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L'asile en Hongrie : crise évitée, mais des défis à relever

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L'asile en Hongrie : crise évitée, mais des défis à relever

Lorsque la Hongrie a rejoint l'Union européenne en mai 2004, le pays s'attendait à une explosion des demandes d'asile, mais finalement celles-ci ont plutôt diminué. Les réfugiés et les demandeurs d'asile dans ce pays doivent toutefois relever de nouveaux défis.
18 Mai 2005
Des réfugiés dans un centre de réception en Hongrie. Ils rencontrent de nombreuses difficultés dans l'accès au travail, au logement, aux soins de santé et à l'éducation.

BUDAPEST, Hongrie, 18 mai (UNHCR) - Lorsque la Hongrie a rejoint l'Union européenne en mai 2004, le pays s'attendait à une explosion des demandes d'asile, mais finalement celles-ci ont plutôt diminué. Les réfugiés et les demandeurs d'asile dans ce pays doivent toutefois relever de nouveaux défis.

Depuis début 2005, quelque 400 personnes ont déposé une demande d'asile en Hongrie, un nombre restreint comparé au niveau dans d'autres nouveaux pays de l'Union, tels que la Slovaquie et la Pologne. A son apogée, en 1999, le nombre de demandes d'asile en Hongrie était de 11 500, principalement en provenance de l'ex-Yougoslavie. Cependant, ce nombre a diminué de façon constante depuis 2002, de 86 pour cent en 2004, tombant à 1 600 demandes d'asile, le chiffre le plus bas de ces dernières années.

La Hongrie est située au coeur de l'Europe, au carrefour des routes d'immigration. Cependant, il semble que ces dernières années, les gens ont cessé de l'utiliser comme pays de transit vers l'Ouest, plus développé.

« Les itinéraires utilisés par les trafiquants ont été déplacés au nord de la Hongrie, car notre capacité de surveillance des frontières externes de l'Union a été considérablement améliorée », déclare László Balázs, le chef de la police des étrangers au quartier général hongrois du service des frontières. « Ces dernières années, nous avons reçu de l'UE - pour un total de 63 millions d'euros - des nouveaux véhicules, des caméras infrarouges et des ordinateurs, et nos équipes ont reçu une formation. Nous sommes donc capables de combattre de façon efficace l'immigration illégale vers la Hongrie. »

L'impact des restrictions aux frontières reste à débattre. Cette approche rend difficile l'équilibre entre la réduction de l'immigration illégale d'une part, et la protection et l'aide aux réfugiés en Hongrie, d'autre part. Malgré la baisse du nombre de demandes d'asile, de nouveaux défis sont apparus pour les demandeurs d'asile, les réfugiés et les organisations humanitaires chargées de leur protection. Ces problèmes nécessitent des solutions bien plus complexes et sophistiquées que la simple mise à disposition d'un abri et de l'aide humanitaire, essentielle lors des crises de grande ampleur, telles que le conflit des Balkans.

Une partie du problème est due au changement de la nature de l'asile au cours des années. Lorsque le nombre de demandes d'asile était élevé, beaucoup quittaient la Hongrie avant que leur statut de réfugié ne soit déterminé. Depuis, la durée moyenne des séjours en centres d'accueil de l'Etat est passée de 60 jours à la fin des années 90, à plus de 220 aujourd'hui. Les autorités doivent donc mettre en oeuvre des solutions de longue durée au lieu de l'assistance et de l'aide à la subsistance à court terme des années précédentes. De plus, les demandeurs d'asile qui reçoivent le statut de réfugié restent de plus en plus en Hongrie et s'y intègrent au lieu de partir vers l'étranger.

En conséquence, les besoins des réfugiés en éducation, en emploi, en cours de langue, en logement et en soins de santé ont augmenté de façon significative. Si les réfugiés ne bénéficient pas d'un accès à l'éducation et au logement, le risque qu'ils deviennent les victimes de passeurs et de trafiquants d'êtres humains augmente grandement. Rester dans le pays en dépit de ces nombreuses difficultés représente un véritable défi pour eux.

« C'est très difficile d'être un réfugié en Hongrie », explique Yahya Al-Jubery*, 24 ans, un réfugié, originaire de Palestine, dont le statut a été reconnu. « C'est parce que j'ai un fils de trois ans et que je ne veux pas lui imposer des déplacements, sinon je quitterais ce pays pour un endroit où j'ai de meilleures chances de m'établir. »

Il poursuit : « Je suis ici depuis plus d'un an et je n'ai toujours pas trouvé de travail. Les employeurs ne veulent pas m'engager, car je ne parle pas hongrois. Mais en tant que tapissier, je n'ai pas besoin de parler une langue pour mon travail. Je gagne ma vie grâce à de petits boulots et des travaux physiques, mais ce n'est pas facile pour un père célibataire avec un enfant. »

Les réfugiés qui quittent les centres de réception pour des appartements privés reçoivent du Bureau pour l'immigration et la nationalité (BIN, le département gouvernemental en charge de ce dossier) quelque 12 000 forints hongrois (l'équivalent de 60 dollars) pour leurs frais, et 6 000 forints du gouvernement, comme allocation familiale. Cependant, le coût de la vie par mois et par personne peut atteindre les 80 000 forints. Les réfugiés doivent donc absolument travailler pour survivre. Ils ne sont pas en droit de recevoir des allocations de chômage, pour lesquelles il faut avoir travaillé légalement au moins une année ininterrompue dans le pays. C'est un cercle vicieux ; la seule façon de s'en sortir est d'utiliser des réseaux informels, des contacts individuels et une bonne dose d'ingéniosité.

Abu Sule*, un réfugié de 34 ans originaire de la Sierra Leone, survit grâce à un commerce modeste, des petits boulots et le soutien financier occasionnel d'amis vivant à l'étranger.

Lorsqu'on lui demande pourquoi il reste en Hongrie malgré toutes ces difficultés, il déclare : « Je suis ici depuis sept ans. Je n'ai plus de famille au pays et j'en ai assez de fuir. J'ai l'intention de rester en Hongrie, car je m'y sens en sécurité, même si mes rêves de vie normale sont encore très, très loin. »

La vie n'est pas plus facile dans les centres de réception pour réfugiés. Le BIN a été forcé de réduire le nombre de travailleurs sociaux, même si la quantité de réfugiés reconnus, qui restent plus longtemps, et qui ont besoin de plus de soutien quotidien pour leur intégration, a été multiplié par trois.

Le BIN est surchargé et sous-financé. « Malgré les contraintes financières, le BIN doit à présent répondre à un défi énorme : établir une stratégie générale sur le plan national, qui prendrait en compte et viserait à résorber les nombreux désavantages auxquels doivent faire face les réfugiés et les personnes qui bénéficient de la protection subsidiaire en Hongrie », déclare Agnes Garamvölgyi, la directrice du BIN pour les questions relatives aux réfugiés.

Un développement positif est à signaler : les différentes sources de l'UE aident à combler les besoins financiers pour les projets liés à l'asile et à l'intégration. L'UE finance actuellement un programme de jumelage concernant l'intégration des réfugiés. D'une durée de 15 mois, ce programme finance à hauteur de 750 000 euros des projets en Grèce et en Hongrie. Le Fond européen pour les réfugiés (FER) a également distribué un total de 825 000 euros pour 20 projets d'aide et de soutien à la subsistance, d'intégration et de rapatriement volontaire.

Deux faiblesses importantes sont cependant à relever. Les organismes qui demandent à bénéficier de fonds du FER doivent fournir eux-mêmes 25 pour cent des contributions, ce dont la plupart sont incapables. D'autre part, la majorité des projets sont financés pour une durée limitée, de six à 10 mois ; même les projets les plus remarquables n'ont pas l'assurance d'être reconduits.

L'UNHCR a modifié sa stratégie et ses activités pour s'adapter aux réalités opérationnelles qui ont changé en Hongrie. « Lorsque l'UNHCR a commencé à travailler ici, nous traitions de grands mouvements de population en provenance de Roumanie et, ensuite, de l'ex-Yougoslavie. Nous avions des budgets importants et beaucoup de partenaires sur le terrain », explique Lloyd Dakin, le délégué régional de l'UNHCR, basé en Hongrie. « Quand ces situations se sont stabilisées, nous avons réorienté nos efforts vers le développement et l'augmentation de la capacité d'accueil du système d'asile hongrois. »

Il ajoute : « Maintenant, le système d'asile est bien en place et fonctionne de mieux en mieux chaque année. L'UNHCR se focalise donc de plus en plus sur le besoin d'intégrer les réfugiés, ce qui demande de nouvelles formes de coopération avec les partenaires gouvernementaux et non gouvernementaux ainsi qu'avec l'UE et d'autres organisations internationales. »

Selon L. Dakin, le plus grand défi pour l'UNHCR et ses partenaires sera d'assurer des solutions pratiques efficaces et une aide aux réfugiés en Europe, alors que le débat politique au sujet de l'immigration et des réfugiés fait rage. Les besoins avérés des réfugiés ne doivent pas être négligés en raison de l'opinion publique négative, opinion sans fondement, ni à cause du système mis en place pour leur venir en aide. Les réfugiés en Europe ont besoin et méritent de vraies solutions à leur situation. En l'absence de telles solutions, ils seront menacés de marginalisation sociale, de privations, et leur présence dans les pays d'accueil ne sera plus considérée comme un atout, mais comme un fardeau.

* Les noms ont été changés pour protéger l'identité des réfugiés.

Par Andrea Szobolits, UNHCR en Hongrie