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Alors que les rapatriés se réinstallent chez eux, les signes de renouveau et de réconciliation se multiplient en Angola

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Alors que les rapatriés se réinstallent chez eux, les signes de renouveau et de réconciliation se multiplient en Angola

Après presque trente années de guerre civile en Angola, des milliers de réfugiés sont finalement rentrés chez eux. Il leur faut maintenant relever le défi de la réintégration dans un pays que leurs enfants n'ont, pour la plupart, jamais connu. Le manque de perspectives professionnelles et le ressentiment de ceux qui sont restés en Angola pendant la guerre ne sont que quelques uns des nombreux problèmes rencontrés par les rapatriés. Pourtant, il existe de vraies raisons d'espérer.
13 Mars 2006 Egalement disponible ici :
Cazombo, Angola - L'UNHCR dispense une formation en pisciculture aux habitants de Cazombo, afin de fournir aux rapatriés aussi bien qu'aux rares personnes restées dans la région pendant la guerre, un nouveau savoir, des possibilités de revenus supplémentaires et une aide à la réconciliation.

CAZOMBO, Angola, 13 mars (UNHCR) - Le long de la route qui mène des ruines du pont qui traversait la rivière Zambèze à la ville angolaise autrefois désertée de Cazombo, les signes de renouveau se multiplient.

A l'aube, des villageois marchent en file indienne vers le champ communal pour former des monticules de terre autour des jeunes buissons de casava. D'un côté de la route, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés a aidé à la rénovation d'une école. De l'autre, un bâtiment blanc tout neuf va être consacré à une tâche indispensable à la réintégration des réfugiés rentrés dans leur pays après 27 années de guerre - un centre de réconciliation.

« Pendant la guerre, la majorité de la population soutenant le parti d'opposition venait du sud et ceux en faveur du parti au pouvoir venaient du nord », explique soeur Marie, qui appartient à l'ordre catholique Notre Dame du Sacré Coeur. Elle dirige ce centre, ouvert en juin dernier avec le soutien de l'UNHCR.

La population qui se trouve dans la région orientale de l'Angola compte aujourd'hui 100 000 personnes, après avoir été réduite à 5 000 habitants pendant les décennies de lutte entre les forces armées de l'opposition, l'UNITA, et le parti au pouvoir, le FNLA. « Les gens d'ici sont partis pour la Zambie ; seuls quelques uns sont restés. Une fois rentrés, ces gens ont des problèmes. Ceux qui sont restés pensent que les anciens exilés étaient tous en faveur de l'UNITA (opposition). Maintenant que la guerre est terminée, il faut qu'ils se réconcilient. »

Une petite bibliothèque, une pile de journaux ainsi qu'une formation en agriculture et en projets de micro-crédit attirent dans le centre un flot continu de visiteurs. Mais son objectif principal est d'amener les Angolais qui sont partis et ceux qui sont restés à s'unir pour oeuvrer ensemble à l'amélioration de leur vie dans l'un des pays les moins développés du monde.

« Peut-être qu'ils gardent des choses du passé enfouies dans leur esprit mais désormais ils parlent d'avenir », raconte soeur Marie, qui est originaire de Papouasie-Nouvelle-Guinée et vit dans le presbytère attenant à l'église rénovée de l'autre côté de la route. « Nous nous rendons souvent auprès des familles. Plus personne ne parle de la guerre. Ils discutent de choses de la vie courante et de la façon de reconstruire leurs existences. »

Rétablir la confiance entre les communautés est un élément central de la réintégration des millions d'Angolais qui ont fui, soit dans d'autres pays comme la Zambie et la République démocratique du Congo (RDC), soit dans d'autres régions de cet immense pays.

Des tensions politiques sous-jacentes demeurent à Cazombo, malgré l'accord de paix de 2002 qui a fait de l'UNITA un partenaire associé du gouvernement et a fait passer la lutte pour le pouvoir du combat armé à la compétition politique démocratique. Des élections nationales sont prévues pour 2007.

L'un des principaux problèmes évoqués par les rapatriés se pose à la jeune génération qui a grandi hors du pays. En effet, beaucoup ne parlent pas le portugais, la langue officielle de l'Angola. Au centre pour les femmes que l'UNHCR a aidé à construire en faveur des rapatriés de Luena, la capitale de la province de Moxico où se trouve Cazombo, tous parlent de ce problème de langue, qui affecte particulièrement leurs enfants.

« Les enfants arrivant de l'étranger - du Congo et de la Zambie - sont facilement repérés car ils ne parlent pas portugais », a indiqué le chef traditionnel lors d'une réunion. « Les rapatriés sont appelés les 'Zambiens'. Cela concerne aussi les enfants à l'école, ils font l'objet de moqueries ou sont même battus par d'autres enfants. »

Les rapatriés se plaignent aussi d'autres difficultés, notamment pour trouver un emploi. La plupart des réfugiés étant nés hors de l'Angola et ayant reçu une éducation en français en RDC ou en anglais en Zambie, leur manque de pratique du portugais est un problème compréhensible.

L'enseignement du portugais est dispensé, par exemple au centre de réconciliation de Cazombo. Cependant, avec près de 400 000 rapatriés arrrivés depuis la fin de la guerre, la plupart vont plutôt apprendre la langue de façon informelle.

Quelques parents regrettent que leurs enfants ne soient acceptés que dans des classes de niveau inférieur par rapport à celles où ils étaient à l'étranger. Mais les enfants qui réussissent à trouver une place dans le système scolaire angolais déjà surchargé apprendront le portugais, tout comme leurs parents avaient appris d'autres langues quand ils avaient été forcés de fuir.

La réintégration et la réconciliation doivent s'accompagner de meilleurs standards de vie pour toute la population dans les régions qui étaient déjà enlisées dans la misère, avant que les années de guerre ne les appauvrissent encore. Dans le cadre des limites imparties par ses ressources, l'UNHCR a accéléré le développement et a travaillé étroitement avec le gouvernement pour accroître sa capacité à conduire des changements dans le pays.

C'est en fait l'Angola qui déterminera l'allure de ses progrès. Sa richesse en ressources naturelles - pétrole, gaz et diamants - contraste avec sa position parmi les pays les moins développés au monde. Le gouvernement a annoncé des investissements majeurs dans les infrastructures, l'éducation et la santé. Cependant, à elle seule, la reconstruction du pont démoli sur la rivière Zambèze, que les villageois près de Cazombo traversent actuellement en pirogue, pourrait coûter environ deux millions de dollars.

Quelques rapatriés regrettent clairement d'être rentrés chez eux. Dans les camps de réfugiés des pays voisins, ils bénéficiaient de soins médicaux et d'éducation ; ils recevaient de la nourriture, alors qu'en Angola tout est plus cher et plus difficile à obtenir. Cependant, comme tous les réfugiés, les Angolais sont heureux de revoir les villes et les campagnes qu'ils avaient fuies ou dont ils avaient seulement entendu parler par leurs parents.

Dans un champ situé près de Luena, 33 membres d'une même famille vivent dans des abris de fortune, faits de tôle et de bâche en plastique fournies par l'UNHCR lors des pluies torrentielles d'hiver. Israël Satulou, le chef de ce groupe, est rentré par avion en décembre, dans le cadre de l'opération de rapatriement volontaire de l'UNHCR. De nombreux réfugiés avaient déjà quitté la Zambie et il ressentait lui aussi que c'était le moment de rentrer.

Il reconnaît que les conditions en Angola sont plus difficiles que prévues et il essaye néanmoins d'améliorer la vie des siens. Il a rapporté de Zambie un petit générateur solaire qui lui permet, la nuit, d'allumer une unique ampoule et une petite machine avec laquelle il peut piler le grain, ce qui lui fournit un revenu supplémentaire.

« Tous les problèmes ont une fin », dit-il. « Nous prions pour que cela arrive. »

Par Jack Redden à Cazombo et Luena