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Déclaration de l'Émissaire du HCR Angelina Jolie au sujet des 4 millions de réfugiés et de migrants vénézuéliens

Communiqués de presse

Déclaration de l'Émissaire du HCR Angelina Jolie au sujet des 4 millions de réfugiés et de migrants vénézuéliens

8 Juin 2019 Egalement disponible ici :
L'Émissaire du HCR Angelina Jolie à la conférence de presse tenue au Integrated Assistance Centre de Maicao, Colombie, le 8 juin 2019.

En 2002, 2010 et 2012, je me suis rendue en Équateur où j'ai rencontré quelques-uns des nombreux Colombiens qui avaient fui le conflit. 

J'avais alors dit aux familles rencontrées que j'étais impatiente de me rendre en Colombie après le rétablissement de la paix pour que les réfugiés puissent rentrer chez eux. 

Aujourd'hui, j'ai rencontré des réfugiés colombiens qui sont revenus dans leur pays, mais pas pour les raisons que j'avais espérées. 

Plus de 400 000 Colombiens déracinés au Venezuela ont été contraints de prendre le chemin du retour en raison de la situation catastrophique au Venezuela. 

Ils viennent grossir les rangs des quelque 1,3 million de réfugiés vénézuéliens qui sont venus chercher protection en Colombie.

Par ailleurs, 3,3 millions de ressortissants vénézuéliens passent la frontière pour de courtes périodes afin de s'approvisionner et d'obtenir une assistance essentielle.

Cette situation a un impact phénoménal sur les services publics colombiens. 

Certains des hôpitaux proches de la frontière fournissent aujourd'hui des soins d'urgence à autant de Vénézuéliens que de Colombiens.

Dans de nombreuses écoles, le nombre d'élèves a doublé dans les classes. 

« C'est une situation de vie ou de mort pour des millions de Vénézuéliens. »

Malgré tout, la Colombie a gardé ses frontières ouvertes et fait son possible pour absorber un nombre sans précédent de personnes désespérées. 

Les Colombiens ne savent que trop ce que signifie être déplacé. 

Ce pays a connu 50 ans de guerre.

L'accord de paix a moins de trois ans et il est fragile. 

Il est extraordinaire de constater qu'un pays lui-même confronté à des problèmes aussi considérables puisse montrer tant d'humanité et de déployer autant d'efforts pour sauver des vies. Je veux rendre hommage au courage, à la force et à la résilience du peuple colombien. 

La situation ici en Colombie, de même qu'au Pérou et en Équateur, replace le débat et les discours sur les réfugiés dans de nombreux pays en paix, dont le mien, dans un contexte qui incite à l'humilité.

Contrairement aux fréquentes insinuations contenues dans ces discours politiques, moins de 1 % de tous les réfugiés sont réinstallés dans des nations occidentales. 

L'immense majorité des déracinés à travers le monde est constituée de déplacés internes ou de personnes qui ont traversé les frontières avec des pays voisins tels que la Colombie.

Quand on observe ce qui se passe dans le monde, on a l'impression que ce sont souvent ceux qui ont le moins qui donnent le plus.

L'appel humanitaire lancé par le HCR et ses partenaires en décembre dernier est financé à moins du quart, soit 21 % très précisément.

Parallèlement, le nombre de réfugiés et de migrants vénézuéliens a dépassé la barre des 4 millions.

« Ce sont souvent ceux qui ont le moins qui donnent le plus. »

C'est une situation de vie ou de mort pour des millions de Vénézuéliens. Or, le HCR n'a reçu qu'une fraction des fonds nécessaires pour leur apporter le strict minimum dont ils ont besoin pour survivre.

Les pays d’accueil, comme la Colombie, tentent de faire face à une situation ingérable avec des ressources insuffisantes. Pour autant, ni ces pays, ni les acteurs humanitaires comme le HCR ne reçoivent les fonds dont ils auraient besoin pour continuer d'absorber cet afflux humain et ils font pourtant tout ce qui est en leur pouvoir. 

Le constat ne vaut pas seulement pour la crise au Venezuela. Cette situation de hausse spectaculaire des chiffres et de recul des financements se retrouve dans le monde entier. 

Le 20 juin, nous célébrerons la Journée mondiale du réfugié. Le HCR s'attend de nouveau à une forte augmentation du nombre global de personnes déracinés à travers le monde et à une diminution du nombre de personnes en mesure de rentrer dans leur pays, ce dont rêve la grande majorité des réfugiés que j'ai rencontrés.

Plutôt que de se concentrer sur les moyens de résoudre le manque de solutions diplomatiques, de paix et de sécurité qui pousse tant de gens à partir, les gouvernements nous parlent de plus en plus de ce qu'ils ne veulent plus faire : qu'il s'agisse d'accueillir des réfugiés ou des demandeurs d'asile ou de contribuer à financer les opérations et les appels de fonds des Nations Unies. 

Compte tenu de l'augmentation rapide du nombre de réfugiés à travers le monde, il est au mieux naïf et au pire hypocrite de présenter ces politiques comme si elles apportaient de quelconques solutions. 

Lorsque la maison de votre voisin est en feu, ce n'est pas en verrouillant votre porte que vous assurez votre sécurité. 

« Je n'oublierai pas ce que j'ai vu ici, je n'oublierai pas le peuple vénézuélien. »

Faire preuve de leadership, c’est prendre ses responsabilités - comme plusieurs générations avant nous ont su le faire - pour répondre aux menaces posées à la paix et à la sécurité et construire un ordre mondial encadré par des règles. Nous avons de nouveau besoin de ce genre de leadership et nous en avons besoin d'urgence. 

Dans l'intervalle, il est impossible d'attribuer une valeur au soutien apporté aux Vénézuéliens par la Colombie, le Pérou et l'Équateur, car ce soutien constitue le cœur même de l'humanité.

Faire preuve d'humanité, c'est refuser de fermer les yeux. C'est reconnaître nos frères et nos sœurs humains et leurs souffrances. C'est aussi œuvrer pour trouver des solutions, quels que soient les obstacles à surmonter. 

Et, plus que tout, faire preuve d'humanité, c'est ne pas condamner les victimes de la guerre ou de la violence pour ce qu'elles ont traversé ou parce qu'elles demandent de l'aide pour leurs enfants sans défense.

Dans le monde actuel, nous avons plus que jamais besoin de cette humanité et de la pensée rationnelle de ceux qui n'ont pas peur d'assumer leurs responsabilités et de montrer la voie.

Voilà le message que je souhaite laisser à la Colombie pour les mois à venir durant lesquels je m'attacherai à suivre l'évolution de la situation que j'ai pu observer ces deux derniers jours. Je n'oublierai pas ce que j'ai vu ici, je n'oublierai pas le peuple vénézuélien que j'ai rencontré ici. Mon cœur est avec eux et j'espère pouvoir revenir bientôt.

Merci beaucoup.