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Un périple difficile du Soudan mène à la sécurité et aux privations

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Un périple difficile du Soudan mène à la sécurité et aux privations

Portant des enfants sur le dos, des rescapés soudanais épuisés par leur périple recherchent abris et aide dans le camp de réfugiés de Doro au Soudan du Sud.
23 Décembre 2011 Egalement disponible ici :
Des réfugiés soudanais font la queue pour obtenir des articles domestiques tels que couvertures, moustiquaires et casseroles dans le camp de Doro au Soudan du Sud.

CAMP DE DORO, ETAT DU HAUT NIL, Soudan du Sud, 22 décembre (HCR) - Des personnes épuisées et désespérées font la queue près de la route poussiéreuse dans l'espoir d'obtenir de quoi survivre. Elles ont voyagé pendant des semaines pour atteindre cet endroit, vivant dans la crainte constante de la violence. Elles portaient des enfants sur leur dos ainsi et quelques affaires sur leur tête ou dans leurs bras.

Rebecca Barnaba, 23 ans, arrive à 7h30 et fait la queue dans l'espoir de recevoir une couverture. Comme plus de deux mille autres réfugiés, elle discute avec les personnes autour d'elle pendant que la file d'attente pour obtenir marmites, casseroles, savon, moustiquaires et autres articles domestiques avance petit à petit. Malgré la chaleur et la foule, l'humeur est presque festive. Les femmes rient et parlent entre elles. Quand Rebecca Barnaba atteint le bout de la file, le soir approche. Il n'y a plus de marmites, ni de moustiquaires et ni de savon. « Il y a des couvertures et j'en ai besoin », déclare-t-elle. « Les nuits sont froides et je ne veux pas que mes enfants tombent malades ».

Les réfugiés, en provenance de l'Etat du Nil Bleu au Soudan, affluent vers le Soudan du Sud par trois passages frontaliers distincts. La population du camp de Doro s'élève à plus de 25 000 personnes, et plus de la moitié des nouveaux arrivants sont des enfants. Le HCR a enregistré tous les nouveaux arrivants et a fourni des produits de base pour la survie et des vivres à quelque 19 000 réfugiés. La distribution de articles de secours est déjà difficile dans les meilleures conditions, et les problèmes logistiques sont encore plus grands quand des centaines de réfugiés affluent quotidiennement dans l'Etat du Haut Nil. « Ils ont tout abandonné, ils sont effrayés », déclare Ahmed Moshen, 37 ans, chargé de protection du HCR. « Ils ont dû marcher pendant des semaines pour arriver ici ».

Un pont aérien visant à acheminer des provisions supplémentaires a eu lieu hier. Au cours des prochaines semaines, environ 285 tonnes de provisions de secours et des milliers de tentes - suffisamment pour 60 000 personnes - seront acheminés par avion en provenance du Kenya et des Emirats arabes unis, puis transportés par camions vers les camps de réfugiés situés dans les Etats du Haut Nil et d'Unity. Le HCR prépare le terrain pour un deuxième camp, Jamman, capable d'accueillir les 15 000 réfugiés actuellement en rade dans le village de El Foj près de la frontière avec le Soudan. L'agence et ses partenaires s'empressent de monter des tentes et de satisfaire les besoins en matière de santé, de nourriture et d'éducation avant le printemps. Les pluies arriveront alors d'Ethiopie et l'accès au camp sera entravé à cause des routes inondées.

La région, qui était un champ de bataille pendant la guerre civile soudanaise des années 1980 et 1990, est minée - ce qui crée un autre problème pour les travailleurs humanitaires et les réfugiés. Des équipes du Centre de coordination de la lutte anti-mines des Nations Unies et du Norwegian People's Aid continuent de déminer la zone.

Le voyage de Rebecca Barnaba vers le camp de Doro en provenance de sa ville d'origine de Chale dans l'Etat du Nil Bleu au Soudan a duré 20 jours. Les villages de cette région sont fréquemment la cible de raids aériens. Quand Rebecca Barnaba a entendu les bombardements, elle a fui aussi vite que possible, n'emportant que ses quatre enfants et un peu de nourriture. Elle a attaché le plus jeune, Robert, 2 ans, dans son dos. Les autres, dont Henson, 3 ans, et Amenta, 4 ans, ont marché à côté d'elle. Elle avançait au rythme de ses enfants, jetant constamment un oeil sur les bombardiers dans le ciel.

Ici, elle peut au moins dormir sans craindre de violences. Mais la famille dort sous un arbre et mange dans une unique marmite. « Je m'allonge et je vois les étoiles la nuit mais je ne pense à rien », affirme Rebecca Barnaba. « Ici, nous sommes en sécurité mais nous n'avons rien. Chez nous, nous avons tout mais nous ne sommes pas en sécurité ».

D'autres ont moins de chance. Omar Said Bomfa, 56 ans, est couché sur un lit d'hôpital, les jambes enflées et portant des plaies le long des muscles des mollets. Quand il a entendu les bombes tomber près de chez lui, il a hissé son enfant de quatre ans sur une épaule et un sac de sorgho de 30 kg sur l'autre. Il a marché pendant deux jours, trop effrayé pour se reposer. Le troisième jour, il a réalisé que son corps était gonflé et ses bras engourdis. Lors de son passage de la frontière, Omar a été emmené dans un hôpital local par des employés de Médecins Sans Frontières, l'un des partenaires opérationnels du HCR. « Il avait une thrombose et un oedème à chaque jambe », affirme le Dr Evan Atar, médecin à l'hôpital de Bunj. « Quand il est arrivé ici, il était incapable de parler ».

L'hôpital de Bunj, à trois kilomètres environ du camp de Doro, est un dispensaire. Certains équipements proviennent de l'Etat du Nil Bleu, apportés par les médecins locaux contraints de fuir. L'ONG Samaritan's Purse apporte désormais son soutien pour améliorer les équipements et les services. Le Dr Evan Atar explique que sa plus grande crainte est la propagation des maladies à transmission hydrique comme le choléra. Pendant leur périple à travers la frontière, les réfugiés boivent essentiellement l'eau des ruisseaux crasseux qui servent aussi au bétail.

La santé constitue l'une des nombreuses priorités du HCR et de ses partenaires. Médecins Sans Frontières a créé une clinique dans les environs du camp et évalue actuellement les besoins en matière de nutrition. Pendant ce temps, Oxfam s'empresse de forer de nouveaux trous de sonde pour satisfaire les besoins en eau potable de la population de plus en plus nombreuse.

« Nous faisons au mieux face aux défis auxquels nous sommes confrontés », déclare Koffi Adossi, chef de la sous-délégation du HCR dans l'Etat du Haut Nil. « Mais nous ne sommes pas au bout de notre peine ».

Par Greg Beals dans le camp de réfugiés de Doro, Soudan du Sud. Greg Beals, écrivain et journaliste, est actuellement en mission pour le HCR en Afrique de l'Est.