Fermer sites icon close
Search form

Recherchez un site de pays.

Profil du pays

Site web du pays

Compte rendu analytique de la 502ème séance tenue au Palais des Nations, à Genève, le mardi 17 octobre 1995, à 15 heures.

Réunions du Comité exécutif

Compte rendu analytique de la 502ème séance tenue au Palais des Nations, à Genève, le mardi 17 octobre 1995, à 15 heures.
A/AC.96/SR.502

24 Octobre 1995
English

COMITE EXECUTIF DU PROGRAMME DU HAUT COMMISSAIRE
Quarante-sixième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 502ème SEANCE
tenue au Palais des Nations, à Genève, le mardi 17 octobre 1995, à 15 heures.
Président : M. MCHUMO (République-Unie de Tanzanie)

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également portées sur un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications éventuelles aux comptes rendus des séances publiques de la présente session seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la clôture de la session.

La séance est ouverte à 15 h 25.

DEBAT GENERAL (point 4 de l'ordre du jour) (suite)

1. M. PATEL (Malawi) dit que le processus de rapatriement des Mozambicains réfugiés au Malawi entamé en novembre 1993 à la suite des accords conclus à Rome s'est achevé. Il ne reste plus dans le pays que quelques petits groupes qui sont devenus autosuffisants et qui n'ont plus besoin de la protection ou de l'assistance de la communauté internationale. La Commission tripartite regroupant les Gouvernements malawien et mozambicain et le HCR suivent de près la phase de transition au Mozambique, et les clauses de cessation seront appliquées dès que toutes les conditions seront réunies.

2. L'énorme succès du programme exécuté au Malawi appelle quelques observations. Bien qu'étant un des pays les plus pauvres du monde, le Malawi a accueilli à bras ouverts plus d'un million de réfugiés mozambicains. L'hospitalité dont ont fait preuve les Malawiens pendant plus de neuf ans a permis d'instaurer des relations harmonieuses entre la population locale et les réfugiés qui ont grandement facilité la tâche des organisations humanitaires internationales. Le comportement exemplaire de la part des Malawiens est d'autant plus à saluer que de nombreux pays plus fortunés refusent d'accueillir des réfugiés. Il convient, d'autre part, de rendre hommage au personnel du HCR dont le dévouement est pour beaucoup dans la réussite du programme.

3. Lors de sa visite au Malawi au mois d'avril, le Haut Commissaire adjoint a réaffirmé la ferme intention du Haut Commissariat d'aider le Gouvernement malawien dans ses efforts pour réparer les dégâts causés à l'environnement dans les régions qui avaient accueilli des réfugiés. Sur les terres allouées aux réfugiés, aux prix d'énormes sacrifices, il y a eu une grave détérioration des sols et plus de 100 000 hectares auraient été déboisés. Certaines terres pourraient même devenir irrécupérables si des mesures ne sont pas prises immédiatement. Dans toutes les régions touchées par l'afflux de réfugiés, les populations ne peuvent pratiquement plus rien tirer de terres qui constituaient jusque-là leur unique moyen de subsistance.

4. Tout en remerciant les gouvernements amis et les différents organismes de l'aide qu'ils lui apportent dans le domaine de la protection de l'environnement, le Gouvernement malawien appelle leur attention sur la nécessité de mobiliser des ressources pour une intervention rapide axée sur les zones touchées. Les coûts d'un programme de régénération de l'environnement dans les 12 districts qui ont accueilli des réfugiés ont été évalués et différents projets seront élaborés à l'intention des donateurs. Dans l'attente de réactions favorables, le Gouvernement malawien souhaite que le HCR poursuive le programme de reboisement lancé il y a quelques années et qu'il continue de jouer un rôle de catalyseur en vue de la mobilisation de ressources pour la réparation des dégâts causés à l'environnement. La délégation malawienne est, à cet égard, profondément touchée par l'engagement pris par le Haut Commissaire dans son allocution devant le Comité exécutif.

5. Par ailleurs, les autorités malawiennes ont appris, à leurs dépens, que lorsque des gens fuyaient en masse une situation de guerre, il y avait souvent parmi eux des personnes armées. A l'annonce de leur prochain retour dans leur pays certains anciens combattants mozambicains ont cédé leurs armes à bas prix à des locaux. A présent, des Malawiens sans scrupule utilisent ces armes pour terroriser la population et commettre des vols. Le problème ne fait que s'aggraver. Malheureusement une telle situation conforte la position de certains gouvernements qui refusent d'accueillir des réfugiés, malgré les obligations qui leur incombent en vertu des conventions internationales.

6. Alors que la communauté internationale fête le retour des réfugiés mozambicains dans leurs foyers, le Malawi connaît un nouvel afflux de demandeurs d'asile. Les nouveaux arrivants sont à présent au nombre de 971 et le gouvernement a ouvert, à leur intention, un nouveau camp au nord-est de la capitale. Parmi eux figurent de nombreux réfugiés rwandais refoulés aux frontières de certains pays proches du Rwanda. Etant partie aux différents instruments internationaux, le Malawi a toujours ouvert ses portes à tous ceux qui fuyaient la persécution. Mais pour aider la communauté internationale à sanctionner les horribles actes de génocide commis au Rwanda, le Gouvernement malawien a décidé d'examiner le cas de chacune des 45 familles rwandaises qui se trouvaient actuellement au Malawi afin de déterminer si certains de leurs membres étaient impliqués dans les atrocités commises dans ce pays.

7. Enfin, la délégation malawienne note avec satisfaction l'évolution de la situation en Afrique australe où un processus démocratique est en cours. Une fois que l'Angola aura retrouvé la paix, la région cessera d'être un réservoir de réfugiés; il est à espérer que la communauté internationale y verra alors un pôle d'investissement et de développement. Avant de conclure, la délégation malawienne tient à dénoncer l'attitude déplorable de certains gouvernements qui appliquent vis-à-vis des réfugiés une politique discriminatoire. Tous les demandeurs d'asile, quels que soient leur race, leur sexe ou leur religion, devraient être traités sur un pied d'égalité, notamment lorsqu'il s'agit de réinstallation.

8. M. BLAVO (Ghana) dit qu'en 1990, le Ghana a connu pour la première fois un afflux massif de réfugiés provoqué par la guerre civile au Libéria. Leur nombre, qui était au départ d'environ 10 000, s'élève actuellement à 15 000. D'autre part, les affrontements généralisés qui ont éclaté au Togo en 1993 et 1994 et l'anarchie qui en a résulté ont poussé un grand nombre de Togolais à se réfugier au Ghana. A l'heure actuelle environ 85 000 d'entre eux bénéficient de l'assistance du HCR, qui pendant chacune de ces deux crises humanitaires, s'est tenu aux côtés du Ghana. Le Gouvernement ghanéen l'en remercie chaleureusement. La plupart des réfugiés vivent dans des camps. Environ 20 000 personnes se seraient, cependant, spontanément installées dans différents districts du pays sans demander l'assistance du HCR ni du gouvernement.

9. En application des dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés, tous les réfugiés installés au Ghana jouissent d'une totale liberté de circulation à l'intérieur du pays et peuvent s'associer librement à des nationaux. Ils ont accès à tous les services publics et sociaux. Ils bénéficient en particulier de soins de santé subventionnés et leurs enfants fréquentent les écoles publiques. Ils peuvent travailler et certains sont à la tête de petites entreprises. Cela dit, malgré les efforts visant à promouvoir les activités génératrices de revenu, les bénéficiaires restent peu nombreux.

10. Le Gouvernement ghanéen a promulgué en 1992 une loi sur les réfugiés en vertu de laquelle un Conseil des réfugiés opérant sous les auspices du Ministère de l'intérieur a été créé. Il s'occupe de toutes les questions intéressant les réfugiés, y compris l'octroi du statut de réfugié. Afin de pouvoir coopérer pleinement avec les ONG, le Conseil a besoin de renforcer ses moyens institutionnels et ses ressources humaines. Une assistance du HCR dans ce domaine serait la bienvenue. Les perspectives de rapatriement des réfugiés qui se trouvent au Ghana sont encourageantes. Dans le cas des réfugiés togolais, un certain nombre de mesures de confiance, dont la loi d'amnistie de décembre 1994 et l'Accord sur le rapatriement que le Gouvernement togolais et le HCR ont conclu le 12 août 1995 sont pour beaucoup dans ce nouveau climat. Des campagnes ont été lancées au sein de la population réfugiée pour l'informer des garanties qui lui étaient offertes quant à sa sécurité et aux aspects matériels de sa réinsertion.

11. Sous l'égide du Président Rawlings, qui est aussi président en exercice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest, le Ghana a joué et continue de jouer un rôle clé dans le processus de paix au Libéria. Les efforts déployés ont été couronnés par la conclusion de l'Accord de paix d'Abuja en août dernier. Le Ghana saisit cette occasion pour lancer un appel à la communauté internationale et aux Etats de la sous-région pour qu'ils aident le peuple libérien à instaurer une paix authentique et durable dont la réalisation ne manquera pas d'alléger le fardeau de toutes les parties concernées et d'accélérer le rapatriement librement consenti des réfugiés libériens qui se trouvent au Ghana et dans d'autres pays voisins. Une conférence d'annonces de contributions pour la reconstruction du Libéria est prévue pour le vendredi 27 octobre 1995 au Siège de l'Organisation des Nations Unies à New York. Il est à espérer que le Comité exécutif apportera au Haut Commissaire tout l'appui dont il a besoin dans ses efforts en vue de mobiliser les ressources nécessaires pour la réinsertion des réfugiés libériens.

12. M. KAMARA (Sierra Leone) dit que l'évolution positive intervenue dans certains pays africains a permis à de nombreux réfugiés et personnes déplacées de regagner leur foyer. Il en va tout autrement en Sierra Leone où les initiatives pour la paix et la réconciliation prises par l'Organisation des Nations Unies, le Secrétariat du Commonwealth, l'Organisation de l'Unité africaine, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest et d'autres organismes n'ont pas été accueillies avec le même esprit de coopération par toutes les parties concernées.

13. En raison des activités des forces rebelles, l'insécurité s'est aggravée, de vastes régions de la Sierra Leone sont devenues inaccessibles, des communautés entières ont été déracinées et des enfants ont été séparés de leur famille et, dans certains cas, obligés de prendre les armes aux côtés des rebelles. Certes, le conflit a poussé de 300 à 400 000 Sierra-Léoniens à fuir en Guinée et au Libéria voisin, mais c'est le cas des 1,5 à 2 millions de Sierra-Léoniens déplacés dans leur propre pays qui préoccupe le plus. Le Comité international de la Croix-Rouge estime qu'au moins 30 000 civils vivent à l'extérieur des centres urbains derrière les lignes rebelles dans l'est de la Sierra Leone. L'indifférence apparente de la communauté internationale à l'égard de ces personnes qui ne survivent que grâce aux mécanismes d'entraide de la population locale inquiète beaucoup les Sierra-Léoniens. L'insécurité qui règne sur les routes du pays a rendu impossible l'acheminement de l'aide humanitaire au-delà de la zone occidentale, en sorte que parmi les personnes qui sont inscrites auprès du PAM et du Conseil des réfugiés, dont le nombre s'élève à un million, 65 % seulement reçoivent une aide alimentaire. A la fin de juillet 1995, les organismes de secours ne pouvaient atteindre que 12 % des personnes qui étaient censées être prises en charge. Malgré les promesses, la réponse au dernier appel commun du Département des affaires humanitaires a été décevante. La délégation sierra-léonienne tient à saisir cette occasion pour appeler solennellement l'attention de la communauté internationale sur la gravité de la situation humanitaire en Sierra Leone.

14. Conscient que le retour des réfugiés et des personnes déplacées dans leur foyer demeurera un voeu pieux tant que le conflit se poursuivra, le Conseil national provisoire de gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour persuader les rebelles de mettre fin aux hostilités. Un certain nombre de dispositions ont déjà été prises en vue de la tenue d'élections libres. Une Commission électorale nationale intérimaire a été formée. Sa première initiative a été de convoquer une conférence consultative à l'occasion de laquelle 15 partis politiques se sont inscrits pour les élections parlementaires et présidentielles prévues pour 1996. L'interdiction des activités politiques ayant été levée, il est possible d'affirmer aujourd'hui que le processus démocratique est engagé.

15. M. MALUNGO (Angola), après avoir félicité les fonctionnaires du HCR pour le travail très délicat qu'ils accomplissaient dans différentes parties du monde, rappelle que le Gouvernement angolais a organisé en collaboration avec le PNUD, les 25 et 26 septembre 1995, une table ronde à laquelle ont participé le Président de la République, M. dos Santos et le Président de l'UNITA, M. Savimbi, et qu'à cette occasion il a été présenté un programme de réhabilitation communautaire et de réconciliation nationale portant sur la période 1996-1997. Grâce à un appui généreux de la communauté internationale, on vise ainsi à aider les communautés à reprendre la production vivrière, à remettre en état les routes et d'autres infrastructures de base et à rétablir des services tels que la distribution d'eau potable, les soins de santé primaires et l'éducation.

16. Par ailleurs, le Gouvernement angolais a décidé de s'attaquer, à titre prioritaire, au problème du retour des réfugiés. En effet, on estime à 311 000 le nombre de personnes concernées, dont 83 000 seront rapatriées sous les auspices du HCR. L'exécution de ce programme de rapatriement nécessitera un financement d'environ 44 millions de dollars E.-U., dont 7 160 000 pour 1995, 28 300 000 pour 1996 et 8 600 000 pour 1997. Cet afflux de réfugiés, inévitable parce que la majorité des intéressés subissent des privations dans les pays d'asile, ne sera pas une tâche facile car la plupart des régions d'origine ont été ravagées par la guerre ou sont infestées de mines. Le plus gros de la population de réfugiés retournera au pays de manière spontanée, et ce mouvement est appelé à s'accélérer. C'est pour cette raison que l'Angola se joint à l'appel lancé par le HCR en faveur de la remise en état des structures et services de base et de la création de conditions propices au retour des réfugiés et à leur réinsertion.

17. Face à toutes ces difficultés, l'Angola fait une fois de plus appel à la générosité de la communauté internationale pour qu'elle appuie ce programme, car la stabilité politique et économique du pays dépendra pour beaucoup du succès de la réintégration sociale des réfugiés, des personnes déplacées à l'intérieur des frontières nationales et des soldats démobilisés.

18. M. DEMBINSKI (Pologne), reprenant les vues exprimées par le Haut Commissaire dans sa déclaration d'ouverture, dit qu'en fournissant une protection aux personnes déplacées en attendant de trouver des solutions durables, si possible dans le pays d'origine, on contribuera très certainement à résoudre l'un des problèmes les plus graves de la dernière décennie du XXème siècle. Le fait que les contributions financières qui avaient été annoncées en 1994 ont été honorées à ce jour - situation exceptionnelle dans le système des Nations Unies - indique clairement que les Etats Membres approuvent les méthodes de travail et les programmes du HCR.

19. Depuis 1991, année où la Pologne a adhéré aussi bien à la Convention de 1951 qu'au Protocole de 1967, des afflux massifs de réfugiés ont créé des situations d'urgence dans le monde entier. Durant cette période, la Pologne n'a certes pas été touchée par ce phénomène, mais les autorités ont tenu, en 1992, à offrir aide et protection aux réfugiés de l'ex-Yougoslavie. De plus, la Pologne a accepté de jouer un rôle de premier plan au sein d'un groupe de travail chargé de l'aide à la reconstruction de la Bosnie-Herzégovine. Depuis son adhésion aux instruments internationaux pertinents, la Pologne met progressivement sur pied l'infrastructure juridique et institutionnelle nécessaire à leur application. Cette nouvelle législation, une fois entrée en vigueur, dotera les autorités polonaises d'une base solide qui leur permettra de faire face comme il se doit à toute nouvelle situation de réfugiés.

20. Enfin, M. Dembinski tient à dire combien la délégation et les autorités polonaises se félicitent des contacts et des relations de collaboration qu'elles entretiennent avec le Haut Commissariat, ainsi qu'avec son bureau de liaison à Varsovie, tout en exprimant le voeu que ces liens de coopération se feront plus étroits encore, notamment en ce qui concerne l'intégration des réfugiés.

21. M. ULUCEVIK (Turquie) fait observer que depuis la fin de la guerre froide, le nombre des victimes des catastrophes causées par l'homme s'est considérablement accru et que le nombre de réfugiés et de personnes déplacées ne cesse d'augmenter. Aujourd'hui, la situation de près de 30 millions de personnes dans différentes régions du monde inquiète le HCR.

22. Le cas de la Bosnie-Herzégovine représente, à lui seul, l'une des tragédies humaines les plus horribles de l'histoire moderne. Pendant que le crime de génocide se poursuivait impunément à l'encontre des Bosniaques, le HCR devait prendre en charge plus d'un million de réfugiés et de personnes déplacées. Alors qu'un règlement négocié semble se profiler en Bosnie-Herzégovine, les tâches qui attendent le HCR n'en sont pas moins importantes. A cet égard, M. Uluçevik salue la volonté du HCR de favoriser le retour organisé des réfugiés et des personnes déplacées et convient, avec le Haut Commissaire, que les questions humanitaires doivent faire partie intégrante de tout accord de paix.

23. En ce qui concerne la question de la protection internationale, la Turquie estime que la Convention de 1951 et le Protocole de 1967 renferment les éléments juridiques nécessaires à la protection de ceux qui fuient en masse les troubles internes ou les conflits armés, et que les solutions doivent être recherchées à l'intérieur du cadre existant. Sur le plan pratique, le représentant de la Turquie note qu'à l'heure actuelle, la grande majorité des réfugiés est accueillie dans des pays en développement ou peu avancés, l'accès aux pays industrialisés devenant de plus en plus restreint et sélectif.

24. La question de l'apatridie étant importante, M. Uluçevik félicite le HCR pour l'étude qu'il réalise sur un thème qui semble délaissé par le droit international privé. Il rend également hommage aux efforts que fait le HCR pour faire mieux connaître le droit international des réfugiés. De même, il appuie les programmes éducatifs du HCR, notamment ceux qui sont destinés aux femmes et aux enfants.

25. Par ailleurs, le représentant de la Turquie estime que le maintien de la sécurité et de l'ordre public dans les camps de réfugiés revêt une importance capitale. A cet égard, il tient à souligner une fois de plus que tout acte ou omission de nature à faciliter des activités armées à l'intérieur des camps de réfugiés ou aux alentours en vue de déstabiliser des gouvernements, ou toute autre activité hostile de nature à ébranler la sécurité et la stabilité des Etats, est incompatible avec le caractère civil et humanitaire de ces camps.

26. De par son emplacement géographique critique, la Turquie a toujours été directement touchée par les mouvements de population en provenance du nord de l'Iraq et des pays voisins des Balkans et du Caucase. Malgré les pressions ainsi exercées sur son économie et ses ressources, elle a toujours accueilli des réfugiés et en compte aujourd'hui environ 30 000. L'afflux de réfugiés en provenance du nord de l'Iraq en 1991 a créé d'énormes problèmes et causé des dégâts importants dans le pays, mais le concours apporté par le HCR a été à cet égard exemplaire. Cette expérience a par ailleurs prouvé une fois de plus à la Turquie que la solution durable au problème posé par les mouvements de réfugiés résidait dans le rapatriement librement consenti.

27. En ce qui concerne la contribution de la Turquie à la recherche de solutions aux problèmes humanitaires qui se posent en Bosnie-Herzégovine, il y a lieu de noter que diverses ONG turques sont déjà à pied d'oeuvre dans le cadre d'un projet mixte de construction de maisons préfabriquées à Zenica. En outre, la Turquie a assuré la coordination des efforts conjoints déployés par les pays membres de l'Organisation de la conférence islamique par l'intermédiaire du Groupe de mobilisation de l'assistance en Bosnie-Herzégovine.

28. M. GRIFFITHS (Département des affaires humanitaires) tient à développer trois points importants qui ont déjà été abordés pendant le débat général et qui ne manqueront pas de s'imposer à la réflexion dans les mois à venir.

29. Premièrement, la coordination, qui permet d'utiliser de la manière la plus efficace possible des ressources et des compétences limitées, a permis au HCR de jouer un rôle très important, notamment dans deux cas précis : sur le terrain, dans les pays du Caucase où, grâce aux relations collégiales entre le HCR et le Département des affaires humanitaires, le programme humanitaire a pu être exécuté sans surcoût administratif, et au siège, à Genève, où le HCR a joué un rôle de premier plan dans les travaux d'une équipe spéciale du Comité permanent interorganisations, présidé par le Département des affaires humanitaires, sur la question de l'utilisation des ressources militaires et de protection civile pour appuyer les opérations humanitaires.

30. Deuxièmement, la réforme de l'ONU est, comme l'a également indiqué le Haut Commissaire, une question importante qui doit être étudiée soigneusement et réclame une ouverture d'esprit. Le Conseil économique et social a adopté une résolution qui exige de tous les services intéressés qu'ils examinent la manière dont ils pourraient améliorer leur fonctionnement et le Département des affaires humanitaires, qui est investi de responsabilités particulières en application de cette résolution, travaille déjà avec d'autres organismes de l'ONU afin de veiller à ce que cet examen soit entrepris sans délai et avec la participation de tous.

31. Le troisième point concerne la relation entre les activités de secours, de reconstruction et de développement. Dans le cadre de son mandat, le Département des affaires humanitaires doit favoriser la transition d'une activité à une autre, mais l'expérience enseigne que celles-ci se déroulent le plus souvent simultanément plutôt que de façon linéaire. Cela représente un énorme travail d'apprentissage auprès des autres intervenants dans la sphère humanitaire et exige de ceux qui financent les travaux de reconstruction et de développement qu'ils assouplissent leurs critères de financement en fonction des besoins sur le terrain.

32. A cet égard, M. Griffiths a pris note avec un intérêt particulier de l'appel lancé par le Haut Commissaire pour la création d'un « troisième guichet » pour le financement des activités de relèvement d'urgence. Le Département des affaires humanitaires attend avec intérêt d'étudier, en collaboration avec le Haut Commissariat pour les réfugiés, les autres organismes et les gouvernements, d'autres moyens d'améliorer la performance dans ce domaine critique. Enfin, M. Griffiths tient à rendre hommage au Haut Commissaire pour la manière exemplaire dont elle s'est toujours acquittée de sa mission.

33. M. SINGH (Inde) dit que l'Inde reste fermement attachée aux principes de la Charte des Nations Unies et au programme du Haut Commissaire pour la protection internationale des réfugiés. L'intérêt qu'elle porte à tous les aspects de l'action du HCR trouve son origine dans son adhésion totale aux idéaux humanitaires. Fidèle à ses engagements, elle a toujours fourni secours et assistance aux réfugiés, puisant largement dans ses modestes ressources. Une autre caractéristique de la politique humanitaire traditionnelle de l'Inde tient au fait qu'elle a toujours veillé à ce que les réfugiés soient rapatriés de leur plein gré et avec l'accord des pays d'origine. L'Inde accueille actuellement des dizaines de milliers de réfugiés originaires de Sri Lanka et des Chittagong Hill Tracts (Bangladesh). Des accords ont été conclus avec les Gouvernements sri-lankais et bangladais et un processus de rapatriement librement consenti a déjà commencé.

34. La délégation indienne félicite le HCR pour la qualité de sa Note sur la protection internationale (A/AC.96/850) établie pour la présente session du Comité exécutif. Ce document décrit d'une manière précise et détaillée les multiples défis que doit relever le Haut Commissariat pour assurer une protection internationale à tous les réfugiés qui en ont besoin. L'Inde s'accorde avec le Haut Commissaire pour dire qu'il est nécessaire d'aborder d'une manière globale tout l'éventail des problèmes que rencontrent les réfugiés. Il faut notamment rendre les opérations de protection plus sûres et moins aléatoires, renforcer la solidarité internationale, étoffer les moyens dont disposent les Etats hôtes pour accueillir et protéger les réfugiés, trouver dans les pays d'origine des solutions durables aux problèmes qui engendrent des flux de réfugiés de façon à empêcher leur récurrence et créer un climat propice au rapatriement des réfugiés en garantissant leur sécurité et en instaurant des conditions favorables à leur réintégration.

35. Etant de plus en plus complexes, les causes des mouvements de populations nécessitent une action multiforme. Il faudra notamment intensifier la coopération internationale dans le domaine du développement pour réduire les inégalités économiques qui sont souvent à l'origine des flux migratoires. Tout en étant opposée à l'émigration clandestine, l'Inde estime que seule une conception libérale peut aider à résoudre les problèmes liés à l'afflux de réfugiés et de migrants en général. Ces problèmes doivent être abordés selon des critères universels et uniformes. A cet égard, la délégation indienne note avec satisfaction que dans le document d'information établi par le HCR il est souligné qu'une protection internationale efficace requiert une prise en compte de toutes les dimensions du problème et notamment des aspects juridiques et politiques et des impératifs du développement et de la sécurité.

36. S'agissant de la question des populations déplacées dans leur propre pays, il ne faut pas perdre de vue qu'il s'agit de personnes qui sont encore sous la juridiction administrative et territoriale d'un Etat. Toute évaluation de la situation doit être fondée sur un examen minutieux et objectif des circonstances. Le HCR ne doit intervenir que s'il a l'accord des autorités nationales.

37. En conclusion, la délégation indienne tient à réaffirmer son appui au programme du Haut Commissaire. Tout en étant consciente de la nécessité de doter le Haut Commissariat de ressources suffisantes, elle appelle l'attention sur les risques inhérents à une expansion démesurée du mandat du HCR. L'objectif devrait être plutôt de renforcer les moyens dont il dispose dans les domaines où il a déjà fait ses preuves.

38. M. SANCHEZ ARNAU (Argentine) dit que la présente session du Comité exécutif du HCR revêt une importance particulière pour deux raisons. En effet, il faudra y décider des réformes à apporter aux méthodes de travail du Comité exécutif et approuver les approches nouvelles, les restructurations et les systèmes de vérification qui sont nécessaires à la bonne marche des programmes d'intervention en faveur des réfugiés.

39. En ce qui concerne les principes directeurs de la protection internationale, le représentant de l'Argentine se félicite du document présenté par le secrétariat intitulé « Note sur la protection internationale » (A/AC.96/850), qui a le mérite de garder ouvert le dialogue entre les pays et le HCR afin de corriger la situation de vide juridique dans laquelle se trouvent les réfugiés dans le contexte d'afflux massifs, et ce au moyen d'une action concertée entre les Etats. Il est nécessaire, à cet égard, de mettre l'accent sur les mesures de prévention et d'alerte avancée, qui permettent à la communauté internationale d'anticiper les déplacements de populations.

40. La jurisprudence et l'action déployée par les Etats depuis des décennies ont permis d'établir un système solide de protection et de solidarité nationale grâce auquel on a pu faire face aux situations d'urgence de l'après-guerre ainsi qu'aux crises provoquées par l'afflux de réfugiés sous toutes les latitudes. La Convention américaine des droits de l'homme, le Pacte de San José de Costa Rica et la Déclaration de Carthagène sont venus s'ajouter à d'autres instruments en matière d'asile, comme la Convention de La Havane de 1928 et la Convention de Montevideo sur l'asile politique de 1933, pour constituer un apport juridique latino-américain à la protection du réfugié. Cependant, au-delà des instruments et des normes juridiques, c'est la pratique des Etats qui joue en faveur du respect des libertés fondamentales de l'homme, dans la mesure où ils assurent également la protection des personnes qui ne sont pas reconnues comme étant des réfugiés au sens strict du terme, comme c'est le cas de ceux qui sont déplacés à l'intérieur de leur propre pays ou des victimes des conflits armés.

41. La communauté internationale se trouve actuellement tiraillée entre deux tendances : d'un côté l'espoir d'élargir la portée de la protection et, d'un autre, la tentation du rejet. A cet égard, le représentant de l'Argentine constate, avec le Haut Commissaire, que le principe du non-refoulement n'est même pas respecté par des pays qui ont les moyens économiques de protéger la vie et l'intégrité des réfugiés.

42. Les efforts et les énormes sacrifices consentis par les pays voisins de la région des Grands Lacs qui ont accueilli des millions de réfugiés se sont soldés par une dégradation de l'environnement qui doit être suivie attentivement par la communauté internationale, d'autant qu'il s'agit de pays qui ne disposent pas des moyens voulus pour remédier à ces catastrophes. A cet égard, M. Sanchez Arnau relève que l'immense majorité des réfugiés s'installent dans des pays en développement et non dans des pays développés.

43. La communauté internationale doit accorder une attention particulière à la vulnérabilité des femmes et des enfants réfugiés ainsi qu'à la santé des réfugiés. A ce propos, l'Argentine souscrit aux recommandations figurant dans le document EC/SC.2/77 et insiste pour que les mesures concrètes de distribution de vivres aux femmes et de protection de ces dernières hors des camps de réfugiés soient appliquées sans délai.

44. L'Argentine a répondu positivement à l'appel lancé par le HCR pour que soient accueillis des contingents de réfugiés bosniaques sur son territoire et s'est mise en rapport avec le HCR pour étudier les modalités d'accueil de 150 familles. En outre, les « Casques blancs », volontaires qui sont actuellement opérationnels dans le cadre de différents projets en cours d'exécution - par exemple en Bolivie ou en Haïti - ou à l'étude - comme en Angola ou à Gaza - apporteront une précieuse contribution aux activités d'aide humanitaire internationale, dans le cadre des opérations de prévention ou d'intervention en cas d'urgence. Etant donné qu'un nombre croissant de pays se sont dotés d'équipes nationales de casques blancs, il serait opportun que le HCR ait recours à cette capacité. Pour sa part, l'Argentine se met à l'entière disposition du HCR pour analyser les besoins à cet égard.

45. Enfin, le représentant de l'Argentine tient à rendre hommage à l'abnégation du personnel du HCR ainsi qu'à la hauteur de vues du Haut Commissaire et félicite cette dernière de la décision de créer un poste de haut commissaire assistant chargé de la politique générale, de la planification et des opérations.

46. M. YIMER (Ethiopie) dit qu'un an après la dernière session du Comité exécutif, la situation des réfugiés dans le monde n'a fait qu'empirer. L'aggravation du conflit qui sévit dans la corne de l'Afrique et la déstabilisation que cela entraîne dans la région a rendu le problème encore plus complexe. C'est ainsi que plusieurs milliers de Somaliens ont dû fuir leur pays pour se réfugier dans les pays voisins, dont l'Ethiopie, de sorte qu'à l'heure actuelle celle-ci héberge environ 300 000 Somaliens, 59 000 Soudanais et un grand nombre de réfugiés provenant d'autres pays voisins.

47. L'Ethiopie, qui continuera d'honorer ses obligations et de se conformer aux dispositions des instruments de l'ONU et de l'Organisation de l'unité africaine auxquels elle a adhéré, tient à souligner les énormes pressions qui sont exercées sur les régions dans lesquelles des réfugiés continuent d'être accueillis. En effet, cette situation prélève un lourd tribut sur l'infrastructure, les services sociaux et l'environnement des lieux d'accueil. Certes, le Gouvernement éthiopien est reconnaissant au HCR pour l'initiative encourageante qu'il a prise à cet égard, mais il estime que l'aide fournie à l'Ethiopie sous forme de partage du fardeau est relativement insuffisante par rapport au nombre élevé de réfugiés qu'elle accueille. A cet égard, M. Yimer lance au HCR et à la communauté internationale des donateurs un appel pour qu'ils corrigent ce déséquilibre. S'agissant du rapatriement des réfugiés éthiopiens, M. Yimer tient à exprimer sa profonde gratitude au HCR pour une assistance et une collaboration qui ont permis le retour librement consenti de 965 000 personnes, et grâce auxquelles l'opération de rapatriement se poursuit.

48. Il a été créé, au sein de la nouvelle structure du gouvernement fédéral, une autorité chargée des affaires liées à la sécurité, à l'immigration et aux réfugiés qui est le seul organe habilité à formuler des politiques concernant les réfugiés, dans le respect des dispositions des conventions de l'ONU et de l'OUA et des protocoles y relatifs. Cette autorité procède actuellement à un réexamen du rôle, des responsabilités et de la structure de l'Administration chargée des affaires des réfugiés et des rapatriés (ARRA), principal partenaire d'exécution des programmes du HCR, en vue d'améliorer la mise en oeuvre des programmes en faveur des réfugiés.

49. S'il ne fait aucun doute que le rapatriement représente la solution la plus durable au problème des réfugiés, il ne peut en être ainsi que si cette opération est appuyée par des programmes d'aide au relèvement et à la remise en état des zones d'intégration des rapatriés. C'est pour cette raison que l'aide aux rapatriés doit être conçue dans une perspective plus globale en prenant en considération non seulement les besoins immédiats des intéressés, mais aussi les impératifs à moyen terme. Si les perspectives de rapatriement des réfugiés éthiopiens n'ont jamais été aussi bonnes, il faudrait néanmoins veiller à ce que l'assistance fournie soit proportionnelle aux besoins.

50. En ce qui concerne le rapatriement des réfugiés qu'elle héberge actuellement, l'Ethiopie a précisé à maintes reprises sa position, à savoir qu'elle collaborera volontiers aux opérations de rapatriement sitôt que la situation dans les pays d'origine permettra le retour des réfugiés dans des conditions de sécurité et de dignité. C'est ainsi qu'à la demande d'un comité technique composé de représentants des pays donateurs et du HCR, le Gouvernement éthiopien a préparé le rapatriement des réfugiés dans le nord-ouest de la Somalie. Cette opération devait prendre fin le 31 mars 1995, mais les violents affrontements qui ont éclaté en novembre 1994 ont provoqué, dans l'est de l'Ethiopie, un nouvel afflux de réfugiés en provenance du nord-ouest de la Somalie. Le Gouvernement éthiopien n'en est pas moins prêt à collaborer à leur rapatriement dès que les conditions s'y prêteront.

51. A propos de la corne de l'Afrique, le Gouvernement éthiopien a toujours prôné la recherche de solutions régionales aux problèmes politiques, économiques et sociaux de la région. A cet égard, les chefs d'Etat des pays de la corne réunis au sommet à Addis-Abeba en 1992 ont adopté un cadre régional d'intervention et un plan d'action afin de remédier aux conséquences des nombreuses catastrophes naturelles ou provoquées par l'homme que connaît la région, y compris les situations d'urgence créées par les afflux de réfugiés. Evénement historique en ce qui concerne la coopération régionale, ce sommet a ouvert la voie à la consolidation et à l'élargissement du mandat de l'Autorité intergouvernementale sur la sécheresse et le développement (IGADD). En effet, cet organisme pourra, notamment, renforcer les capacités de la région de gérer efficacement les conflits, de prévenir les catastrophes naturelles, ou du moins d'en atténuer les effets, et d'élaborer des stratégies permettant de résoudre de façon durable les situations de réfugiés. Grâce à une IGADD revitalisée, les pays de la corne de l'Afrique pourront désormais trouver des solutions communes à des problèmes communs, dont celui des réfugiés.

52. Pour M. MACRIS (Observateur de Chypre), le tableau qui a été dressé de la situation des réfugiés est consternant. On a observé dans le monde un accroissement considérable des conflits qui se sont traduits par une augmentation toujours plus grande du nombre des réfugiés, des personnes déplacées et des personnes se trouvant dans une situation similaire à celle des réfugiés. Il faut apporter d'urgence une aide à toutes ces catégories de personnes. Le Haut Commissaire a indiqué la veille qu'au cours des dernières semaines près d'un demi-million de personnes avaient été déplacées du fait de la guerre et de la violence dans l'ex-Yougoslavie.

53. Les risques de conflit restent élevés partout dans le monde, y compris en Europe, et il ne faudrait donc ménager aucun effort pour les prévenir et remédier aux problèmes aussi rapidement que possible. Ce devrait être une priorité pour la communauté internationale et en particulier pour les nations qui sont en mesure de se faire entendre ainsi que pour les organisations internationales chargées des questions humanitaires. Il faudrait insister sur la dignité et la valeur de la personne humaine, sur les droits de l'homme et sur le respect de normes minimales.

54. Evoquant ensuite le rapport sur les activités du HCR à Chypre (A/AC.96/846/Part V/4), l'observateur de Chypre dit que le Gouvernement et le peuple chypriotes sont très reconnaissants au Gouvernement des Etats-Unis de financer généreusement le programme du HCR à Chypre par une contribution annuelle de 10 millions de dollars. Ils sont aussi reconnaissants au HCR de continuer à jouer un rôle de coordination dans le cadre du programme d'assistance humanitaire des Nations Unies aux personnes déracinées et déplacées depuis l'invasion turque de 1974, en développant les projets intéressant les deux communautés et en renforçant les liens qui se nouent entre elles. Malgré les problèmes qu'elle rencontre pendant la période considérée, Chypre s'est acquittée de ses obligations humanitaires vis-à-vis des réfugiés dans le besoin et vulnérables, conformément à la Convention de 1951 et à son Protocole de 1967. A cet égard, le Gouvernement chypriote a accueilli avec satisfaction la tenue sur le sol chypriote du deuxième séminaire sur le droit des réfugiés organisé par le HCR en janvier 1995. Ce séminaire a permis de mieux faire connaître les instruments internationaux relatifs au statut de réfugié.

55. La délégation chypriote tient à rendre hommage au Haut Commissaire pour le dévouement avec lequel elle s'acquitte de sa tâche difficile, ainsi qu'à ses collaborateurs compétents et dévoués, tant au siège que sur le terrain. Elle tient tout particulièrement à remercier le chef du bureau régional du HCR pour l'Asie du Sud-Ouest, l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient ainsi que le personnel du HCR qui participe aux activités concernant Chypre. Elle souhaite enfin remercier le chef de la mission du HCR à Chypre qui vient de prendre sa retraite après de longues années d'une collaboration constructive et fructueuse avec ses partenaires chypriotes.

56. M. LILLO (Observateur du Chili) tient à féliciter le Haut Commissaire pour le dévouement dont elle fait preuve à l'égard des réfugiés et remercie le Haut Commissariat de la documentation précieuse qu'il a établie pour la session, en ce qui concerne en particulier la protection internationale des réfugiés. Le Chili espère comme le Haut Commissaire qui, dans son allocution liminaire, a dressé un vaste tableau de la situation dans le monde au plan humanitaire, et à l'instar des autres délégations, que les ébauches de solutions à l'un des plus graves conflits actuels, celui de l'ex-Yougoslavie, déboucheront rapidement sur des résultats positifs et qu'une paix durable s'établira dans cette zone de troubles.

57. Le Chili espère aussi que sur le continent africain, l'action humanitaire débouchera sur des résultats positifs et ouvrira la voie au relèvement après la vague de violences qui a déferlé sur le Rwanda et d'autres pays de la région des Grands Lacs. Il voit cependant avec inquiétude se profiler la tendance à une conception étroite des notions de réfugié et d'asile, au mépris des principes essentiels soutenus par le HCR, tels que le non-refoulement à la frontière, la protection internationale et le rapatriement librement consenti. Il importe donc de réfléchir sérieusement aux causes de ce phénomène et de réaffirmer les engagements politiques de manière à inverser ces tendances dont le renforcement ne ferait qu'entamer fortement la solidarité internationale et multiplier les dangers et les souffrances auxquels sont exposés les réfugiés. Le système de protection et d'action humanitaire se heurte à un dilemme préoccupant : le fait que les Etats accordent moins souvent le droit d'asile reflète non pas tant une diminution des cas qui justifieraient sa reconnaissance que des pratiques restrictives, comme le confirme l'augmentation alarmante du nombre de personnes déplacées à l'intérieur des frontières nationales.

58. Aux persécutions motivées par les convictions politiques ou l'opposition à un régime déterminé, à l'origine des courants de réfugiés que l'on a connus tout au long de la guerre froide, ont succédé bien souvent, entre autres problèmes, les déficiences du développement social, source des graves crises humanitaires génératrices des mouvements de réfugiés actuels, d'où l'importance de la prévention. Il est évident que les problèmes humanitaires les plus récents sont la conséquence de graves tensions sociales qui exigent une autre réponse que de simples secours humanitaires. On ne peut nier que ce type d'aide est crucial pour sauver des vies aux pires moments de la violence et qu'il faut donc poursuivre l'action en ce sens, mais la recherche de solutions durables s'impose et ce, dans le cadre d'un effort concerté pour s'attaquer tant aux causes qu'aux effets des mouvements massifs de réfugiés et de personnes déplacées. Il ne fait aucun doute que le règlement de nombre des problèmes humanitaires est tributaire de la paix et de la sécurité ainsi que du développement économique et social. Plus que jamais développement et paix sont interdépendants. Les drames récents s'expliquent par la détérioration de la situation sociale, la violence génocide, les atteintes graves à l'environnement, les énormes problèmes sanitaires, l'exclusion ethnique et raciale, phénomènes révélateurs du degré de mépris que l'on a pour la sécurité de la personne.

59. Comme le Chili l'a déjà dit, les secours humanitaires ne sauraient se substituer à des investissements dans le développement social. Les secours humanitaires tels qu'ils sont actuellement conçus permettent seulement d'assurer la survie de ceux qui en bénéficient. Les investissements dans le domaine social autour desquels devrait s'articuler la prévention, devraient contribuer efficacement à empêcher les crises ou au moins à en diminuer la fréquence tout en favorisant l'épanouissement de l'être humain. Il est certain qu'à long terme ces types d'investissements s'avéreront plus rentables tant pour les donateurs que pour les bénéficiaires. C'est pourquoi, de concert avec le HCR, les organismes des Nations Unies devraient étudier les drames humanitaires dus à de graves problèmes de détérioration de la situation sociale et analyser les coûts de l'ensemble des activités d'assistance humanitaire - y compris les conséquences économiques de ces drames dans les pays d'origine et les pays d'accueil - en les comparant aux effets qu'exercerait l'affectation des sommes correspondantes sur le développement social desdits pays. Une telle étude, si elle était largement diffusée, devrait avoir des retombées positives non seulement au plan de la définition des politiques d'aide mais aussi en sensibilisant mieux l'opinion aux avantages que procurent à long terme les investissements dans le développement économique et social.

60. Principal coordonnateur de l'action humanitaire, le HCR doit bénéficier d'une interprétation plus large de son mandat afin d'être mieux à même de répondre aux problèmes toujours plus graves des personnes déplacées à l'intérieur des frontières nationales. Il est urgent que les gouvernements s'en préoccupent. Les Déclarations de San José et de Carthagène peuvent être des éléments précieux à cet égard.

61. De même, il est essentiel de renforcer les bases sur lesquelles s'appuie l'action du HCR, en préservant le caractère pacifique, apolitique et exclusivement humanitaire de sa mission et en continuant à garantir le respect des principes de non-refoulement aux frontières et de non-renvoi, le rapatriement individuellement et librement consenti, le regroupement des familles et le maintien de la protection internationale.

62. En dehors d'un passé récent, le Chili, animé d'un sentiment de solidarité, est traditionnellement une terre d'accueil et d'asile. Aussi est-il prêt à répondre favorablement à l'appel lancé par le HCR, invitant les Etats à accueillir des réfugiés bosniaques.

63. M. HADZIOMERAGIC (Observateur de la Bosnie-Herzégovine) dit que le Gouvernement de Bosnie-Herzégovine approuve pour l'essentiel les principes et lignes d'action qui ont été proposés par le Haut Commissaire et coopérera avec elle dans tous les domaines visés. Le gouvernement étudie ces principes ainsi que les solutions possibles et les problèmes escomptés. Il a déjà pris certaines mesures. Pour faciliter le rapatriement, il a adopté plusieurs lois et programmes et arrêté les modalités concrètes. Le rapatriement s'effectuera selon un programme établi, dans toute la mesure possible dans des conditions de dignité, d'égalité et de sécurité. Il se déroulera en plusieurs phases et dans les zones sûres. Les personnes déplacées et les réfugiés pourront récupérer les biens dont ils ont été privés lors de l'épuration ethnique et recevront une aide appropriée pour construire ou reconstruire leur maison. Le Gouvernement de Bosnie-Herzégovine fournira des renseignements complets et actualisés sur les droits, conditions et procédures de rapatriement des personnes déplacées et des réfugiés. Il est indispensable de bien planifier, exécuter et surveiller cette opération, en étroite coopération avec le Gouvernement de Bosnie-Herzégovine. En l'absence d'une coordination de tous les instants entre les donateurs, le gouvernement et les organismes et organisations d'exécution, les résultats ne manqueront pas de laisser à désirer. Le retour des personnes les plus courageuses, principalement parmi les personnes déplacées a déjà commencé en direction des territoires libérés.

64. Nul n'ignore les conséquences de la cruelle agression serbo-monténégrine contre la République de Bosnie-Herzégovine, qui a fait officiellement 200 000 tués ou disparus, bosniaques pour la plupart et à peu près autant de blessés. Plus de 1,2 million de personnes ont été expulsées de chez elles et plus de 800 000 ont dû se réfugier en dehors de Bosnie-Herzégovine. Le parc de logements est détruit à plus de 50 %, l'économie de la République est ruinée et plus de 3 millions de mines antipersonnel et autres ont été posées un peu partout sur le territoire.

65. L'Observateur de la Bosnie-Herzégovine informe le Comité exécutif de ce que les autorités de son pays considèrent comme les problèmes les plus importants. Premièrement, l'expulsion de la population non serbe se poursuit. Par suite des récentes opérations d'épuration ethnique sur les territoires contrôlés par les terroristes serbes, plus de 25 000 personnes ont été expulsées vers la Croatie. Aucune organisation internationale n'a à ce jour réussi à empêcher ce type de génocide. Les terroristes serbes ont commencé à faire officiellement de ce type de crime leur objectif et ont à cette fin fait venir des unités paramilitaires spéciales de Serbie. La Bosnie-Herzégovine appelle instamment le HCR à prendre les mesures nécessaires pour protéger ceux qui sont victimes de tels actes et à présenter au Tribunal international des preuves attestant de ces expulsions.

66. Deuxièmement, les habitants de l'enclave de Gorazde vivent complètement isolés depuis quatre ans et dépendent exclusivement de l'assistance du HCR. La situation humanitaire s'est surtout détériorée au cours des trois derniers mois parce que les terroristes serbes empêchent les convois d'atteindre cette région. Les 70 000 habitants de l'enclave doivent recevoir sans plus tarder des vivres, des vêtements, des chaussures, des médicaments et du combustible et bénéficier le cas échéant de moyens d'évacuation médicale, faute de quoi l'hiver prochain risque d'être tragique pour beaucoup d'entre eux. Ils ne peuvent attendre un accord de paix définitif.

67. Troisièmement, les autorités de Bosnie-Herzégovine n'ont pas réussi à résoudre les problèmes des dizaines de milliers d'habitants extrêmement vulnérables de Srebrenica et Zepa, zones de sécurité remises par l'ONU entre les mains des barbares. Plus de 10 000 d'entre eux sont encore portés disparus. Plus de 3 000 ont été tués par les terroristes serbes. La recherche des personnes disparues de Srebrenica et Zepa a échoué; le HCR et le CICR ont peu fait dans ce domaine. La Bosnie-Herzégovine les exhorte à retrouver, enregistrer et protéger ces personnes. Les problèmes de logement des personnes déplacées de Srebrenica et Zepa n'ont pas non plus été résolus et l'équipe spéciale créée pour ces zones doit donner un nouveau rythme à ses activités.

68. La Bosnie-Herzégovine a le sentiment que la plupart des organisations humanitaires et des principaux pays d'Europe continuent à traiter le conflit dans l'ex-Yougoslavie comme s'il s'agissait d'une guerre civile ou d'une guerre ethnique et religieuse. Ce postulat faux et dangereux a prolongé les souffrances et compliquera le règlement du problème sur les plans tant politique qu'humanitaire. En lisant les documents établis pour la session du Comité exécutif, en écoutant les orateurs qui y participent et en suivant le processus de médiation engagé pour instaurer la paix dans la région, on a nettement le sentiment que le problème n'est pas perçu dans son intégralité. Dans le souci d'apaiser les instigateurs et les auteurs des pires atrocités commises depuis la deuxième guerre mondiale, on se garde bien de trancher le noeud gordien et de démanteler le régime fascisant des Serbes terroristes de Pale. Pourtant, selon un rapport de la CIA remontant à mars 1994, 90 % des atrocités commises dans la région sont le fait de bandes militaires ou paramilitaires serbes ou de seigneurs de la guerre locaux. Or on ne peut imaginer qu'une société civile puisse voir le jour sans que soient éliminées les menaces les plus graves qui pèsent sur elle.

69. L'avenir proche montrera si la communauté internationale est capable de faire un véritable pas dans le sens de la pacification de la région pour ouvrir la voie à la réconciliation et à la démocratisation. Si ce n'est pas le cas, chacun - et l'Europe avant tout - devra faire face à la plus lourde tâche imaginable pour prévenir la prolifération du fascisme et le déclenchement de réactions en chaîne dans les Etats baltes, en Moldavie ou en tout autre endroit.

70. La Bosnie-Herzégovine demande aux organisations humanitaires de suivre de près le processus de paix, d'exiger que le cadre dans lequel elles sont censées agir soit clairement défini et de ne pas permettre aux politiciens de leur imposer des conditions quasiment impossibles à remplir, qui mettraient en cause le rôle du HCR, du CICR ou d'autres organismes. Ce sont en définitive des civils innocents qui seraient victimes de ces politiques restrictives, décidées par des politiciens à la vision étroite.

71. Le Gouvernement de Bosnie-Herzégovine appuiera sans réserve tous ceux qui luttent pour une paix juste et durable ouvrant la voie à la réconciliation et à la démocratisation non seulement dans la République de Bosnie-Herzégovine mais sur l'ensemble du territoire de l'ex-Yougoslavie. Enfin, M. Hadziomeragic rend hommage au personnel du HCR et des ONG qui, depuis quatre ans, s'emploie sans relâche à améliorer les conditions de vie du peuple de Bosnie-Herzégovine.

72. M. SLIPCHENKO (Observateur de l'Ukraine) constate que la communauté internationale continue de se heurter aux multiples problèmes que posent le phénomène des réfugiés et les mouvements de populations forcés et massifs, qui restent d'une ampleur considérable et affectent d'une manière ou d'une autre la majorité des pays. On ne peut relever tous les nouveaux défis dans ce domaine en se contentant de suivre les approches juridiques et organisationnelles traditionnelles et l'Ukraine fait sienne la volonté du Haut Commissaire de redynamiser en permanence la philosophie et les modalités de fonctionnement du HCR.

73. L'Ukraine est sensible à la gravité de la crise humanitaire mondiale. Elle doit faire face à des problèmes hérités du passé ou provoqués par l'état actuel des choses. Elle offre refuge à des dizaines de milliers de réfugiés qui fuient des zones de conflit armé dans les Etats voisins de l'ex-URSS ainsi qu'à des réfugiés d'autres pays. Elle est consciente de l'obligation morale qu'elle a de leur assurer une protection et une assistance, dans les limites de ses ressources économiques et sociales. Le Parlement ukrainien a ainsi adopté une loi sur les réfugiés qui reprend les normes internationales fondamentales en vigueur dans ce domaine et a créé les institutions chargées de sa mise en oeuvre et de l'élaboration des procédures juridiques correspondantes. La délégation ukrainienne espère que le bureau du HCR en Ukraine pourra développer ses activités et fournir une assistance plus substantielle à ces institutions.

74. Les préparatifs de la conférence sur les réfugiés dans la Communauté d'Etats indépendants devraient donner un nouvel élan à la coopération entre l'Ukraine et le HCR. L'Ukraine partage l'avis formulé dans la note d'information établie à ce sujet par le secrétariat selon lequel ce processus doit avoir un caractère humanitaire et apolitique et viser à élaborer une stratégie intégrée pour la région de la CEI moyennant la rédaction d'une déclaration de principes et d'un programme d'action. Il sera particulièrement important de donner suite aux décisions que prendra la conférence pour qu'elles ne demeurent pas lettre morte. Il est aussi très important que la stratégie susmentionnée tienne compte des besoins immédiats des pays de la région et de leurs objectifs à long terme, de la recherche de solutions et de la prévention de sorte que ces pays puissent relever les défis lancés par les migrations. Il va de soi également que leurs efforts présents et futurs en ce sens, essentiels pour la stabilité régionale et mondiale, méritent d'être soutenus par tous les Etats intéressés, comme par la communauté internationale dans son ensemble. Les entretiens qui suivront les réunions préparatoires devront être encore plus ciblés et plus dynamiques, de façon à ce que la conférence puisse se tenir au plus tard à la mi-1996.

75. Le processus préparatoire a permis de faire mieux comprendre aux partenaires de l'Ukraine l'un des problèmes les plus poignants auxquels elle est confrontée et qui concerne la poursuite du rapatriement des populations expulsées autrefois de son territoire par l'ancien régime totalitaire de l'ex-URSS. Depuis le début des années 90, Tatars de Crimée, Allemands, Grecs et autres sont revenus en masse, la plupart d'entre eux pour se rendre en Crimée, région qui a déjà accueilli 240 000 Tatars de Crimée et 12 000 membres d'autres groupes ethniques. Beaucoup d'autres sont prêts à les suivre. Le simple nombre de rapatriés donne une idée de l'ampleur de la tâche à réaliser pour assurer leur intégration, compte tenu en particulier de la complexité de la situation économique, sociale et politique. Conscientes depuis longtemps de la gravité de la situation, les autorités ukrainiennes ont, malgré de graves contraintes budgétaires, accordé une aide financière et matérielle aux rapatriés pour faciliter leur réinsertion et préserver le climat de paix et de tolérance qui règne dans la péninsule. Le Comité des droits de l'homme a d'ailleurs pris acte récemment du bilan positif de l'Ukraine à cet égard.

76. Outre les mesures déjà prises pour mettre au point des infrastructures adéquates et garantir aux anciens déportés l'exercice de leurs droits politiques, le Gouvernement ukrainien a élaboré un programme de réinstallation des Tatars de Crimée et autres groupes intéressés qui contribuera non seulement à assurer leur protection mais aussi à créer de nouveaux emplois et des conditions favorables à la restauration et au développement de leur culture notamment. Les troubles survenus récemment en Crimée ont cependant mis en lumière l'insuffisance des ressources financières disponibles pour assurer leur réinstallation et répondre à leurs besoins fondamentaux.

77. Le problème des peuples qui ont été victimes de déportation ne concerne pas seulement l'Ukraine et le dialogue doit se poursuivre avec les Etats où ils ont résidé pendant plus de 50 ans et à la prospérité desquels ils ont largement contribué, à savoir le Kazakhstan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, la Fédération de Russie et d'autres Etats, en vue de signer des accords et de renforcer la coopération. Pour l'instant, l'Ukraine est seule à assumer le coût de leur réinstallation, évalué pour les seuls Tatars de Crimée à plus de 250 millions de dollars des Etats-Unis. Seule l'Ukraine a ratifié un accord concernant les questions relatives au rétablissement des droits des déportés signé en 1992 par les pays de la CEI. Le Président de l'Ukraine a donc proposé de revoir le problème au prochain sommet de la CEI. L'Ukraine considère par ailleurs que le HCR et d'autres organismes spécialisés des Nations Unies ont un rôle important à jouer à cet égard, en faisant prendre conscience à la communauté internationale de la gravité de la situation ainsi qu'en intervenant directement aux côtés des institutions ukrainiennes, d'autres organisations internationales, des ONG et de la communauté des donateurs. Si cette action concertée s'avérait fructueuse, elle pourrait être un bon exemple de stratégie préventive.

78. Mme RODRIGUES (Observateur du Mozambique) dit que le bon déroulement des préparatifs des premières élections générales pluripartites à se tenir au Mozambique a facilité le retour de plus de 1,7 million de Mozambicains, la plus grosse opération de rapatriement jamais effectuée avec succès par le HCR. Les rapatriés participent maintenant avec enthousiasme et détermination à des projets visant à assurer leur réinsertion sociale et économique et, par conséquent, la reconstruction nationale. Le Mozambique remercie à nouveau le HCR, les organisations intergouvernementales, les ONG et les pays donateurs qui ont permis le succès de l'opération. Outre le déminage, la réinsertion des rapatriés, des personnes déplacées à l'intérieur du territoire et des soldats démobilisés, représente un enjeu considérable, capital pour le renforcement de la paix et de la démocratie.

79. Le Mozambique appelle la communauté internationale à appuyer jusqu'au bout le programme du HCR au Mozambique qui consiste essentiellement en projets à impact rapide axés davantage sur la création de services de base dans les zones où s'installent les rapatriés que sur les rapatriés eux-mêmes, pour faire la soudure avec les programmes de développement à moyen et à long terme. Ces activités qui devraient s'achever en juin 1996, risquent d'être très fortement réduites si les 13 millions de dollars qui manquent à leur financement ne sont pas trouvés, ce qui pourrait avoir des conséquences graves et imprévisibles.

80. Malgré les énormes difficultés économiques et sociales que connaît le Mozambique, l'instauration de la paix et de la stabilité dans le pays s'accompagne d'un mouvement continu d'étrangers en quête d'asile. En peu de temps, plus de 200 demandeurs d'asile de divers pays africains sont entrés au Mozambique. Si l'on veut que le Mozambique puisse faire face aux obligations internationales qui lui incombent, il faudra lui en donner les moyens. Dès à présent, attaché aux principes humanitaires, le gouvernement a décidé de créer, avec l'appui du HCR, un comité chargé de la détermination rapide du statut de réfugié.

81. Le Mozambique n'oubliera jamais la solidarité dont il a bénéficié de la part des pays voisins et de la communauté internationale pendant la période dramatique qu'il a traversée. Il est prêt à partager les leçons qu'il a tirées du passé pour trouver des solutions aux conflits qui font des milliers de victimes et causent des déplacements massifs de populations. Préoccupé par l'intensification des conflits politiques et militaires en Afrique et en Europe, plus précisément dans la région des Grands Lacs et dans l'ex-Yougoslavie, il est cependant convaincu que les efforts concertés consentis par les parties en conflit elles-mêmes et par la communauté internationale pour supprimer les causes desdits conflits déboucheront sur des résultats positifs.

82. M. BADJIE (Observateur de la Gambie) dit qu'au vu des multiples guerres civiles, conflits, troubles, persécutions et autres formes de catastrophes qui ne cessent de faire augmenter le nombre des réfugiés et des personnes déplacées à travers le monde, le rôle du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ne devrait pas se limiter à la fourniture d'une protection et d'une assistance humanitaire de base, à la création de zones de réinstallation ou au rapatriement. Le HCR devrait aussi s'employer à découvrir et à analyser les causes de ces crises et étudier les moyens d'y mettre fin; il devrait participer à la signature d'accords de paix et de cessez-le-feu et devrait s'occuper d'autres problèmes pertinents tels que les atteintes aux droits de l'homme des réfugiés. Un problème particulier qui se pose au HCR et à ses collaborateurs tient à la nécessité de faire la distinction entre les réfugiés authentiques et les personnes qui émigrent pour des raisons économiques. En effet, la charge que ces « migrants économiques » font peser sur le Haut Commissariat et les pays d'asile pourrait être notablement réduite par la mise en place de systèmes de sélection efficaces.

83. Bien que la Gambie ne soit pas membre du Comité exécutif et ne compte pas parmi les pays auxquels le HCR accorde une attention prioritaire, elle doit faire face, elle aussi, à quelques problèmes de réfugiés. Réputée depuis toujours pour la paix qui règne sur son territoire et l'hospitalité de sa population, la Gambie accueille des réfugiés de la Sierra Leone, du Libéria et du Sénégal, sans compter les rapatriés gambiens. Les réfugiés sierra-léoniens, au nombre environ d'un millier, ont fui pour la plupart la région de Kono où sévit une rébellion. Ils ont commencé à arriver en février 1995 et se sont en majorité regroupés dans la région située en amont du fleuve, où le bureau du HCR à Dakar fait construire un camp à leur intention. Leur rapatriement dépendra de l'issue des élections générales qui doivent avoir lieu dans leur pays. Les réfugiés sénégalais ont fui la Casamance, elle aussi en proie aux incursions de rebelles. Ils sont maintenant plus d'un millier, dont une majorité de femmes et d'enfants défavorisés et n'ont guère de chances de pouvoir rentrer chez eux tant que le Gouvernement sénégalais et les rebelles ne seront pas assis à une table de négociation. L'arrivée de réfugiés libériens a coïncidé avec le début des troubles dans leur pays en 1989. Peu nombreux, ils ont été hébergés dans un premier temps dans les locaux de la Croix-Rouge, avant d'être autorisés à se mêler à la population gambienne. Quant aux rapatriés et personnes déplacées gambiens, ce sont pour la plupart des Sarehulles qui étaient partis en Sierra Leone et au Libéria à la recherche de meilleurs pâturages. Ils ont commencé à rentrer quand ils ne se sont plus sentis en sécurité dans les zones de conflit susmentionnées. D'après les statistiques, ils sont environ 6 000 et plus de la moitié sont nés en Sierra Leone et au Libéria.

84. La Gambie a classé les besoins de ces réfugiés et rapatriés en deux catégories : besoins immédiats (vivres, vêtements et soins médicaux) et besoins à long terme (éducation des enfants, activités génératrices de revenu y compris la promotion de l'autosuffisance et agriculture). Elle souhaiterait que le HCR s'occupe en outre de leur fournir des possibilités de formation professionnelle et d'apprentissage pour les préparer à leur vie future. La prise en charge des réfugiés en Gambie est principalement assurée par le gouvernement, le bureau du HCR à Dakar, la Croix-Rouge gambienne et les unités de développement de la Mission anglicane. C'est le gouvernement qui leur alloue des terres pour s'installer et assure leur sécurité et leur protection avec l'aide du bureau du HCR et des services de police et d'immigration. Les réfugiés ont accès aux hôpitaux et dispensaires publics.

85. Le gouvernement leur a récemment témoigné sa sollicitude en faisant un don d'environ 3 000 sacs de farine à la Croix-Rouge gambienne. Actuellement, le HCR, par le biais de la Croix-Rouge gambienne et des unités de développement de la Mission anglicane, s'emploie principalement à enregistrer les réfugiés, ainsi qu'à satisfaire leurs besoins de base, notamment en vivres et abris. Les autorités gambiennes comptent aussi sur la collaboration du Programme alimentaire mondial. Si l'on regarde le chiffre brut des réfugiés et des personnes déplacées en Gambie, on peut avoir l'impression qu'il ne justifie pas une attention ou une assistance prioritaires de la part du HCR. Mais l'accueil des réfugiés et des rapatriés continue à peser très lourd sur les maigres ressources nationales. Aussi la Gambie lance-t-elle un appel au HCR pour qu'il étudie la possibilité d'accroître et d'améliorer son assistance en faveur de ces divers groupes.

86. Enfin, M. Badjie se joint aux précédents orateurs pour exhorter le HCR à tenir compte de toutes les critiques constructives qui ont été faites au cours de cette quarante-sixième session du Comité exécutif concernant la formulation, l'exécution et l'évaluation des programmes et projets. Il invite aussi la communauté internationale et les pays donateurs à faire preuve de plus de tolérance et de patience, à répondre aux besoins des pays d'accueil et des réfugiés et à faire en sorte que le HCR s'attèle dans un esprit d'ouverture à sa tâche et que l'ONU fasse de la planète un monde meilleur pour l'humanité.

87. Mme MHLANGA (Lesotho) dit que depuis la disparition de l'apartheid en Afrique du Sud, le nombre de personnes cherchant à obtenir l'asile politique au Lesotho a considérablement décru, ce qui ne veut pas dire que le problème des réfugiés originaires de ce pays soit totalement résolu. Les troubles qui persistent, notamment dans la province du Kwazulu Natal, nécessitent une grande vigilance de la part du Lesotho qui se fait un devoir de respecter ses obligations internationales. La situation est également préoccupante au Burundi, au Rwanda, au Libéria, en Angola et au Soudan et dans beaucoup d'autres pays. La politique du Lesotho à l'égard des réfugiés est régie par la loi de 1983 sur les réfugiés et les règlements de 1986 concernant les réfugiés, qui visent notamment à répondre aux situations d'urgence. En vertu de la loi de 1983, il a été créé un comité interministériel pour la détermination du statut de réfugié qui est chargé d'examiner les demandes et d'enregistrer les personnes reconnues comme réfugiées au titre de la loi et de conseiller le ministère en la matière. Avec la diminution du nombre des demandes, les activités de ce comité se sont beaucoup ralenties.

88. Le gouvernement a pour politique d'intégrer les réfugiés dans la société plutôt que de les parquer dans des camps. Tous ceux qui en ont l'aptitude sont encouragés à s'établir de manière indépendante ou à prendre un emploi lucratif pour pouvoir subvenir à leurs besoins. La plupart des réfugiés qui se trouvent actuellement au Lesotho sont des personnes à qui le statut de réfugié a été reconnu au titre des Conventions internationales et à qui on a offert l'asile politique dans d'autres pays, mais qui restent au Lesotho pour y poursuivre une formation ou des études. Ils sont principalement originaires de l'Ouganda, du Soudan, du Burundi, du Rwanda et du Zaïre, preuve que la distance entre les pays ne constitue aucunement un obstacle pour les demandeurs d'asile. Ceux-ci considèrent souvent que le pays le plus proche ne leur offre pas la sécurité requise, ce qui tend à remettre en question la prise en considération systématique du pays de premier asile aux fins de la détermination de leur statut. Le gouvernement travaille en coopération étroite avec le Conseil des organisations non gouvernementales du Lesotho qui coordonne le Programme PARinAC (partenariat en action) et espère pouvoir ainsi combler les lacunes qui existent et établir des plans d'action bien définis. Le Représentant régional adjoint du HCR qui s'est rendu dernièrement au Lesotho a promis d'assurer aux fonctionnaires des services d'immigration chargés de recevoir les demandeurs d'asile la formation dont ils avaient besoin et qui devrait les aider à traiter humainement les demandeurs d'asile et à faire plus facilement la distinction entre réfugiés authentiques et opportunistes.

89. M. MWEISUMO (République-Unie de Tanzanie) note que la situation en Afrique, qui est le continent où l'on compte le plus grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées, a continué à se dégrader. Dans la région des Grands Lacs en particulier, des pays pauvres ont été amenés, par les hasards de la géographie, à accueillir des flux énormes de réfugiés dépassant les 2 millions de personnes. Fidèle à sa tradition d'hospitalité qui lui a fait recevoir successivement des réfugiés mozambicains, angolais, zimbabwéens, namibiens ou sud-africains fuyant l'oppression coloniale et raciale, la République-Unie de Tanzanie héberge encore actuellement sur son sol 1,4 million de réfugiés principalement originaires du Rwanda et du Burundi. Cela représente pour le pays une charge énorme qui pèse très lourdement sur l'environnement et les structures économiques et sociales. Cette situation est encore aggravée par le fait qu'un certain nombre d'éléments indésirables, miliciens ou même instigateurs des massacres au Rwanda, se sont glissés parmi les demandeurs d'asile et sont venus semer la haine et l'anarchie sur le territoire tanzanien, terrorisant les réfugiés authentiques, les empêchant de rentrer chez eux et faisant régner la peur parmi la population tanzanienne des villages proches des camps. Il faut ajouter à cela des heurts avec l'armée burundaise qui ont conduit à la fermeture de la frontière avec le Burundi.

90. Le Gouvernement de la République-Unie de Tanzanie est convaincu, qu'à long terme, la seule solution viable au problème des réfugiés est leur rapatriement dans leur pays d'origine. La mise en oeuvre des principes définis aux sommets de Nairobi et de Bujumbura sur le problème des réfugiés dans la région des Grands Lacs contribuerait grandement à la restauration d'une paix durable dans la région. La communauté internationale devrait en particulier donner suite à la décision de créer des couloirs de passage sûrs et des zones de sécurité sous surveillance internationale à l'intérieur du Rwanda pour encourager les réfugiés à rentrer chez eux. Le HCR peut jouer un rôle important à cet égard en redonnant confiance aux réfugiés et en les persuadant qu'ils peuvent se rendre dans ces zones de sécurité sans craindre de représailles.

91. Dans le cadre des efforts qu'il déploie pour trouver une solution durable au problème des réfugiés, le Gouvernement tanzanien a aussi offert ses services en vue de la création du Tribunal international pour le Rwanda. Il est prêt en outre à s'occuper de faire le tri entre les personnes soupçonnées d'avoir organisé et perpétré le génocide et les assassinats politiques au Rwanda et les réfugiés authentiques, afin que les premiers puissent être jugés soit au Rwanda même, soit par le Tribunal international à Arusha. Pour s'acquitter de cette tâche, il aurait cependant besoin de l'appui financier et logistique de la communauté internationale. Celle-ci a malheureusement tendance, lorsqu'il se pose un problème de réfugiés, à considérer que les pays d'asile, si pauvres soient-ils, doivent faire face à leurs obligations humanitaires, y compris aux dépens de leurs propres droits et intérêts nationaux. Mais le premier devoir d'un Etat n'est-il pas de se préserver et de protéger les droits de ses citoyens ? La communauté internationale doit en tenir compte et ne pas avoir, sur ce plan, deux poids, deux mesures. La République-Unie de Tanzanie peut se targuer d'avoir dûment rempli son rôle à l'égard des réfugiés, y compris dans des circonstances très difficiles, mais souhaiterait que les donateurs continuent à l'aider à s'acquitter pleinement de ses obligations, notamment dans le cadre du rapatriement de ces réfugiés.

92. M. BIN GHANEM (Observateur du Yémen) dit qu'ainsi que l'ont souligné les précédents orateurs, la multiplication des conflits armés, des affrontements ethniques et des atteintes aux droits de l'homme partout dans le monde font sans cesse augmenter le nombre des réfugiés, ce qui nécessite un effort accru de la communauté internationale pour essayer d'endiguer le phénomène. Il adhère pleinement, à cet égard, aux conclusions formulées dans les documents soumis à la présente session du Comité exécutif.

93. A la suite des multiples fléaux qui ont frappé la corne de l'Afrique, le Yémen a dû lui-même accueillir des dizaines de milliers de réfugiés. Le gouvernement s'est mobilisé pour leur apporter l'assistance humanitaire nécessaire, malgré la charge que représentait le retour d'un million d'expatriés revenus au pays à la suite de la guerre du Golfe. En coordination avec le HCR, le Gouvernement yéménite a entrepris de regrouper ces réfugiés dans certaines régions et de distribuer aux réfugiés authentiques des cartes leur donnant droit à une assistance et à une protection. Il s'emploie aussi à faciliter leur retour volontaire dans des zones sûres de leur propre pays.

94. Le Yémen, qui a été l'un des premiers pays du Moyen-Orient à signer la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, espère que le Comité exécutif appréciera à sa juste valeur les efforts qu'il déploie pour régler localement le problème des réfugiés. Il souhaiterait que le HCR l'aide à supporter ce lourd fardeau en augmentant son assistance financière et en cherchant des solutions durables pour tous les réfugiés.

La séance est levée à 18 h 40.