Le HCR est préoccupé par les effets de la situation sécuritaire catastrophique sur les déplacés iraquiens
Le HCR est préoccupé par les effets de la situation sécuritaire catastrophique sur les déplacés iraquiens
GENEVE, 13 octobre (UNHCR) - L'UNHCR a fait part ce vendredi de son inquiétude croissante face à la rapide détérioration de la situation humanitaire à laquelle font face des centaines de milliers de déplacés iraquiens, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays. L'UNHCR a fait part de ses craintes aux donateurs lors d'une réunion mercredi dans la capitale jordanienne, Amman.
Les délégués de l'UNHCR pour l'Iraq, la Jordanie, la Syrie et le Liban ont expliqué aux bailleurs de fonds que les déplacements provoqués par les violences sectaires permanentes en Iraq ont nécessité une réévaluation du travail et des priorités de l'agence dans toute la région, a indiqué Ron Redmond, porte-parole de l'UNHCR aux journalistes à Genève.
Il a indiqué que la priorité « est passée de l'assistance aux retours et l'aide pour quelque 50 000 réfugiés non iraquiens en Iraq à la fourniture d'aide à une partie des dizaines de milliers d'Iraquiens qui fuient désormais leur maison chaque mois. Beaucoup d'entre eux se déplacent vers d'autres pays dans le cadre de ce qui pourrait être qualifié d'exode régulier et silencieux. »
Le Gouvernement iraquien, l'UNHCR et ses partenaires estiment qu'il y a actuellement plus de 1,5 million de personnes déplacées en Iraq même. Certains sont déplacés depuis le début des années 90, mais les statistiques font aussi état de plus de 365 000 nouveaux déplacés qui ont fui leurs maisons et leurs communautés depuis que des assaillants non identifiés ont détruit l'importante mosquée chiite dans la ville de Samara en février.
L'augmentation des déplacements internes a également des répercussions à l'extérieur de l'Iraq, avec l'arrivée de davantage d'Iraquiens dans les pays voisins et au-delà. « Nous estimons que plus de 1,6 million d'Iraquiens se trouvent maintenant hors des frontières de leur pays, la plupart d'entre eux en Jordanie et en Syrie. Les autres sont en Iran », a indiqué Ron Redmond.
Il y aurait déjà quelque 500 000 Iraquiens en Jordanie et 450 000 en Syrie. Certains se trouvent hors d'Iraq depuis 10 ans ou plus, mais beaucoup ont fui depuis 2003 et l'UNHCR constate une augmentation régulière du nombre des arrivées. Les équipes de contrôle de l'UNHCR à la frontière syrienne, par exemple, rapportent maintenant qu'au moins 40 000 Iraquiens arrivent chaque mois.
Des dizaines de milliers d'autres se déplacent vers la Turquie, le Liban, l'Egypte, les Pays du Golfe et l'Europe. Dans les pays européens, les Iraquiens figurent au 1er rang des 40 nationalités, parmi les personnes ayant demandé l'asile au cours du 1er semestre 2006. Des statistiques reçues de 36 pays industrialisés pour les six premiers mois de l'année ont montré une augmentation de 50 % des demandes d'asile déposées par les Iraquiens par rapport à la même période en 2005.
« Alors que l'année dernière, nous avions vu plus de 50 000 Iraquiens rentrer chez eux depuis les pays voisins, cette année, nous avons constaté qu'environ 1 000 retours. Ceux qui partent sont bien plus nombreux », a ajouté Ron Redmond.
En Iraq, le gouvernement estime que plus de 50 000 personnes quittent leurs maisons chaque mois. Ces déplacements s'effectuant au milieu de la violence permanente en Iraq représentent un immense défi humanitaire et un poids énorme aussi bien pour les déplacés que pour les familles iraquiennes qui essaient de les aider dans les communautés d'accueil.
« Les immenses besoins, la violence persistante et les difficultés pour accéder aux déplacés font que le problème dépasse les capacités des agences humanitaires, y compris de l'UNHCR », a indiqué Ron Redmond, ajoutant : « Plus cette situation dure, plus les ressources des déplacés internes et de leurs communautés d'accueil s'amenuisent. »
Des milliers de déplacés vivent dans des bâtiments publics et des écoles, souvent dans des installations improvisées et dans des camps gouvernementaux administrés par le Croissant Rouge iraquien. Il y a un besoin urgent d'hébergement, de matériel d'aide, de nourriture, d'accès à l'eau et au travail. Souvent les déplacés n'ont aucun papier d'identité, se faire enregistrer dans un nouveau lieu prend parfois des mois. Les femmes et les enfants sont de plus en plus vulnérables à toute forme d'exploitation et d'abus.
« Je n'ai aucune idée de quoi sera fait notre avenir », raconte Assad, un enfant de 10 ans, dont la famille s'est réfugiée, il y a trois mois, dans la ville de Nasiriyah, au sud, pour échapper à la violence sectaire dans leur village d'origine de Baji, dans la région de Salah-el-Din. « Notre vie a complètement changé. Nous n'avons même pas pu prendre nos affaires à Baji, parce que les combattants nous ont forcés à tout laisser derrière nous. »
Aussi bien en Iraq que dans les pays voisins, un nombre de plus en plus important de familles deviennent dépendantes et démunies. La tradition d'accueil est également en train de disparaître dans certains pays voisins, avec l'adoption de mesures de plus en plus restrictives sur la durée du séjour et l'extension des visas.
Ron Redmond de l'UNHCR a appelé « les pays voisins à continuer à faire preuve d'hospitalité et à offrir une protection temporaire aux Iraquiens, et pour les pays plus éloignés de la région, de les aider à supporter ce fardeau. »
Lors de la réunion des donateurs mercredi, l'UNHCR a expliqué que sur les 29 millions de dollars pour son budget 2006 pour l'opération iraquienne, il manquait quelque neuf millions et qu'il y avait maintenant beaucoup de nouveaux groupes vulnérables qui avaient besoin d'une aide urgente. Des activités risquent d'être supprimées avant la fin de l'année si des fonds n'arrivent pas.