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Suite donnée à des conclusions antérieures du Sous-comité détermination du statut de réfugié eu égard au problème des demandes manifestement injustifiées ou abusives

Réunions du Comité exécutif

Suite donnée à des conclusions antérieures du Sous-comité détermination du statut de réfugié eu égard au problème des demandes manifestement injustifiées ou abusives
EC/SCP/29

26 Août 1983

Introduction

1. Le problème des demandes de reconnaissance du statut de réfugié présentées par des personnes qui n'ont manifestement pas de raison valable de se voir attribuer ce statut a été examiné par le Sous-Comité plénier de la protection internationale à ses 2ème et 7ème réunions. A la 2ème réunion, la question s'est posée à propos de l'exigence en vertu de laquelle un postulant de bonne foi devrait être autorisé à rester dans le pays jusqu'à ce qu'une décision soit prise sur sa demande initiale et également jusqu'à ce qu'il ait été statué sur don cas à la suite d'un recours. Dans la conclusion relative à la détermination du statut de réfugié adoptée à cette réunion, le Sous-Comité a reconnu qu'on pouvait lever cette obligation si l'autorité compétente chargée de déterminer le statut de réfugié avait pu établir que la demande était « manifestement abusive ».1 A la 7ème réunion du Sous-Comité, le problème des « demandes de reconnaissance du statut de réfugié manifestement injustifiées ou abusives » a été soulevé dans la Note présentée par le Haut Commissaire sur la détermination du statut de réfugié,2 ainsi que lors de la discussion de cette question. Dans les conclusions adoptées par le Sous-Comité à cette réunion, on a estimé que, compte tenu de son importance, la question des demandes manifestement injustifiées ou abusives du statut de réfugié devrait être inscrite à l'ordre du jour de la huitième réunion du Sous-Comité, où elle serait examinée plus avant sur la basé d'une étude qui serait faite par le Haut Commissariat·3

2. A la suite de cette conclusion, le Haut Commissariat a consulté ses représentants et, par leur entremise, les autorités nationales des Etats parties à la Convention de 1951 et au Protocole de 1967 concernés pour déterminer la nature et l'étendue du problème et évaluer le genre de mesures qui avaient été prises ou que l'on pourrait envisager de prendre pour le résoudre. Le Haut Commissariat a analysé la présente, situation et les mesures prises ou envisagées, eu égard à la fois à la nécessité d'assurer le bon fonctionnement des procédures de détermination du statut de réfugié et de protéger les intérêts des postulants de bonne foi.

Le problème de la prolifération des demandes d'asile injustifiées

3. La prolifération des demandes d'asile dans plusieurs Etats industrialisés parties à la Convention du 1951 et au Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés a manifestement abouti à une augmentation des demandes d'asile injustifiées et ce phénomène a suscité de graves préoccupations de la part des Etats concernés. Ces préoccupations résultent notamment du fait que le nombre de demandes présentées sans motif valable a pris des proportions excessives et qu'une bonne partie d'entre elles doivent être considérées comme manifestement injustifiées ou abusives.4

4. Dans plusieurs de ces pays, on affirme qu'un nombre croissant de demandes de reconnaissance du statut de réfugié sont présentées par des migrants économiques qui cherchent à se soustraire aux règlements normaux d'immigration. L'une des raisons de ce phénomène paraîtrait résider dans la conjoncture économique difficile que connaît la monde et qui entraîne une émigration croissante des pays moins développés. En même temps, le chômage généralisé dans les pays développés a incité ces derniers à imposer à l'immigration légale des restrictions plus sévères, qui contrastent fortement avec les politiques d'asile généreuse qu'ils continuent de pratiquer envers les réfugiés reconnus comme tels. Nombre de personnes qui voudraient immigrer dans ces pays ont donc eu recours au subterfuge qui consiste à solliciter le statut de réfugié pour se faire admettre ou pour éviter l'expulsion. Même si leurs demandes sont finalement rejetées, les postulants s'assurent, en les présentant, 1 a possibilité de rester dans le pays au moins pendant la durée de la procédure de détermination du statut. Cet avantage est évidemment plus tentant lorsque les postulants ont le droit de travailler et peuvent bénéficier des prestations sociales. Les autorités nationales d'un certain nombre de pays ont constaté que lorsque la procédure de détermination est longue, ce délai peut être, pour les personnes qui usent de ce subterfuge, une incitation de plus à présenter leur demande.

5. La prolifération de ces demandes frauduleuses a imposé aux pays visés une lourde charge, tant en raison des frais administratifs d'examen des demandes que du coût social afférent au séjour de tous les demandeurs d'asile qui attendent l'examen de leur dossier. Pareilles demandes ont également nui aux intérêts des postulants sollicitant à bon droit le statut de réfugié. Elles ont contribué, dans certains pays, à retarder la reconnaissance du statut de réfugié et donc la jouissance par les réfugiés des droits qui leur sont reconnus en vertu de la Convention et du Protocole. En même temps, la prise de conscience croissante qu'une bonne partie des postulants étaient bien résolus à n'être pas, un fin de compte, des réfugiés a commencé d'aliéner la sympathie populaire envers les personnes en quête d'asile en général et à créer le scepticisme quant au bien-fondé des demandes de tous les réfugiés, même reconnus comme tels. On évoque couramment les « faux réfugiés » dans certains pays et les pressions politiques en faveur du l'application de mesures plus restrictives à l'égard de tous les demandeurs d'asile se renforcent.

6. Les gouvernements des pays qui sont le plus gravement atteints par le problème des demandes frauduleuses voient bien que des mesures s'imposent pour régler ce problème. En examinant ces mesures, les Etats ont été aux prises avec la tâche.' difficile de concilier leurs objectifs humanitaires, notamment le maintien d'une politique d'asile généreuse, avec la nécessité d'assurer l'application des lois d'immigration et d'empêcher l'abus des garanties de procédure visant à protéger les intérêts des demandeurs d'asile de bonne foi.

7. Les nombreuses demandes injustifiées de reconnaissance du statut de réfugié ont amené certains de ces gouvernements à envisager ou à adopter diverses mesures propres à répondre au problème. Ces mesures comprennent l'obligation du visa d'entrée pour les personnes de certaines nationalités, le refus à certains demandeurs d'asile ou à tous du droit de travailler ou de bénéficier des prestations sociales, le placement des postulants dans des centres spéciaux et la mise en détention de certains tant que leur demande est en suspens. Pareilles mesures peuvent bien entendu empêcher que des postulants dont les demandes ne sont pas fondées n'abusent du système de détermination du statut de réfugié; mais elles suscitent dans certains cas de graves préoccupations en raison de leurs effets néfastes sur les postulants qui ont des motifs valables de demander la reconnaissance de ce statut.

8. D'autres mesures proposées ou adoptées par des Etats visent plus strictement à traiter des demandes frauduleuses dans le contexte des procédures existantes pour la détermination du statut de réfugié. Ces mesures sont notamment les suivantes : introduction de procédures spéciales permettant de disposer plus rapidement des demandes jugées manifestement sans fondement, limitation des possibilités de recours administratifs ou judiciaires, recherche de moyens de raccourcir les procédures actuelles et/ou augmentation du personnel et des ressources de l'autorité compétente pour déterminer le statut de réfugié afin de réduire les délais nécessaires pour parvenir à une décision finale. Des procédures de ce genre ont l'avantage appréciable d'offrir un moyen de traiter le problème des demandes injustifiées tout en sauvegardant les intérêts des postulants qui ont des motifs valables de solliciter le statut de réfugié.

La notion de demande « manifestement injustifiée » ou « abusive »

9. Plusieurs Etats ont prévu des dispositions spéciales dans leurs procédures de détermination du statut de réfugié pour le traitement des demandes jugées nettement sans fondement. Si les termes utilisés et les définitions pertinentes varient, l'objectif de ces mesures est de classer séparément, en vue d'un traitement plus rapide une catégorie de demandes jugées manifestement de nature telle qu'elles n'appellent pas un examen détaillé à tous les niveaux de la procédure de détermination.

10. On se souviendra que la conclusion sur la détermination du statut de réfugié adoptée par le Sous-Comité à sa septième réunion évoque les demandes manifestement injustifiées ou abusives »; pour le Sous-Comité, il s'agit d'une demande qui est « frauduleuse ou ne satisfait pas aux critères de l'octroi du statut de réfugié énoncés dans la Convention des Nations Unies de 1951 ».5 Cette formule repose sur une recommandation du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe concernant toute demande d'asile dont l'autorité centrale compétente a constaté qu'elle « est manifestement fondée sur des motifs étrangers à l'asile, en particulier parce que frauduleuse ou parce que ne se rattachant ni aux critères prévus par l'article 1.A(2) de la Convention de Genève de 1951 pour l'octroi du statut de réfugié, ni à d'autres critères justifiant l'octroi de l'asile ».6

11. Dans tous les Etats qui ont pris des dispositions spéciales pour traiter des demandes manifestement injustifiées, le terme (ou son équivalent) englobe les demandes qui sont nettement étrangères aux critères contenus dans les définitions applicables, par exemple les demandes où le postulant déclare sans équivoque qu'il cherche asile pour obtenir de meilleures possibilités d'emploi. D'après les renseignements dont on dispose, il semblerait cependant que les demandes ne faisant état d'aucun motif qui, à première vue au moins, se rattache aux critères applicables soient assez rares.

12. Une autre catégorie de demandes que les autorités de plusieurs pays croient devoir ranger parmi celles qui sont « manifestement injustifiées » sont les demandes d'asile qui, si elles font état de motifs suffisants pour que le demandeur soit en droit de demander le statut de réfugié, ne répondent cependant pas aux critères appliqués par le pays concerné pour l'octroi de l'asile. Tel est le cas, par exemple, lorsqu'il semble que le postulant ait obtenu - ou puisse obtenir - l'asile dans un autre pays où l'on peut raisonnablement s'attendre qu'il se rende. Eu égard aux liens étroites existant entre la détermination du statut de réfugié et l'octroi de l'asile, les Etats concernés jugent qu'il n'y a pas lieu de procéder à la détermination du statut de réfugié si, en tout état de cause, le postulant ne remplit pas les conditions requises pour obtenir l'asile dans le pays. Une autorité nationale a utilisé le terme « incompatibles » au lieu de « manifestement injustifiées » pour désigner ce type de demandes, que l'on qualifie également « d'irrecevables ».

13. Plusieurs pays traitent aussi les nouvelles demandes émanant de personnes dont une première demande a déjà été examinée et rejetée comme « manifestement injustifiées » s'il n'y a aucun motif pour que la décision antérieure soit rapportée. On a évoqué la possibilité d'inclure également dans cette catégorie les demandes rejetées dans un autre pays qui applique les mêmes critères et procédures.

14. Un groupe de demandes beaucoup plus nombreux que la plupart des autorités nationales concernées englobent dans la catégorie des demandes « manifestement injustifiées » comprend celles qui reposent sur des allégations qui, si elles étaient véridiques, constitueraient des motifs de reconnaissance du statut de réfugié, mais oui ne correspondent pas aux faits jugés établis touchant la situation, les pratiques ou les événements dans le pays d'origine du postulant. Plusieurs autorités nationales paraissent se fonder, pour traiter des demandes comme manifestement injustifiées sur une présomption contre leur bien-fondé lorsqu'elles émanent de ressortissants de certains pays ou de membres de groupes déterminés dans ces pays. Des autorités ont déclaré que des procédures tendant à écarter des demandes manifestement injustifiées n'auraient guère de valeur pour le règlement du problème des demandes frauduleuses si l'on ne traitait pas ce genre de demandes comme « manifestement injustifiées ».

15. S'appuyer sur des « faits établis » pour conclure qu'une demande est manifestement injustifiée peut poser des problèmes dans la mesure où des faits jugés établis peuvent n'être pas incontestés. Au surplus, les pratiques existantes dans un pays d'origine donné peuvent souffrir des exceptions ou bien les conditions dans le pays considéré peuvent changer, sans que l'organe chargé de déterminer le statut de réfugié en soit nécessairement informé. Il conviendrait donc de traiter le « fait établi » touchant un pays d'origine comme une présomption susceptible, le cas échéant, d'objections fondées sur des preuves valables. Sous cette réserve, il paraîtrait raisonnable que toute demande fondée sur des allégations contraires aux faits connus de l'autorité compétente soit traitée comme manifestement injustifiée, à moins que le postulant ne puisse invoquer des faits plausibles pour l'étayer. Telle paraît être la pratique actuelle dans les pays qui ont adopté ce type de procédure.

Procédures suivies pour résoudre le problème des demandes manifestement injustifiées ou abusives

16. Les procédures adoptées pour résoudre le problème des demandes manifestement injustifiées ou abusives varient considérablement selon les pays. Dans deux pays, les demandes qui apparaissent manifestement injustifiées après un premier examen ou interrogatoire sont renvoyées à l'autorité centrale qui a compétence pour déterminer le statut de réfugié, mais font l'objet d'une procédure sommaire. Ces demandes ne sont rejetées que si tous les membres de l'organe compétent, ainsi que les représentants du HCR, s'accordent à penser qu'elles sont manifestement injustifiées. Les personnes dont la demande est ainsi rejetée ont le droit de demander un réexamen de leur cas ou de former un recours au même titre que les autres postulants.

17. Dans deux autres pays, tous les postulants sont traités de la même façon durant la première phase de la procédure. En revanche, lorsque l'autorité qui a compétence pour déterminer le statut de réfugié estime qu'une demande est « de toute évidence sans fondement » (dans l'un de ces pays) ou qu'il ne fait aucun doute que le postulant n'est pas un réfugié (dans l'autre), l'intéressé n'est pas autorisé à rester dans le pays pendant le déroulement de la procédure de recours en justice ou devant un tribunal administratif. Il peut toutefois s'adresser à un tribunal administratif en référé, aux fins d'obtenir l'autorisation d'y demeurer, en attendant de connaître l'issue du recours qu'il a formé en faisant valoir que sa demande n'était pas manifestement injustifiée.

18. Dans quelques pays, les autorités des services d'immigration ou de la police des étrangers qui examinent les premières le cas des postulants peuvent rejeter leur demande en déclarant qu'elle est manifestement injustifiée. Un représentant de l'autorité qui a compétences pour déterminer le statut de réfugié est cependant avisé de cette décision et a la possibilité de la réviser avant son application.

Nécessité de prévoir des garanties de procédure

19. Pour déterminer si une demande de reconnaissance du statut de réfugié est ou n'est pas manifestement injustifiée ou abusive, il faut procéder à un examen approfondi comme pour la détermination du statut de réfugié en général et le rejet d'une demande par erreur entraîne aussi, dans ce cas, de lourdes conséquences pour les postulants. Il est donc essentiel que toute procédure spéciale adoptée en vue de résoudre le problème des demandes manifestement injustifiées ou abusives prévoie certaines garanties. Il importe également que les critères de détermination soient définis de façon qu'aucune demande ne soit considérée comme manifestement injustifiée ou abusive à moins qu'elle présente un caractère frauduleux ou qu'il ne fasse aucun doute qu'elle ne satisfait pas aux conditions requises.

20. Pour prévenir les erreurs dans ce domaine, il est notamment indispensable qu'un fonctionnaire connaissant bien les divers facteurs à prendre en considération avant de se prononcer ait un entretien personnel approfondi avec chacune des personne demandant le statut de réfugié. Le président d'un organe de détermination du statut de réfugié a fait observer que, dans certains cas, des postulants dont la demande semblait à première vue injustifiée, en ce sens qu'elle ne mentionnait aucune raison de craindre la persécution, étaient par la suite considérés comme d'authentiques réfugiés. Il a confirmé que, comme le pensaient les personnes ayant l'expérience des procédures de détermination, il fallait s'entretenir longuement même avec les postulants qui, apparemment, ne satisfaisaient pas aux critères fixés pour s'assurer qu'ils avaient bien exposé les véritables raisons qui les avaient amenés à demander l'asile. Vu la complexité de la question et la nécessité, dans la plupart des cas, d'évaluer la crédibilité de l'intéressé, il serait souhaitable que les postulants soient interrogés chaque fois que possible par un représentant de l'autorité chargée de déterminer le statut de réfugié.

21. Selon les recommandations précédentes du Comité exécutif,7 c'est l'autorité chargée d'examiner les demandes de statut de réfugié et de prendre une décision en premier ressort devrait déterminer si une demande est manifestement injustifiée ou abusive. On peut soit charger cette autorité de déterminer directement si une demande est manifesteraient injustifiée ou abusive, comme dans le cas des procédures décrites plus haut, aux paragraphes 16 et 17, soit lui confier le soin de réexaminer la décision déjà prise, par exemple, par des fonctionnaires des services d'immigration, avant qu'elle soit mise en oeuvre. En examinant chaque cas, l'autorité compétente devrait prendre dûment en considération les faits particuliers invoqués par le postulant à l'appui de sa demande.

22. Quand uni demande est rejetée parce qu'elle est manifestement injustifiée ou abusive, il peut y avoir de bonnes raisons de ne pas accorder au postulant les possibilités de recours ou de réexamen qui sont offertes aux autres personnes ayant demandé le statut de réfugié. Vu l'importance de la question et les risques d'erreur, il semble cependant nécessaire de lui garantir une possibilité de recours, sous une forme ou sous une autre. L'utilité de cette mesure est démontrée par le fait que des tribunaux ont pris récemment des décisions reconnaissant que l'on avait déterminé à tort, en première instance, que certaines demandes étaient « de toute évidence sans fondement ». Dans plusieurs cas, en effet, il s'était avéré par la suite que les postulants étaient d'authentiques réfugiés. Ces exemples montrent combien il est risqué d'expulser ou de refouler un postulant dont la demande a été rejetée en se fondant sur la décision d'une seule autorité administrative.

Autres mesures visant à résoudre le problème des demandes injustifiées

23. Les procédures spéciales concernant les demandes manifestement injustifiées ou abusives permettent de se prononcer plus rapidement sur un nombre important de cas et peuvent donc, dans une certaine mesure, alléger la tâche administrative des autorités nationales et contribuer à abréger les délais. L'expérience a toutefois montré que le caractère frauduleux de nombreuses demandes dénuées de tout fondement n'était pas, décelable immédiatement En effet, beaucoup de demandes injustifiées, voire frauduleuses et abusives, n'apparaissent pas manifestement comme telles et ne peuvent être rejetées qu'après un examen approfondi de tous les éléments entrant en ligne de compte et une évaluation de la crédibilité du postulant. Ainsi, dans un pays, les demandes manifestement injustifiées représentent environ 20% du total et moins d'un tiers des demandes rejetées. Dans un autre, un peu plus d'un quart de l'ensemble des demandes de reconnaissance du statut de réfugié sont jugées de toute évidence sans fondement. Il reste un nombre important de demandes injustifiées qui ne peuvent pas être traitées comme des demandes « manifestement injustifiées ou abusives », c'est pourquoi il faut bien voir que les procédures spéciales prévues pour ces dernières ne permettent pas de résoudre entièrement le problème des demandes frauduleuses en général. La plupart des autorités s'accordent donc à penser qu'il faut prendre d'autres mesures qui complètent ou remplacent ces procédures.8

24. Il ne fait aucun doute que la lenteur des procédures de détermination du statut de réfugié - qui s'étendent souvent non pas sur des semaines ou des mois, mais sur des années - ne fait qu'aggraver le problème des demandes frauduleuses et, dans une certaine mesure, peut même inciter des personnes à présenter de telles demandes. La plupart des autorités nationales consultées conviennent que l'on pourrait trancher plus rapidement sans pour autant nuire à l'équité de la procédure si des ressources suffisantes étaient allouées à cet effet, et que cela serait probablement la solution la plus efficace. L'exemple d'un certain nombre de pays montre, en particulier, que l'on a tout intérêt à fournir un personnel suffisant aux autorités qui ont compétence pour déterminer le statut de réfugié en premier ressort. Dans un des pays les plus sollicités, le renforcement des effectifs, combiné à une nouvelle répartition des responsabilités en matière de recours entre plusieurs tribunaux différents s'est traduit par une constante diminution du nombre des demandes en attente. Il convient d'ajouter que quelques pays, pour éviter que certains postulants aient à pâtir d'une attente par trop prolongée, ont établi une procédure accélérée pour ceux qui, de toute évidence, ont des raisons valables de demander le statut de réfugié.

25. La lenteur des procédures de recours s'est révélée très préoccupante dans certains pays. La possibilité d'obtenir le réexamen d'une décision négative constitue une forme de protection extrêmement importante et il est souhaitable de confier cette tâche a un organe judiciaire ou administratif indépendant. L'issue de cette démarche pouvant avoir une importance fondamentale pour le postulant, il faut éviter de se prononcer trop hâtivement, même si la demande semble dénuée de fondement. D'après l'expérience de plusieurs pays, il semble toutefois possible de ramener à quelques mois le délai nécessaire pour prendre une décision définitive sur une demande tout en fournissant à l'intéressé les garanties de procédure voulues, y compris la possibilité de former un recours devant un tribunal indépendant. Pour les demandes jugées manifestement injustifiées, un pays prévoit un examen judiciaire sommaire, avec l'assistance d'un conseiller, qui ne prend que quelques semaines ou, dans les cas urgents, quelques jours. Les possibilités d'accélérer la procédure d'examen judiciaire varient, bien entendu, selon, le système juridique et judiciaire de chaque état, mais l'exemple de ce pays, entre autres, montre que la procédure de détermination du statut de réfugié peut très bien être à la fois rapide et équitable.

26. En dernière analyse, il est fort possible qu'il n'existe pas de moyen efficace de résoudre entièrement le problème des demandes injustifiées. Les efforts déployés pour empêcher que les demandes manifestement injustifiées ou abusives nuisent à l'efficacité des procédures de détermination peuvent n'offrir que des solutions partielles. Il est en tous cas indispensable que les mesures adoptées, quelles qu'elles soient, ne portent pas préjudice aux demandeurs d'asile de bonne foi.

Conclusions

27. Les demandes de reconnaissance du statut de réfugié présentées par des personnes qui, de toute évidence, n'ont aucune raison valable de prétendre à ce statut d'après les critères applicables posent un grave problème dans un certain nombre d'Etats parties à la Convention de 1951 et au Protocole de 1967. Ces demandes constituent une charge pour les pays concernés et nuisent aux intérêts des postulants qui ont de bonnes raisons de demander qu'on leur reconnaisse le statut de réfugié.

28. Les procédures nationales de détermination du statut de réfugié peuvent prévoir de dispositions spéciales utiles qui permettent de se prononcer rapidement sur les demandes qui apparaissent si peu fondées qu'elles ne méritent pas d'être examinées plus avant. Ces demandes, dites « manifestement abusives » ou « manifestement injustifiées », sont celles qui sont de toute évidence frauduleuses ou ne satisfont pas aux critères fixée pour l'octroi du statut de réfugié dans la Convention des Nations Unies de 1951. Elles comprennent les demandes qui n'ont visiblement, aucun rapport avec les critères applicables en la matière, les demandes fondées sur des allégations en contradiction avec les faits matériels connus des autorités compétentes et les demandes de reconnaissance du statut de réfugié présentées par des personnes qui bénéficient de l'asile dans un autre pays.

29. Lorsqu'on établit des procédures spéciales pour les demandes qui apparaissent manifestement injustifiées ou abusives, il convient d'accorder les garanties minimales ci-après :

a) La personne qui demande le statut de réfugié devrait pouvoir exposer en détail les raisons de sa demande lors d'un entretien personnel avec, chaque fois que possible, un fonctionnaire de l'autorité qui a compétence pour déterminer le statut de réfugié;

b) C'est l'autorité qui a normalement compétence pour déterminer le statut de réfugié qui devrait se prononcer sur le caractère manifestement injustifié ou abusif d'une demande;

c) Vu la portée d'une décision en vertu de laquelle une demande de statut de réfugié est jugée manifestement injustifiée ou abusive, et vu les graves conséquences que peut avoir pour l'intéressé une décision prise par erreur, les postulants dont la demande a été rejetée devraient avoir la possibilité de faire réexaminer cette décision avant qu'on les expulse ou qu'on les refoule. La procédure de recours peut être plus limitée et plus simple que celle prévue dans le cas des demandes rejetées qui ne sont pas considérées comme manifestement injustifiées ou abusives.

d) Les mesures prises pour résoudre le problème des demandes injustifiées ou abusives peuvent se révéler insuffisantes en cas d'afflux de personnes demandant le statut de réfugié. On pourrait atténuer les difficultés rencontrées :

i) en fournissant du personnel et des ressources suffisantes aux organes chargés de déterminer le statut de réfugié, pour leur permettre de s'acquitter rapidement de leur tâche;

ii) en prenant des mesures propres à réduire la durée de la procédure de recours.


1 Conclusions sur la protection internationale des réfugiés, adoptées par le Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire, Genève 1980. Conclusion No 8 (XXVIII) (1977), alinéa e) vii).

2 (EC/SCF/22/Rev.1, par. 25-28).

3 Conclusion No 28 (XXXIII) (l 982), alinéa d).

4 Le problème des demandes injustifiées de reconnaissance du statut de réfugié est par définition limité aux Etats qui ont adopté des procédures pour la détermination de ce statut et qui sont presque tous des Etats parties à la Convention de 1951 et/ou au Protocole de 1967. Dans ces Etats, la reconnaissance de ce statut est normalement liée au droit d'asile et entraîne la pleine jouissance des droits prévus par ces instruments internationaux.

5 Conclusion No 28 (XXXIII) (1982), par. d).

6 Recommandation No R(81) 16 sur l'harmonisation des procédures nationales en matière d'asile (adoptée Par le Comité des Ministres le 5 novembre 1981 lors de la 339ème réunion des délégués des Ministres), par. 4.

7 Conclusion No 8 (XXVIII) (1977), alinéa e) vii).

8 Les autorités de quelques pays qui reçoivent un grand nombre de demandes ont indiqué qu'il ne leur semblait pas nécessaire d'adopter des procédures spéciales pour éliminer les demandes manifestement injustifiées ou qu'il était difficile d'introduire de telles procédures dans le système juridique national.