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Note sur la protection internationale (Présentée par le Haut Commissaire)

Réunions du Comité exécutif

Note sur la protection internationale (Présentée par le Haut Commissaire)
A/AC.96/593

31 Juillet 1981

1. Le Haut Commissaire, dans le rapport qu'il a présenté à la trente-sixième session de l'Assemblée générale par l'entremise du Conseil économique et social (E/3612), a retracé les principaux faits nouveaux intervenus dans le domaine de la protection internationale pendant la période du 1er avril 1980 au 31 mars 1981. Dans l'introduction à ce rapport, après avoir relevé plusieurs tendances encourageantes, ayant trait notamment au renforcement du principe du non-refoulement et à l'octroi de l'asile, il a également appelé l'attention de l'Assemblée sur de nombreux problèmes qui ne sont pas encore résolus dans le domaine de la protection internationale et qui appellent l'attention urgente de la communauté des nations.

2. On signalera dans les paragraphes ci-après certains des faits saillants intervenus dans ce domaine depuis la trente et unième session du Comité exécutif.

Instruments internationaux concernant les réfugiés

3. Le nombre des Etats parties aux instruments internationaux de base concernant les réfugiés a continué d'augmenter régulièrement. Depuis la trente et unième session du Comité exécutif, on a enregistré sept nouvelles adhésions, portant à 90 le nombre total des Etats parties à la Convention des Nations Unies sur les réfugiés et/ou au Protocole de 1967. En outre, plusieurs autres pays ont pris les dispositions législatives voulues pour préparer leur adhésion dans un avenir proche. Les dernières adhésions sont particulièrement significatives car elles englobent des pays d'une région qui connaît de gros problèmes de réfugiés et qui, jusqu'à présent, n'était pas représentée parmi les Etats parties soit a la Convention sur les réfugiés soit au Protocole. Il faut espérer que l'accélération actuelle des adhésions des Etats aux instruments de base sur les réfugiés se maintiendra, de façon qu'ils soient, le moment venu, appliqués universellement.

Faits nouveaux touchant l'asile et le non-refoulement

4. Malgré les demandes d'asile toujours plus fréquentes émanant de diverses régions du monde, les Etats ont jusqu'à présent accueilli les particuliers et les groupes nombreux de personnes en quête d'asile qui sollicitaient l'admission. Le HCR continue de faire ressortir l'importance qui s'attache à l'octroi aux réfugiés de l'asile durable dans les délais les plus rapprochés possibles. En revanche, il reconnaît que dans certaines situations, notamment lorsqu'il s'agit d'arrivées nombreuses, les Etats peuvent n'être en mesure d'admettre que temporairement les personnes en quête d'asile, jusqu'à ce qu'une solution durable puisse être trouvée à leur intention. Lorsque tel est le cas, il est néanmoins indispensable que le traitement réservé aux intéressés réponde à certaines normes minimum de base. Des normes de ce genre ont été énoncées par le Groupe d'experts chargé d'examiner la question du refuge temporaire, que le Haut Commissaire a réuni en avril 1981 pour donner suite à la demande formulée par le Comité exécutif à sa trente et unième session. Le rapport de ce Groupe d'experts (EC/SCP/16) a été soumis au Comité exécutif pour examen.

5. La législation de plusieurs pays touchant l'admission des personnes en quête d'asile prévoit l'octroi de l'asile pour des motifs humanitaires en pareil cas, les intéressés sont autorisés à séjourner sur le territoire de l'Etat concerné, mais ne se voient généralement pas accorder le plein statut juridique prévu par la Convention de 1951 sur les réfugiés et par le Protocole de 1967. La possibilité d'octroyer l'asile pour des motifs humanitaires est utile, car elle permet de répondre aux besoins de personnes qui peuvent ne pas réunir les conditions requises pour obtenir le statut de réfugié proprement dit, mais avoir néanmoins de bonnes raisons de rester hors de leur pays d'origine au moins jusqu'à ce que la situation s'y soit stabilisée. Il importe toutefois que la possibilité d'accorder l'asile pour des motifs humanitaires n'aboutisse pas - comme c'est le cas dans un certain, nombre de pays - à l'abaissement du statut accordé aux personnes qui peuvent prétendre être considérées comme des réfugiés en vertu des instruments internationaux

6. En ce qui concerne la principe du non-refoulement, des incidents tels que ceux dont la Haut Commissaire a donné le détail dans son rapport à l'Assemblée générale où des réfugiés et des personnes en quête d'asile ont été renvoyées de force dans leur pays, ont continué de se produire. Ces mesures témoignent de la nécessité d'une vigilance constante du HCR. Cependant, malgré ces violations répétées, le Haut Commissaire pense que le principe fondamental du non-refoulement se traduit de plus en plus largement dans la pratique des Etats. Réaffirmé devant diverses tribunes, et surtout devant l'Assemblée générale et le Comité exécutif, ce principe lui-même s'est progressivement renforcé et est en voie d'acquérir un caractère de plus en plus impératif.

Procédures pour la détermination du statut de réfugié

7. Depuis la trente et unième session du Comité exécutif, de nouveaux Etats ont adopté des procédures en vue de déterminer le statut de réfugié. La description de ces procédures, et d'autres moyens déjà établis, figure dans le document ASC 96/INF.52/Rev 3. L'adoption de procédures de détermination du statut de réfugié est également en voie d'examen dans plusieurs autres Etats :

8. Dans certains pays, des mesures ont été adoptées pour simplifier les procédures actuelles ou les améliorer. Ces mesures consistent notamment à éviter que des personnes qui n'ont pas véritablement droit au statut de réfugié ne fassent abus des procédures et d'asile et de détermination de ce statut. S'il est indispensable de bien reconnaître la nécessité d'éviter les demandés injustifiées, il est naturellement important aussi de faire en sorte que les intérêts fondamentaux des personnes de bonne foi cherchant asile soient pleinement sauvegardés

9. Des procédures de détermination du statut de réfugié supposent l'examen des demandés à titre individuel. Cet examen individuel peut cependant notre pas faisable en cas d'arrivées massives de réfugiés, en raison du nombre des personnes en cause en pareil cas, il peut y avoir lieu de recourir à d'autres solutions, par exemple à la détermination provisoire du statut du groupe, fondé sur l'évaluation objective des raisons de leur départ, la possibilité que certaine membres du groupe soient exclus de cette procédure et puissent faire examiner leurs cas à titre individuel étant réservée

10. La question de la détermination du statut de réfugié en cas d'arrivées massives a fait l'objet d'un examen spécial à la Conférence tenue en 1979 à Arusha sur la situation des réfugiés en Afrique. La Conférence a considéré que l'application des procédures établies pour l'examen des demandes individuelles d'asile pourrait « être impossible dans le cas de grands mouvements de personnes cherchant asile en Afrique » et a demandé au Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés « d'entreprendre une étude approfondie des types de procédures ou d'arrangements envisagée et, le cas échéant, de coopérer à leur mise en oeuvre « Pour donner suite à cette recommandation, le Haut Commissariat a présenté à l'OUA, pour examen par ses Etats membres, une note analytique dans laquelle sont énoncés les éléments essentiels que devraient incorporer les procédures ou arrangements envisagés pour déterminer le statut de réfugié en cas d'arrivées Massives dans des pays d'Afrique.

Sécurité physique des réfugiés et des personnes en quête d'asile

11. Les violations de la sécurité physique des réfugiés et des personnes en quête d'asile, problème au sujet duquel le Comité exécutif avait exprimé de graves préoccupations à sa trente et unième session, restent un souci fondamental du Haut Commissaire. Dans son rapport à l'Assemblée générale, il précise les principaux cas d'attaques criminelles à l'encontre de personnes en quête d'asile et de réfugiés intervenus pendant la période considérée. Depuis la rédaction de ce rapport, d'autres violations du même genre ont eu lieu et, dans certaines régions, elles se sont multipliées et aggravées.

12. Au cours des derniers mois, le problème des attaques de pirates en mer contre des personnes en quête d'asile a, lui aussi, repris des proportions alarmantes, malgré les efforts très réels déployés par les gouvernements directement concernés pour adopter des mesures préventives et punir les responsables. A la suite des conclusions auxquelles le Comité exécutif est parvenu à ce sujet à sa trente et unième session, le HCR a intensité son action tendent à protéger les personnes enquête d'asile se déplaçant par bateau et, coopère étroitement à cet effet avec les gouvernements de la région. Le Haut Commissariat coopère aussi avec d'autres organisations intéressées pour déterminer comment la communauté internationale pourrait réagir plus efficacement devant ce problème grave d'attaques criminelles à l'encontre de personnes en quête d'asile en mer.

13. Il convient de rappeler qu'en vertu du droit international la piraterie est considérée comme un crime contre l'humanité et que tous les Etats sont responsables de son élimination. L'article 14 de la Convention de 1950 sur la haute mer prévoit expressément la nécessité de la coopération internationale en vue de l'élimination de la piraterie.

14. Dans une autre région du monde, la vie de réfugiés innocents continue d'être menacée par les bombardements réitérés des camps où ils sont logés et par les incursions à travers la frontière des forces de sécurité voisines. Ces attaques criminelles sont un très gros sujet de préoccupation pour le HCR. Il est également inquiet de constater que, dans une autre partie du monde encore, les incidents comportant l'enlèvement et la disparition de réfugiés, qui avaient diminué ces dernières années, redeviennent plus fréquente.

15. La situation d'ensemble marque une tendance à la détérioration en ce qui concerne la sécurité physique des réfugiés et mérite à nouveau de retenir sérieusement l'attention de la communauté internationale. La Haut Commissaire espère que le Comité exécutif, pour sa part, continuera d'appuyer les efforts que le HCR déploie pour protéger les personnes en quête d'asile et les réfugiés qui, dans diverses régions du monde, sont victimes d'attaques criminelles et de violations mettant en péril leur sécurité personnelle.

Catégories de personnes protégées par le HCR

16. Le Haut Commissariat a accordé une attention croissante à la question des catégories de personnes auxquelles il peut accorder sa protection sur le plan international. A cet égard, le HCR s'inspire d'abord de la définition du terme « réfugié » figurant dans les instruments internationaux concernant les réfugiés et dans le statut du Haut Commissariat. Pour la région africaine, cette définition a été élargie grâce à la Convention de l'OUA régissant les aspects propres au problème des réfugiés en Afrique. Selon cette Convention, est réfugié « toute personne qui, du fait d'une agression, d'une occupation extérieure, d'une domination étrangère ou d'événements troublant gravement l'ordre public dans une partie ou dans la totalité de son pays d'origine au du pays dont elle a la nationalité, est obligée de quitter sa résidence habituelle pour chercher refuge dans un autre endroit, à l'extérieur de son pape d'origine ou du pays dont elle a la nationalité ».

17. Presque une décennie après l'adoption de cette déflation plus large du terme « réfugié » la Conférence sur la situation des réfugiés en Afrique tenue un 1979 à Arusha a recommandé que « la Convention de 1969 de l'OUA sur les réfugiés, complément régional en Afrique da la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, soit appliqué, par les Nations Union et tous ses organes ainsi que par les organisations non-gouvernementales, dans le traitement des problèmes des réfugiés en Afrique ». Cette recommandation a été approuvée par l'Assemblée générale à sa trente-quatrième session,1 de sorte qu'en Afrique, le Haut Commissaire a désormais officiellement compétence pour faire bénéficier de la protection Internationale les personnes visées par cette définition plus large. La définition élargie du terme « réfugié » donnée par la Convention de l'OUA vise aussi les personnes se trouvant dans une situation analogue à celle des réfugiés, qui ont été déplacées hors de leur pays d'origine et que le Haut-Commissaire a été appelé à aider et à protéger par des résolutions récentes de l'Assemblée Générale

18. L'élargissement de la définition du réfugié a permis au Haut Commissariat de procéder à une évaluation objective de la situation concernant ces personnes et d'étendre sa protection à des groupes qui, selon les critères classiques, auraient pu notre pas en mesure de faire valoir qu'ils avaient de bonnes raisons de craindre la persécution. Ces faits nouveaux importants ont facilité au Haut Commissariat l'exercice de sa fonction de protection dans des situations de réfugiés plus récentes comportant des arrivés massives.

Faits nouveaux intervenus au niveau régional

19. Les activités du Haut Commissaire dans le domaine de la protection internationale continuent d'être renforcées par l'action menée au niveau régional. Cette action peut être intergouvernementale et inclure l'adoption par des organes intergouvernementaux d'instruments établissant des normes. Elle peut aussi avoir trait, d'une manière plus générale, à la promotion du droit des réfugiés qui relève traditionnellement du domaine des organisations non gouvernementales.

20. Pour ce qui concerne l'action intergouvernementale, l'institution de l'asile a encore été étayée, en Afrique, par l'incorporation dans la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, qui vient d'être élaborée, d'un article garantissant à l'individu, s'il est persécuté, le droit de chercher asile et de l'obtenir. En Amérique latine, la Convention interaméricaine sur l'extradition, d'adoption récente, contient une garantie importante contre le retour forcé des réfugiés et des personnes en quête d'asile nous la forme d'une disposition reconnaissant le principe du non-refoulement.

21. En Europe, l'accord européen sur le transfert des responsabilités concernant les réfugiés, qui est entré en vigueur en décembre 1960, apporta un complément utile au cadre déjà large des instruments juridiques adoptée sous les auspices du Conseil de l'Europe. Fidèle à sa tradition bien établie, qui consiste à examiner les questions relatives à la situation juridique des réfugiés, le Conseil de l'Europe a récemment achevé ses travaux sur une recommandation relative à l'harmonisation des procédures de détermination du statut de réfugié qui a été présentée pour approbation finale par le Comité des Ministres. Le Haut Commissaire apprécia beaucoup là coopération étroite et fructueuse qui s'est établie entre le HCR et le Conseil de l'Europe et les initiatives heureuses que le Conseil continue de prendre dans le domaine de la protection internationale.

22. Le Haut Commissaire apprécie vivement aussi les relations étroites qui continuant d'exister entre le HCR et l'OUA et entre HCR et la Ligue arabe, relations qui permettent l'examen constructif des problèmes touchant la protection des réfugiés dans ces régions respectives. Il se félicite également du resserrement de la coopération avec l'Organisation des Etats américains et la Conférence islamique et compte poursuivre le dialogue avec ces organismes sur les questions d'intérêt mutuel

23. Des mesures de soutien des activités du Haut Commissariat dans la domaine de la protection internationale ont aussi été prises par les milieux non gouvernementaux. Dans le cas le l'Asie, les conclusions de la table ronde des experts des pays asiatiques à Manille2 ont été examinées par un Groupe de travail de participants à la table ronde, s'inspirant de la Déclaration de Manille sur la protection internationale des réfugiés et des personnes déplacées, le Groupe de travail s'est entendu sur un certain nombre de principes qui, à son avis, devraient s'appliquer à la protection des réfugiés en Asie, Le Groupe de travail a également souligné l'importance qu'il attachait à ce que les pays asiatiques apportent, dans la région et au niveau mondial, leur contribution, au développement plus poussé du droit des réfugiés. En Amérique latine, un Colloque sur l'asile et la protection des réfugiés en Amérique latine, tenu en mai 1981 sous les auspices du Ministre mexicain des affaires étrangères, en collaboration avec le HCR, a examiné l'institution latino-américaine de l'asile dans ses rapporte avec la conception universelle du réfugié et a adopté une série de conclusions qui marqueront incontestablement une étape importante dans l'évolution; du droit des réfugiés dans la région

Evolution touchant la diffusion des principes de la protection et du droit des réfugiés

24. Aux précédentes sessions du Comité exécutif - notamment à ses vingt-neuvième, trentième et trente et unième sessions - l'importance qui s'attache à mieux faire connaître le droit des réfugiés a été reconnue. Le Haut Commissariat a multiplié les occasions de diffuser les principes de la protection. Comme on l'a déjà dit, ces activités ont donné des résultats particulièrement utiles au niveau non gouvernemental dans les régions où les principes de la protection internationale n'avait pas jusqu'à présent été pleinement élaborés. En plus de ses activités régionales au niveau non gouvernemental, le Haut Commissariat a continué d'encourager le développement du droit des réfugiés en tant qu'objet d'études théoriques distinctes. Cette question sera examinée spécialement lors d'un Colloque sur la protection, la diffusion et l'enseignement des droits fondamentaux de la personne humaine des réfugiés, qui se tiendra du 7 au 12 décembre 1981 à Tokyo sous les auspices communs de l'UNESCO, du HCR et je l'Université des Nations Unies.

25. Le rapport du Haut-Commissaire à l'Assemblée générale contient une description plus détaillée des autres activités qu'il a menées en vue de la promotion et de la diffusion des principes régissant la protection internationale.

Conclusions

26. Depuis la trente et unième session du Comité exécutif, en a enregistré plusieurs faite nouveaux encourageants dans le domaine de la protection internationale.

27. L'accélération continue des adhésions aux instruments internationaux concernant les réfugiés notamment l'adhésion de certains Etats appartenant à des régions du monde qui n'étaient pas encore représentées parmi les Etats parties à ces instruments, est particulièrement significative. Un autre élément d'égale importance est la reconnaissance du fait que les personnes auxquelles l'asile temporaire seulement a été accordé doivent être traitées selon des normes minimum de base.

28. Pour ce qui concerne les faits nouveaux portant sur des domaines classiques, il convient de mentionner la réaffirmation constante du principe du non-refoulement, l'établissement de nouvelles procédures de détermination du statut de réfugié et l'apparition, dans l'opinion, d'une attitude toujours plus favorable à l'exercice par le Haut Commissaire de sa fonction de protection.

29. Pendant la période considérée pourtant, on a assisté aussi à de nouvelles atteintes au principe du non-refoulement et à de nouvelles violations de la sécurité physique des réfugiés dans certaines régions, Cet état de choses continue de préoccuper très profondément le Haut Commissaire et il compte pouvoir s'appuyer sur le Comité exécutif pour chercher à régler ces problèmes humanitaires.

30. Enfin, le Haut Commissaire voudrait exprimer ses remerciements au Comité exécutif pour le soutien qu'il lui a apporté - notamment depuis la création du Sous-Comité plénier sur la protection internationale dans les efforts qu'il déploie pour élargir la protection internationale des réfugiés.


1 Résolution 34/61, du 29 novembre 1979.

2 Présentées au Comité exécutif à sa trente et unième session dans le document A/AC.96/INF.162.