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L'hiver menace les Vénézuéliens déracinés et peu préparés aux conditions hivernales

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L'hiver menace les Vénézuéliens déracinés et peu préparés aux conditions hivernales

Alors que le froid s'empare de l'Amérique du Sud, les réfugiés et migrants vénézuéliens vulnérables se préparent à affronter de nouvelles difficultés.
29 Mai 2020 Egalement disponible ici :
Une famille vénézuélienne déplacée qui a perdu ses revenus à cause de la pandémie de Covid-19, photographiée dans sa maison à Santiago, au Chili, en mai 2020.

Plusieurs mois après leur arrivée au Chili, au terme d'un périple fastidieux de 7000 kilomètres par la route depuis leur domicile au Venezuela, la famille Diaz avait finalement retrouvé une certaine stabilité. Eileen, la mère, venait de donner naissance à un petit garçon en bonne santé, et le père, José Domingo, venait d'obtenir un emploi dans la capitale chilienne, Santiago. Puis est arrivée la pandémie de coronavirus, qui a ramené la famille à la case départ.


José Domingo a perdu son emploi, et il est devenu pratiquement impossible pour cette famille de quatre personnes de couvrir leurs besoins essentiels, comme la nourriture et le logement.

Et alors qu'il semblait que les choses ne pouvaient guère s'aggraver, les températures ont commencé à chuter à l'approche de l'hiver rigoureux qui caractérise l'hémisphère sud, et qui s'étend de juin à septembre.

« Nous sommes vraiment inquiets pour l'hiver... Ce sera la première fois que nous allons expérimenter les conditions hivernales et le froid », a expliqué Eileen, ajoutant que, chez eux à Caracas, les températures au milieu de l'hiver descendent rarement en dessous de 17°C. À Santiago, en revanche, les températures inférieures à 10°C sont la norme en hiver. « Nous ne sommes pas préparés. Nous n'avons pas de manteaux épais, ni de chauffage, ni même de couvertures. »

Dans le sillage de la pandémie de Covid-19, l'approche de l'hiver est une source d'anxiété supplémentaire pour beaucoup parmi les plus de cinq millions de Vénézuéliens qui vivent hors de leur pays en raison de la crise actuelle.

« Nous sommes vraiment inquiets pour l'hiver... Ce sera la première fois que nous allons expérimenter le froid. »

La pandémie de coronavirus a fait des ravages dans le monde entier, entraînant la perte de millions d'emplois et l’asphyxie économique. Selon une estimation des Nations Unies, la pandémie et les mesures de confinement visant à enrayer la propagation du virus pourraient plonger un demi-milliard de personnes dans la pauvreté d'ici la fin de l'année.

Les réfugiés sont encore plus vulnérables aux effets de la crise que le reste de la population. Ils vivent souvent dans des logements surpeuplés et insalubres, et ont des emplois précaires dans le secteur informel. Ils ne disposent pas des moyens nécessaires pour prendre des mesures de prévention contre la propagation du virus ou pour faire face aux conséquences financières de la quarantaine. Ils sont des milliers à être confrontés à un choix cornélien entre souffrir de la faim et défier les consignes de confinement pour chercher à se faire un peu d'argent ou même mendier dans les rues. Sans argent pour payer leur loyer, beaucoup ont déjà été expulsés et luttent pour leur survie dans la rue.

Et comme les réfugiés et les migrants vénézuéliens ont fui les pénuries alimentaires, ainsi que l'inflation et l'insécurité généralisées dans leur pays, ils sont souvent dans un état de santé précaire, avec un système immunitaire affaibli qui les expose à un risque accru face au virus.  

Pour les quelque 1,5 million de Vénézuéliens vivant dans les cinq pays du sud de l’Amérique latine et dans la nation andine du Pérou, où le climat hivernal est tout aussi glacial, l'hiver ne pouvait donc pas tomber à un pire moment.

« Nous sommes inquiets car la pandémie a vraiment aggravé nos conditions de vie », a déclaré Eileen, une cuisinière de 30 ans qui dirigeait une petite entreprise à Caracas. « Nous avions fait de grands progrès en direction de nos objectifs mais, malheureusement, le coronavirus les a complètement annihilés. »

José Ignacio Peralta, qui travaille à Santiago pour l'organisation humanitaire World Vision International, a averti que les mois d'hiver risquent d'entraîner non seulement une recrudescence des infections au coronavirus, mais aussi toute une série d'autres maladies dues au froid.

« En plus du Covid-19, nous allons voir un tas d'autres maladies respiratoires telles que la grippe, ce qui entraînera une augmentation des besoins en soins médicaux », a-t-il expliqué. « Nous nous attendons également à une hausse du nombre de familles ayant besoin d'une aide en matière de logement, de repas chauds et d'équipement pour le froid. »

Heureusement, Eileen et sa famille font partie des centaines de réfugiés et de migrants vénézuéliens dans le besoin qui ont reçu du HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et de son partenaire au Chili, World Vision, une aide spécifique pour les mois d'hiver. Près de 800 bons d’achat électroniques ont été distribués pour permettre aux familles, comme les Díaz, d'acheter des radiateurs, des couvertures et des vêtements chauds grâce à un code-barre transmis à distance, par courrier électronique.

Au Chili et ailleurs, le HCR augmente ses allocations d’aide pour le paiement du loyer, afin de permettre aux familles vulnérables de conserver leur logement, et distribue également des colis alimentaires, des kits d'hygiène et des couvertures.

« En plus du Covid-19, nous allons voir un tas d'autres maladies respiratoires. »

Étant donné l'ampleur des besoins - qui sont exacerbés par le double défi que représentent la pandémie et l'hiver qui approche - le soutien apporté aux activités humanitaires est essentiel. Le plan de réponse du HCR en faveur des réfugiés et des migrants vénézuéliens est dangereusement sous-financé, avec seulement 12% des fonds requis reçus à ce jour.

Une conférence internationale des donateurs dédiée à la solidarité envers les réfugiés et les migrants vénézuéliens a eu lieu via Internet le 26 mai. Des représentants de plus de 60 pays, ainsi que d'agences des Nations unies, d'institutions financières internationales et de la société civile, se sont réunis pour traiter de cette crise sans précédent et pour mobiliser des ressources en faveur des populations déracinées et des principales communautés d'accueil, ainsi que pour renforcer les efforts de coordination entre les principaux acteurs.

L'hiver qui se prépare dans l'hémisphère sud ne fait qu'intensifier les difficultés auxquelles sont confrontés les Vénézuéliens déracinés, a indiqué la porte-parole du HCR Shabia Mantoo lors d'une conférence de presse à Genève ce vendredi.

« Au-delà des risques sanitaires, les mesures de confinement liées au Covid ont déjà engendré de graves difficultés pour les réfugiés et les migrants vénézuéliens », a-t-elle indiqué. « Avec l'approche de l'hiver, le HCR se prépare à une aggravation de la crise. »

Maritza Pino Zambrano, une ancienne employée de boulangerie de 37 ans originaire de l'ouest du Venezuela, tente de voir le bon côté de la pandémie, qui lui a coûté son emploi dans un restaurant de la ville andine de Cuzco, au Pérou, où elle et sa famille ont trouvé la sécurité.

Les hivers dans la ville de Cuzco - qui est perchée à une altitude de près de 3400 mètres - sont connus pour être très rigoureux. Martiza essaie de se consoler en se disant que la perte de son emploi signifie qu'au moins elle n'aura plus à braver les éléments sur le chemin du travail et qu'elle pourra rester bien à l'abri dans la petite chambre qu'elle partage avec son mari et leur fils de dix ans.

« Lorsque vous sortez, vous pouvez tomber malade et ensuite transmettre la maladie à toute la famille », se justifie-t-elle.

Pourtant, la réalité de leur situation actuelle est très difficile. Ils se débrouillent avec les quelques dollars que son mari, mécanicien, ramène à la maison après un petit boulot occasionnel, en plus de l'aide humanitaire qu'ils reçoivent du HCR et d'autres organisations.

« Nous avons l'impression d'avoir un nœud coulant autour du cou », dit Maritza. « Je prie pour que tout cela se termine. »