Résumé du Président, Forum du Haut Commissaire (1er octobre 2004)
Résumé du Président, Forum du Haut Commissaire (1er octobre 2004)
Remarques d'ordre général
1. Je vous suis reconnaissant des nombreuses déclarations intéressantes que nous venons d'entendre. Vous avez clairement affirmé que Convention Plus est un processus riche et que nous avançons de façon satisfaisante. Bon nombre d'entre vous se sont félicités de la transparence de ce processus grâce à la participation de nombreux pays, d'organisations et d'ONG. Nous avons également noté le fait que vous appréciez la contribution des Etats au processus dont le Canada, le Danemark, le Japon, l'Afrique du Sud et la Suisse.
2. Certains ont demandé des renseignements sur le calendrier de Convention Plus. Nous avons des plans jusqu'à la fin de l'année prochaine. Nous devrions alors être en mesure de vous dire ce que Convention Plus nous a permis de faire. Le concept de Convention Plus sera suffisamment ancré pour porter ses fruits à l'avenir.
3. J'aimerais établir le lien avec deux points présentés par le Directeur du Département de la protection internationale. On peut dire que l'ensemble du HCR se préoccupe de fournir une protection efficace. Cela peut inclure la recherche de solutions car le but ultime de la protection est la mise en oeuvre de solutions durables. Nous savons d'expérience que la protection revêt plusieurs dimensions et pose plusieurs problèmes. En deuxième lieu, lorsque j'entends le représentant des ONG parler des mouvements secondaires irréguliers, on dit que les mouvements ne sont secondaires que dans un premier temps - c'est-à-dire lorsque la protection est fournie. De fait, si tous les pays avaient la volonté et la capacité de fournir une protection, Convention Plus n'aurait guère de raison d'exister. En l'absence d'un partage de la charge et d'un travail conjoint dans la recherche de solutions, la protection se dégrade.
4. L'aboutissement de Convention Plus n'est donc pas seulement le produit final du processus de consultations sur les trois volets de l'initiative. Pour moi, Convention Plus contribuera essentiellement, et déjà depuis le début, à renforcer le dialogue constructif entre les Etats et à mobiliser le HCR et nos partenaires pour trouver des solutions durables aux réfugiés et pour travailler à instaurer un réel partage de la charge. Lorsque je compare la situation qui prévaut aujourd'hui avec celle de l'année dernière, je puis dire que nous sommes plus efficaces dans la mise en oeuvre de solutions durables. Convention Plus porte déjà ses fruits aujourd'hui. Cela nous invite à saisir les chances qui s'offrent à nous de travailler mieux ensemble.
Utilisation stratégique de la réinstallation
5. Un certain nombre de thèmes ont émané de la discussion sur le nouveau Cadre multilatéral d'accords sur la réinstallation élaboré dans le cadre du Groupe Convention Plus sur l'utilisation stratégique de la réinstallation (voir FORUM/2004/6).
6. De nombreuses délégations se sont félicitées de ce nouveau cadre et ont fait remarquer qu'il augure bien de l'initiative Convention Plus. Bon nombre sont également tombées d'accord sur le fait que ce cadre multilatéral traduit les préoccupations et les suggestions des pays traditionnels de réinstallation ainsi que les préoccupations des pays accueillant un grand nombre de réfugiés. Bon nombre d'entre vous ont observé que sa mise en oeuvre ferait de la réinstallation une solution durable offerte à plus de réfugiés. A cet égard, je suis reconnaissant aux délégations qui ont annoncé une augmentation de leurs quotas de réinstallation dans la mesure où cela ajoute une dimension quantitative nécessaire à notre ambition d'élargir la réinstallation en tant que manifestation du partage de la charge. Un certain nombre de délégations se félicitent de la reconnaissance dans ce cas de la possibilité de l'examen collectif aux fins de réinstallation mais en spécifiant toutefois que cela ne doit pas se faire au détriment de la réinstallation individuelle urgente, particulièrement en tant qu'instrument de protection.
7. En réponse à une demande d'éclaircissement concernant le par. 17 du cadre multilatéral, permettez-moi de rappeler que la demande d'une plus grande flexibilité dans les critères de réinstallation prévaut depuis longtemps. Cette question a été discutée au cours des Consultations mondiales sur la protection internationale et un appel a été lancé par le biais de l'Agenda pour la protection pour une plus grande flexibilité. La préoccupation du HCR concernant les critères a incité certains pays de réinstallation à respecter strictement la définition du réfugié consignée dans la Convention de 1951 et à l'appliquer de façon restrictive, excluant des possibilités de réinstallation un certain nombre de personnes relevant de la compétence du HCR, y compris dans des situations où la réinstallation devrait faire partie d'un ensemble de solutions durables.
8. Une délégation se demande ce que l'on entend par utilisation stratégique de la réinstallation. Ce concept a été examiné de façon active par le Groupe de travail sur la réinstallation qui l'a défini comme l'utilisation planifiée de la réinstallation de façon à maximiser les avantages, directs ou indirects, autres que ceux découlant de la réinstallation du réfugié. Ces avantages peuvent être étendus à d'autres réfugiés, aux pays hôtes, à d'autres Etats ou au régime international de protection en général. Le HCR étudie donc de nouveaux moyens de réinstaller les réfugiés. Cela a impliqué l'utilisation d'une méthodologie de groupe en Afrique et au Moyen-Orient avec quelques succès qui laissent bien augurer de l'avenir. La réinstallation peut également être utilisée pour ouvrir un espace d'asile dans les pays hôtes, fournir des voies régulières de protection et contribuer ainsi à la réduction des mouvements secondaires irréguliers dans la mesure où la protection peut être fournie sans avoir recours aux trafiquants et passeurs.
9. Un certain nombre d'entre vous ont souligné que la valeur du cadre multilatéral ne pourrait être établie que sur la base de sa mise en oeuvre dans des situations de réfugiés spécifiques. Un certain nombre d'entre vous ont souligné le lien entre le cadre multilatéral et le travail du Groupe concernant les autres volets de Convention Plus et souhaitent que les progrès s'accélèrent. Le travail sur le renforcement de ces liens ne signifie pas toutefois que nous ne pouvons pas aller de l'avant en matière de réinstallation ou différer notre réflexion sur des plans d'action globaux éventuels. Son application est déjà examinée dans le cadre du Comité directeur mis sur pied pour travailler sur le Plan d'action global pour les réfugiés somaliens.
10. Concernant son utilisation dans le cadre d'opérations spécifiques, le cadre multilatéral s'applique idéalement au sein d'une approche globale mais peut également être utilisé seul si nécessaire. Ce texte en est une preuve.
Aide au développement
11. Particulièrement concernant le volet de Convention Plus relatif au développement mais aussi concernant les mouvements secondaires irréguliers, bon nombre d'entre vous ont dit que nous devrions nous efforcer de veiller à l'instauration d'un partenariat le plus étroit possible. Certains ont souligné la nécessité d'une approche pratique ainsi que concernant les mouvements secondaires et irréguliers. Un certain nombre d'entre vous ont suggéré que le cadre multilatéral soit utilisé comme modèle de rédaction d'accords similaires relatifs aux deux autres volets. Une délégation a demandé spécifiquement si nous avions besoin d'un accord générique lorsque nous parlons de développement mais a suggéré que nous élaborions un catalogue de bonnes pratiques. Convention Plus a trait à des engagements plus fermes. Si nous pouvons être sûrs que les engagements fermes sont déjà pris dans ce domaine, alors je conviens que nous n'avons pas besoin d'un accord générique. Toutefois, la question est probablement plus complexe et un accord générique serait donc un bon moyen de réaffirmer ces accords et de les mettre en pratique.
12. Les travaux sur ce volet de l'initiative ont été motivés par le désir manifesté par un certain nombre d'Etats d'utiliser une approche pyramidale axée tout d'abord sur les groupes spécifiques de réfugiés/de rapatriés et les régions d'accueil/de rapatriés et seulement plus tard sur les accords génériques découlant de cette expérience. Mais au cours de travaux sur ce volet, il est apparu que la coopération devait être développée dans sa forme et concernant les initiatives où des approches, des outils et des critères plus génériques sont développés. Lorsqu'une délégation a fait remarquer que le PNUD se concentre désormais sur les réfugiés, c'est en raison de l'encouragement donné par le HCR en la matière. D'autres exemples incluent l'évaluation commune par pays des Nations Unies, le cadre d'assistance au développement des Nations Unies qui fournit des possibilités d'intégration des réfugiés et des personnes déplacées, les documents sur la stratégie de réduction de la pauvreté et de la Banque mondiale et l'OCDE. Concernant cette dernière organisation, les populations déplacées relèvent en théorie des principes directeurs du CAD de l'OCDE mais dans la pratique les déracinés sont souvent oubliés.
13. Je conviens que le concept de sécurité humaine est important dans le contexte de la reconstruction post-conflit. Nous travaillons activement à étudier comment utiliser ce concept dans nos activités et comment le lier davantage au Fonds de sécurité humaine du Japon.
Mouvements secondaires irréguliers
14. La question des mouvements secondaires irréguliers nous touche tous d'une façon ou d'une autre. Un certain nombre d'entre vous ont fait observer que les travaux du Groupe de travail sur les mouvements secondaires irréguliers pourraient bénéficier d'une déclaration faisant autorité de la part du Département de la protection internationale du HCR sur ce que l'on entend par protection effective. La Directrice du Département de la protection internationale vous a affirmé qu'elle avait l'intention de se pencher sur cette question au cours de la session plénière du Comité exécutif. Comme vous le savez, le HCR a parlé de la notion de protection effective depuis quelques temps. La Table ronde d'experts de Lisbonne qui a eu lieu en décembre 2002 sur ce sujet dans le cadre des consultations mondiales, a émis des conclusions fournissant une déclaration intéressante et faisant date sur la protection effective bien qu'elle n'ait pas pour but de lier les parties. Depuis lors, mon Office travaille avec les ONG et les institutions compétentes pour conférer une base à ces accords.
15. Le HCR n'a pas conduit cette action uniquement dans le cadre des mouvements secondaires irréguliers dans la mesure où nous estimons risqué d'entamer un débat sur la date à laquelle un Etat peut renvoyer quelqu'un afin qu'il soit le véhicule de la détermination du contenu d'une protection effective. Il est probable que pour certains Etats, plus le niveau de la protection effective sera bas, plus il sera facile de renvoyer les personnes se déplaçant dans le cadre de mouvements secondaires irréguliers, en fixant le niveau au plus petit dénominateur commun. Nous avons préféré laisser cette question aux fins de jugement sur son bien-fondé.
16. Certaines délégations ont également demandé des éclaircissements concernant le projet financé par l'Union européenne afin de renforcer la capacité de protection dans certains pays d'Afrique (Bénin, Burkina Faso, Kenya et Tanzanie). La Directrice du Département de la protection internationale nous a rappelé qu'il y avait en fait plusieurs projets du HCR financés et mis en oeuvre en coopération avec l'Union européenne afin d'examiner comment le HCR et les partenaires pouvaient renforcer leurs capacités de protection des réfugiés lorsque la protection est recherchée dans un premier temps. Cela émane directement de l'Agenda pour la protection qui demande au HCR d'examiner les déficiences au niveau de la protection et d'élaborer des stratégies pour y remédier. Dans le cadre de cet effort, le HCR a établi un cadre visant à identifier les lacunes au niveau de la capacité de protection en s'inspirant du cadre juridique international ainsi que la liste récapitulative des indicateurs de protection utilisée par les administrateurs de terrain chargés de la protection. Le principal objectif de tous ces efforts est de se faire une idée claire de la situation de protection des réfugiés, des institutions principales liées à l'asile et du cadre législatif, des contraintes des pays hôtes dans la réalisation des aspirations et veiller à ce que les stratégies de protection mises en place par les Etats tiennent dûment compte des besoins et des défis en matière de réfugiés et de communauté hôte.
17. Convention Plus se fonde sur l'observation selon laquelle il existe un lien entre les déficiences et les lacunes au niveau de la protection et le fait que l'accent ne soit pas suffisamment mis sur les solutions et le partage de la charge. L'intervenant du Groupe africain a déclaré que le partage de la charge ne devait pas conduire à un déplacement du fardeau. Il convient d'examiner cette question dans le cadre des droits de l'homme. Il se félicite du fait que cette discussion du partage de la charge ait lieu dans l'un des groupes de travail. Les ONG ont souligné le lien entre la protection et le développement. Nous devons continuer de déployer des efforts pour remédier aux lacunes en matière de protection dans tous les pays. Il arrive que des niveaux de protection recensés comme raisonnables chutent, même dans les pays développés. Pour moi, Convention Plus a pour but d'améliorer mais également de maintenir un niveau élevé de protection pour les réfugiés. A cette fin, une coopération internationale plus étroite est nécessaire.
Approches globales en matière de solutions durables
18. Concernant les approches globales en matière de solutions durables, je souhaite vous remercier pour vos commentaires précieux. Nous avons identifié des situations où des accords globaux Convention Plus peuvent être mis en oeuvre sur le terrain. Cet effort sera accéléré au cours des mois à venir.
19. Bon nombre d'entre vous sont tombés d'accord avec l'axe central de ma présentation au titre de ce point selon lequel l'approche vis-à-vis des situations de réfugiés prolongées doit être globale, si possible. Je prends note de l'avis d'une délégation selon laquelle le but ultime de tout plan d'action global doit rester la solution au problème tout entier et sous toutes ses formes. Mais l'incapacité de présenter une solution pour l'ensemble du problème de réfugiés ne doit pas nous empêcher de commencer à résoudre certains éléments du problème. Telle est l'approche spécifiée dans la note sur la Systématisation des approches globales pour la résolution des problèmes de réfugiés (voir FORUM/2004/7) que nombre d'entre vous ont trouvé intéressante sous l'angle de l'étude de la question des situations de réfugiés prolongées. Dans ce contexte, les délégations se sont déclarées en faveur de la présentation au Comité permanent d'un inventaire annuel des situations de réfugiés prolongées.
20. Un certain nombre d'entre vous ont souligné que la faisabilité d'un plan d'action global doit être déterminée au cas par cas, compte tenu des spécificités de chaque situation. J'aimerais lancer une mise en garde sur la base de mon expérience de Haut Commissaire. Dès que nous parlons de mettre en oeuvre ensemble différentes solutions, nous vivons des expériences étranges. Nous encourageons une solution durable puis les parties intéressées nous demandent « Que faites-vous au sujet des autres solutions ? ». Ensuite, lorsque nous décidons d'adopter un plan d'action global, les autres Etats disent « Oui à d'autres solutions durables mais pas à l'intégration sur place. Ma propre expérience me dit qu'il ne faut pas imaginer que les PAG représentent le meilleur moyen d'avancer dans tous les cas mais qu'une analyse globale des possibilités de solutions durables est toujours nécessaire. Bon nombre d'entre vous se sont félicités de l'élaboration d'un Plan d'action global pour les Somaliens. Votre appui est indispensable pour veiller à ce que le problème des réfugiés somaliens soit résolu de façon globale.
21. Je partage la satisfaction de bon nombre d'entre vous concernant le rapatriement couronné de succès des réfugiés afghans. Je suis toutefois préoccupé par la suggestion qui veut que du fait du taux de chômage élevé dans les pays en développement accueillant un grand nombre de réfugiés, il n'est pas concevable d'accueillir les Afghans en tant que travailleurs invités. En tant qu'économiste, je ne puis accepter que la main-d'oeuvre nationale puisse remplir la niche occupée par de nombreux Afghans. Tous les Afghans ne sont pas arrivés suite à la violence dans leur pays. Si les gens sont productifs, leur départ affecte l'économie. Si vous forcez les gens à quitter leur travail, les nationaux ne peuvent pas immédiatement prendre leur place. L'industrie en souffrira inéluctablement.
Conclusion
22. Nous avons entendu des appels répétés pour une coopération plus étroite. Cette coopération étroite des Etats et des partenaires est nécessaire dans différentes situations, particulièrement les situations d'urgence et des situations de réfugiés prolongées. La pratique nous a enseigné cependant qu'une approche plurielle n'est pas toujours facile à mettre en oeuvre. Ce qui est essentiel dans ces situations c'est de mobiliser conjointement la communauté internationale ; c'est tout l'objet du processus Convention Plus. Nous sommes galvanisés par votre action. Vous avez reconnu que certains résultats avaient déjà été atteints. Ce travail est important pour le HCR et pour les réfugiés. Je compte sur vous pour poursuivre vos efforts concernant les différents accords que nous essayons de mettre au point et d'appliquer ensemble.