La crise de réfugiés au Kosovo : une évaluation indépendante de la préparation et de la réponse d'urgence du HCR
La crise de réfugiés au Kosovo : une évaluation indépendante de la préparation et de la réponse d'urgence du HCR
EC/50/SC/CRP.12
I. INTRODUCTION
1. Comme indiqué lors de la 16ème réunion du Comité permanent ainsi que lors de réunions informelles ultérieures en novembre 1999 devant un auditoire plus important, le HCR a mandaté une évaluation indépendante afin de permettre au HCR et à d'autres membres de la communauté internationale de tirer les leçons nécessaires de cette crise et d'être plus efficaces à l'avenir. Une version intégrale du rapport a été communiquée aux membres et observateurs du Comité permanent et a été téléchargée sur le site Web du HCR (www.unhcr.org) afin d'atteindre un public plus large.
2. Ce document de séance contient les commentaires du HCR sur ce rapport. Un Résumé des conclusions et recommandations, rédigé par l'équipe d'évaluation, est annexé à ce document pour en faciliter l'étude.1
II COMMENTAIRES DU HCR
3. « La crise de réfugiés au Kosovo : une évaluation indépendante de la préparation et la réponse d'urgence du HCR », a été mandatée par le HCR en juin 1999, à une époque où la crise n'était pas encore terminée. Les membres de l'équipe d'évaluation ont été identifiés sur la base de leur indépendance, leur expérience en matière d'évaluation, leur compréhension des questions relatives aux réfugiés et leur connaissance de la région. Ils ont reçu carte blanche pour la conduite de cette évaluation.
4. Le HCR s'est fixé deux principaux objectifs en mandatant cette évaluation indépendante. Tout d'abord, il souhaitait obtenir un avis autorisé et objectif lui permettant d'améliorer son action. Ensuite, il souhaitait disposer d'une analyse facilitant la compréhension des défis de la protection et de l'assistance aux réfugiés dans un climat politique extrêmement tendu. Le HCR estime que ces objectifs ont été atteints et loue l'équipe pour le caractère approfondi, exhaustif et professionnel évident de toute cette évaluation.
5. Les commentaires qui suivent se limitent à des considérations et des observations générales et liminaires sur la suite à donner à cette évaluation. Le HCR devra étudier le rapport d'évaluation en profondeur et consulter son Comité exécutif et ses partenaires concernant ces conclusions et recommandations. Dans un premier temps, le Comité permanent examinera le rapport le 2 mars 2000.
6. Les leçons de l'opération au Kosovo laissent entendre que la priorité doit être accordée au renforcement de la capacité de planification stratégique et d'animation afin de tenir son rôle de coordination dans les crises de réfugiés. Le HCR doit également avoir le « ressort » nécessaire pour répondre promptement et efficacement aux besoins urgents sans que cela se fasse au détriment des réfugiés des autres régions. L'amélioration de la capacité de réponse nécessitera l'appui sans faille des Etats.
7. En même temps, comme l'évaluation indépendante le reconnaît, le HCR n'est pas en position de se doter d'une capacité interne en rapport avec les besoins d'une situation d'urgence de l'ampleur et de la soudaineté de la crise de réfugiés au Kosovo. De fait, la première leçon à tirer de cette crise est qu'une catastrophe humanitaire majeure peut être évitée lorsque les membres de la communauté internationale font un effort concerté pour mobiliser les ressources à leur disposition.
8. C'est pour cette raison que le HCR attache une importance particulière à l'élargissement et au renforcement des dispositifs de partenariat avec les autres agences, tant gouvernementales que non gouvernementales, qui peuvent être activés à tout moment en réponse à des crises imminentes et réelles. Si les dispositions standard de ce type ne sont pas nouvelles, des approches novatrices seront étudiées. Il convient toutefois de noter que ces dispositions ne peuvent pas être totalement prévisibles. La réponse à une requête du HCR dépendra des particularités de chaque situation.
9. Dans une étude interne qui a précédé l'évaluation indépendante de la crise du Kosovo, le HCR a mis au point des moyens pratiques pour renforcer sa capacité à répondre promptement et efficacement aux situations d'urgence. Ce processus s'est essentiellement centré sur les dispositions à prendre au niveau de l'organisation pour se préparer et réagir, et adopter des structures et des procédures qui permettront au HCR de mobiliser les ressources humaines et autres appropriées de façon plus rapide et plus prévisible. Un accent tout particulier sera mis sur des questions telles que :
L'amélioration des procédures de recrutement et de déploiement d'urgence du personnel, sur la base d'une meilleure compréhension des compétences et des qualifications requises;
Une formation intensive aux situations d'urgence, surtout au niveau des cadres moyens et supérieurs de l'Organisation;
Une meilleure évaluation des risques et des efforts de planification, particulièrement dans les régions « à risque »;
Des procédures d'urgence révisées, y compris une rationalisation de la chaîne de commandement, des voies hiérarchiques et des pouvoirs en matière d'engagements de fonds;
Le renforcement des réserves, y compris les nécessaires d'urgence, les fournitures de bureau et l'équipement de communications approprié.
10. L'un des points de désaccord majeurs entre le HCR et l'équipe d'évaluation indépendante concerne la mesure dans laquelle l'Organisation aurait raisonnablement pu et dû planifier le « scénario du pire » et mobiliser un fort appui extérieur avant la crise. La conclusion reprend ce thème en précisant que l'engagement antérieur du HCR auprès des victimes du conflit à l'intérieur du Kosovo a entravé sa réponse au début de l'exode.
11. Pour ce qui est du dernier argument, le HCR estime que l'importance de l'opération humanitaire au Kosovo avant le 24 mars 1999 doit être reconnue. Cette opération a été vitale pour les bénéficiaires et cruciale pour la communauté internationale. Le HCR était le mieux placé pour conduire l'opération et estime s'être acquitté honorablement de sa mission. Le HCR ne croit pas qu'il y ait jamais eu de choix réel entre cet engagement et une réponse plus efficace à la crise de réfugiés qui a suivi.
12. Les crises majeures de réfugiés sont rarement dues à des causes bien déterminées mais sont souvent le produit inextricable et inattendu de la diplomatie, du conflit et de la folie humaine. L'analyse contextuelle de l'évaluation en fournit une preuve et il faut bien le garder à l'esprit lorsque l'on étudie la réponse du HCR à cette crise, entre autres. A cet égard, le HCR estime que l'équipe d'évaluation aurait pu nuancer davantage la déclaration selon laquelle « les évaluations antérieures indiquent que l'organisation n'a pas été « à la hauteur » dans plusieurs opérations d'urgence ». Les évaluations mentionnées sont des études internes autocritiques sur des situations d'urgence particulièrement complexes et le jugement doit donc être révisé en conséquence.
13. L'opération d'urgence au Kosovo n'a pas simplement eu pour objet de fournir et de coordonner l'assistance humanitaire. Comme l'évaluation indépendante l'affirme clairement, les questions relatives à l'asile et à la protection des réfugiés constituent le noeud du problème. Les chapitres du rapport relatifs à la protection reconnaissent le contexte difficile dans lequel le HCR s'est efforcé de fournir une protection internationale aux réfugiés ainsi que les efforts qu'il a déployés pour faire respecter les normes et les principes reconnus au plan international. Le HCR aimerait faire deux commentaires sur les questions de la protection des réfugiés.
14. Tout d'abord, en ce qui concerne l'évacuation humanitaire et les programmes de transfert humanitaire, le HCR estime qu'ils offrent quelques leçons importantes au plan du partage de la charge international et régional bien que, comme le constate le rapport, de nombreux revers soient à déplorer à cet égard. Les modèles de partage de la charge tels que le Programme d'évacuation humanitaire ont été rares dans l'histoire et risquent de le demeurer. Le HCR continuera d'examiner ce type d'approches ainsi que les mesures visant à renforcer la capacité des pays à accueillir un grand nombre de réfugiés.
15. En deuxième lieu, l'évaluation suggère que le HCR aurait dû prendre davantage, et plus tôt, en considération le fait que les réfugiés ne seraient pas admis dans un des pays d'asile potentiels et qu'il aurait dû élaborer des stratégies de protection alternatives. Le HCR, pour sa part, estime que partir de l'hypothèse que les Etats n'assumeront pas leur responsabilité d'accueillir de nouveaux arrivants, surtout dans les exodes massifs, c'est courir le risque de la voir vérifiée par les faits, et ainsi jouer à « l'oiseau de mauvais augure ». A une époque où l'engagement des Etats à l'institution de l'asile semble sur le déclin, ce risque est réel et grave.
16. En conclusion, le HCR aimerait affirmer sa détermination à renforcer sa capacité d'intervention d'urgence ainsi que son ouverture aux approches novatrices vis à vis des problèmes de réfugiés contemporains. Pour s'acquitter de ces tâches importantes, il compte sur l'appui des Etats dont la responsabilité ultime est de défendre les principes de la protection des réfugiés.