Un adolescent du Honduras fuit l'homophobie et recommence une nouvelle vie au Mexique
Un adolescent du Honduras fuit l'homophobie et recommence une nouvelle vie au Mexique
TAPACHULA, Mexique, 4 août (HCR) - Depuis son plus jeune âge, Antonio* et son entourage savent qu'il est différent. « Ma famille, en particulier mon père, s'est vite aperçue que je me comportais différemment. On me disait toujours que ce que je faisais était mal ... que j'étais né garçon et que je devais me comporter en conséquence, » se souvient l'adolescent hondurien.
Son père le battait avec ses poings, un bâton, une ceinture ou même une pierre. « Il insultait et battait aussi ma mère, la rendant coupable d'avoir donné naissance à un garçon qui était plus heureux avec les filles de la famille, à jouer avec des poupées, à cuisiner et à rester à la maison. »
Dans l'environnement rural et conservateur dans lequel il a grandi, les homosexuels sont perçus comme anormaux et sont exposés aux abus. La vie d'Antonio est devenue tellement insoutenable, qu'il a finalement décidé de partir à l'étranger pour échapper aux persécutions.
Après quelques faux départs, en octobre dernier sa route l'a amené à Tapachula, une ville située sur la frontière Sud entre le Mexique et le Guatemala. Tapachula est aussi située sur une route de migration importante de l'Amérique du Sud vers les Etats-Unis.
« Nous étions huit à essayer de passer clandestinement le poste de contrôle lorsque les autorités de l'immigration sont arrivées » a raconté l'adolescent âgé de 16 ans au personnel du HCR, qui surveille la frontière à la recherche de réfugiés et de demandeurs d'asile. « Ils ont tous couru sauf moi. »
Antonio a déposé une demande d'asile. Depuis, il a reçu le statut de réfugié. Des cas comme celui-ci sont rares, mais ils méritent la protection du HCR tout comme les autres cas plus traditionnels. La plupart des réfugiés et des demandeurs d'asile fuient les conflits ou les persécutions, alors que ses sept compagnons à la frontière étaient des migrants économiques qui fuyaient la pauvreté.
Le jeune hondurien a traversé beaucoup de souffrances dans sa courte vie. Depuis son plus jeune âge, il a été victime d'abus sexuels et physiques, d'exclusion sociale et de discrimination par différents membres de sa famille et de sa communauté. Lorsqu'il a eu 14 ans, Antonio s'est enfui de chez lui et a quitté l'école, où il avait également été victime de discrimination et d'abus.
Antonio a trouvé un travail dans une boutique de mode. « Comme j'avais peur d'être rejeté, j'ai essayé de cacher mon homosexualité, de contrôler mes gestes et ma façon de parler, mais les autres s'en sont quand même aperçu et lorsque la propriétaire a été au courant de mon orientation sexuelle elle m'a renvoyé, » a-t-il expliqué, ajoutant : « C'était une personne très religieuse et pour elle j'étais un pécheur. »
Il a déménagé dans une autre ville et trouvé un autre travail dans un magasin de vêtements, mais le cauchemar a vite recommencé. Lorsque son nouvel employeur a réalisé qu'Antonio était homosexuel, il l'a verbalement agressé sans le renvoyer. Antonio dit qu'il a commencé à craindre pour sa vie parce que son patron portait toujours un revolver.
Les choses ont empiré. « Si je faisais une erreur, il me frappait et demandait même aux autres employés de me frapper. Il menaçait souvent de me tuer ou de tuer ma famille et mes amis si j'osais quitter mon travail ou le dénoncer. »
A la fin, Antonio a pris son courage à deux mains pour quitter le Honduras avec son ami Enrique et essayer de rejoindre les Etats-Unis, où les homosexuels sont mieux acceptés. « Mais nous avons été arrêtés et déportés au Mexique. Lors de notre deuxième tentative nous avons réussi à rentrer aux Etats-Unis mais ensuite nous avons été pris et renvoyés au Honduras. »
La troisième fois, Antonio est arrivé à Tapachula, où il a été arrêté. Il a été envoyé dans un centre de détention des migrants. Là, il a rencontré un chargé de protection des enfants de l'Institut National des Migrations « Je lui ai raconté ce que j'avais vécu et je lui ai dit que j'avais peur de retourner au Honduras. J'ai appris que mon ancien patron était venu chez moi et avait dit à ma famille que dès que je rentrerai il reviendrait pour me tuer. »
Le cas d'Antonio a été renvoyé devant la Commission Mexicaine d'Aide aux Réfugiés (COMAR). Il a demandé l'asile et obtenu le statut de réfugié sur la base de son appartenance à un groupe social particulier.
« J'aimerais que ma mère et que ma soeur aînée puissent venir vivre avec moi », dit Antonio, qui devra rester dans un centre pour mineurs jusqu'à ses 18 ans. Il est cependant très optimiste sur l'avenir et plein de projets. Il s'est inscrit à un cours d'esthétique avec l'aide de la COMAR.
« Avec l'aide de Dieu, j'aimerais avoir un jour mon propre salon de beauté. Je veux également étudier l'anglais et obtenir un diplôme de langues. Je sais que je vais y arriver parce que toutes les personnes que je connais disent que j'apprends très vite. »
Et c'est vrai. Au Mexique, Antonio a appris à faire de la broderie. Il vend son travail pour mettre de l'argent de côté et l'envoyer à sa mère. « Je veux aider ma mère pour qu'elle ne souffre plus. C'est elle qui soutient toute la famille, » a-t-il dit ajoutant : « Je veux raconter mon histoire pour que les personnes qui sont dans la même situation que moi sachent qu'elles ne doivent pas avoir peur ... [qu'elles peuvent] demander et de l'aide et tout quitter comme je l'ai fait. »
* Le prénom a été changé pour des raisons de sécurité
Par Mariana Echandi à Tapachula, Mexique