Selai Balkhi: Une bâtisseuse de ponts pour les femmes afghanes
Selai Balkhi: Une bâtisseuse de ponts pour les femmes afghanes
« Parfois, je me vois un peu comme une pieuvre », déclare Selai Balkhi, fondatrice de l’organisation Afghan Women’s Support (AWS). « Avec mes bras, je relie des personnes très différentes – toujours dans le but de soutenir les femmes en Afghanistan. »
C’est avec cette intention que Selai Balkhi a fondé l’association AWS en 2018. En tant que co-directrice, elle met en réseau et coordonne de nombreux acteurs et actrices – des universités aux startups, en passant par des bénévoles. Grâce au partage de connaissances et aux opportunités de financement, elle met en place des programmes de soutien pour les femmes en Afghanistan.
Étudiante en sciences de l’éducation, elle considère l’éducation comme une clé : « L’éducation m’a aidée à devenir indépendante – et je veux offrir cette indépendance aux femmes en Afghanistan », explique-t-elle. Le régime des Talibans restreignant fortement la liberté des femmes, chaque petit pas vers l’autonomie est, selon Selai Balkhi, d’une grande importance.
Un projet phare d’AWS est le programme « English Bridging » : de jeunes femmes afghanes y apprennent l’anglais en ligne, en petits groupes de six participantes maximum, soutenues par des enseignantes bénévoles. À partir de la septième année scolaire, les filles ne sont plus autorisées à fréquenter l’école en Afghanistan (UNICEF). Toutefois, les programmes d’enseignement en ligne comme « English Bridging » peuvent être suivis depuis chez soi et se trouvent, selon Selai Balkhi, dans une zone juridique grise. Ils représentent souvent la seule possibilité pour les femmes de poursuivre leur formation.
Malgré l’insécurité juridique, la demande est forte et le programme connaît un grand succès : aujourd’hui, d’anciennes élèves enseignent elles-mêmes et encadrent leurs propres groupes. C’est exactement l’objectif : « Chez AWS, nous souhaitons encourager les femmes afin qu’elles développent leur capacité à se soutenir elles-mêmes », dit Selai. Pour de nombreuses diplômées, le programme d’anglais représente non seulement une formation, mais aussi un revenu en tant qu’enseignante chez AWS – un pas important vers l’indépendance.
La coopération internationale comme opportunité
Un jalon important dans le parcours de cette jeune association fut la participation au Forum mondial sur les réfugié-e-s (Global Refugee Forum, GRF) en 2023 à Genève. Des représentant-e-s d’États, d’ONG et de la société civile s’y sont réuni-e-s dans le but de prendre des engagements concrets – appelés « pledges » – en faveur des réfugié-e-s. La Suisse elle-même a pris ses responsabilités : elle a développé une approche « Whole of Society » (WOSA) afin de mettre en œuvre les objectifs du Pacte mondial sur les réfugiés (GCR). Cette approche vise à inclure tou-te-s les acteur-rice-s souhaitant soutenir et protéger les personnes réfugiées, demandeuses d’asile et déplacées internes. Cela comprend les autorités à tous les niveaux, le secteur privé, les communautés de réfugié-e-s et de diaspora, la société civile, les organisations suisses et internationales de défense des droits humains, ainsi que les milieux politiques et médiatiques.
Depuis le GRF 2023, AWS participe régulièrement aux réunions d’échange WOSA. Société civile, partenaires internationaux, initiatives locales – tou-te-s uni-e-s pour la protection des réfugié-e-s. « Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons vraiment faire bouger les choses – à l’échelle locale comme mondiale », affirme Selai.
Pour Selai, il était essentiel de participer à ce processus : « Le GRF m’a montré que nous ne sommes pas seul-e-s dans ce combat. Il y a tant de personnes et de pays qui poursuivent les mêmes objectifs. Ce sentiment de solidarité me donne une nouvelle force. »
Les engagements de la Suisse – comme l’amélioration de l’accès à l’éducation ou la protection des femmes vulnérables – créent un cadre permettant à des organisations comme AWS de développer leur travail. « Ces engagements nous donnent de l’élan. Ils nous montrent que des États assument leurs responsabilités – et veulent soutenir les partenaires sur le terrain », souligne Selai.
Grâce à de nouveaux contacts et impulsions, AWS a établi des coopérations précieuses, notamment avec la startup BeeKee, qui a développé un appareil d’apprentissage numérique portable, utilisé notamment dans les régions reculées. En raison de l’accès limité à l’éducation, cet appareil représente souvent la seule chance pour les filles afghanes de continuer à apprendre l’anglais.
Petits pas, grands impacts
Selai Balkhi illustre ce qui devient possible lorsque l’engagement local rencontre le soutien international. Pour les femmes afghanes, cela signifie avant tout une chose : un nouvel espoir.
Même si la situation sur place devient de plus en plus difficile, Selai ne se laisse pas décourager : « Même s’il ne s’agit que de petits pas, je sais qu’ils nous font avancer et peuvent aider les femmes. C’est ce qui compte le plus. »