Felix a revêtu son tablier de chef aux côtés de la chef iranienne lors du Refugee Food Festival 2017. Il admet que travailler à quatre mains requiert des efforts. « Il y a eu un important travail en amont pour trouver des produits rares en France, comme des petites baies que l’on retrouve dans la cuisine iranienne, » dit-il.

L’effort en a valu la peine. En une bouchée, le chef de 27 ans et son binôme iranien ont transporté les gourmands de la France à l’Iran. C’est un aller simple grâce à un menu en sept services, à base de safran.

« J’ai validé puis allégé les plats, qui étaient beaucoup à base de pomme de terre, de pain et de mayonnaise. J’ai rajouté des légumes pour que ce soit une cuisine plus moderne et des portions plus petites, à l’image du restaurant, » souligne Felix.

Le résultat : un menu iranien emblématique mais moderne. « Miriam était assez tenace et ne me laissait pas modifier ses plats. Il fallait donc trouver la bonne manière de lui parler, » raconte Felix, en riant.

Si le Refugee Food Festival permet, avant tout, de promouvoir les compétences des réfugiés, il est également une source d’inspiration pour les restaurateurs. D’Athènes à Madrid, de nombreux établissements affichaient complet plusieurs jours à l’avance.

« J’ai trouvé cette initiative formidable. Je pense que l’Espagne a besoin de ce type d’événements pour soutenir les réfugiés », dit Banafsheh Farhang, le propriétaire de l’un des restaurants participant, Banibanoo, à Madrid.

« Il est toujours enrichissant de découvrir une autre culture, d’autres techniques, produits et saveurs. Aujourd’hui, grâce à Mohamad Elkhaldy, je joue différemment avec les épices… et je suis beaucoup plus précis quand j’utilise le cumin ! », explique Stéphane Jégo.