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Disparus retrouvés : un désespoir libyen tourne à l'exultation en Egypte

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Disparus retrouvés : un désespoir libyen tourne à l'exultation en Egypte

Un jeune père, séparé de sa famille à cause des combats dans la ville d'Ajdabiya à l'est de la Libye, les recherche partout pendant quatre jours en Libye et en Egypte.
25 Mars 2011
Awad a retrouvé sa fille Fatima. L'ingénieur originaire d'Ajdabiya a finalement retrouvé sa famille en Egypte après quatre jours de recherches extrêmement éprouvantes.

MARSA MATROUH, Egypte, 25 mars (HCR) - Quand Awad* a constaté ce qui était arrivé à sa maison dans la ville libyenne assiégée d'Ajdabiya, les murs de stuc en ruines et le toit détruit par un obus, son coeur a chaviré.

Il a demandé à un voisin si quelqu'un avait vu ce qui était arrivé à sa famille. Personne ne savait. Pendant les quatre jours suivants, de plus en plus désespéré, il les a cherchés dans tout l'est de la Libye. Il a traversé les lignes de front tandis que les combats entre les forces du gouvernement et de l'opposition et les raids nocturnes des avions assurant le respect de la zone d'exclusion aérienne imposée par les Nations Unies s'intensifiaient.

Il a fini par les retrouver en début de semaine, à l'abri à quelques heures de route de la frontière libyenne dans la station balnéaire égyptienne de Marsa Matrouh. « Je peux à nouveau respirer », affirme-t-il en berçant Fatima*, sa plus jeune fille, dans ses bras.

Awad fait partie des milliers de Libyens déplacés par les luttes intestines en Libye et affligés par la peur de l'avenir. La plupart ont fui vers d'autres villes en Libye, où ils auraient été accueillis chaleureusement, se voyant notamment offrir des appartements, de l'essence gratuite et même de l'argent.

Mais d'autres, comme Awad et sa jeune famille, ont décidé de fuir vers les pays voisins tant que le conflit dure. Un peu plus de 1 000 Libyens franchissent quotidiennement la frontière avec l'Egypte.

Personne ne sait quand ils seront en mesure de rentrer chez eux. « J'ai si peur : je regarde juste la télé et j'attends », déclare un homme arrivé lundi en Egypte. « Je suis perdu, je ne sais pas quoi faire ». Awad affirme qu'il ne rentrera pas tant que le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi est au pouvoir.

Pendant ce temps, beaucoup d'autres familles sont séparées de leurs proches à cause du conflit. Un autre habitant d'Adjabiya, la ville la plus touchée par les combats ces derniers jours, a déclaré qu'il était venu en Egypte pour retrouver sa famille en vain et qu'il retournait donc en Libye pour poursuivre ses recherches. Et les deux fils d'un des cousins d'Awad ont disparu sans laisser de traces il y a 15 jours.

L'épreuve d'Awad a commencé il y a une semaine quand sa femme l'a appelé d'Adjabiya alors qu'il se trouvait dans le désert dans la société pétrolière où il travaillait comme ingénieur. Elle lui a dit que leur ville subissait des bombardements massifs de la part des forces de Kadhafi. Awad est parti immédiatement et a voyagé de nuit pour atteindre la ville le matin. A un barrage routier tenu par les troupes pro-Kadhafi ses papiers lui ont été retirés.

Quand il est arrivé chez lui, Awad raconte « le toit avait été détruit par une roquette. Je n'ai trouvé personne à l'intérieur ». Le reste d'Adjabiya, poursuit-il, était presque déserté par les civils. L'hôpital avait été touché par des tirs d'obus incessants.

« J'ai demandé à un voisin 'Où est ma famille ? Où sont-ils ?' ». Quelqu'un a évoqué une ville oasis. Awad est parti pour Tobruk, une ville située vers l'est. Sur son chemin, un convoi d'environ 80 véhicules des forces pro-Kadhafi a foncé en trombe sur lui.

« Je m'attendais à être tué. J'attendais la mort », rappelle-t-il. Mais ils ont passé leur chemin et quelques minutes plus tard il a rencontré un plus petit convoi d'environ 10 véhicules conduit par les forces anti-gouvernementales qui lui ont demandé s'il avait besoin d'aide.

Continuant vers Tobruk, il a cherché sa famille tristement. Une connaissance a de nouveau évoqué une ville oasis dans le désert mais après un autre voyage de nuit là-bas il est revenu les mains vides. « J'ai cherché partout. J'ai pensé qu'ils avaient été tués », déclare-t-il.

Awad a refait le voyage vers Tobruk et a finalement décidé de continuer à chercher en Egypte. Le jeune ingénieur a une grande famille, notamment huit frères et leurs enfants. Il en a lui-même quatre. Des centaines de Libyens franchissant la frontière vers l'Egypte finissent à Marsa Matrouh, à environ deux heures et demie de la frontière.

Awad y est donc allé et a rendu visite à un fervent propriétaire terrien bédouin qui accueille des dizaines de familles libyennes dans ses appartements. Awad s'est rendu à son bureau situé en face d'une mosquée sur la route côtière menant à Alexandrie et on lui a dit qu'une famille était arrivée quelques jours plus tôt. C'étaient eux. « J'ai recommencé à vivre », déclare-t-il.

Eux aussi étaient soulagés. « Nous avions perdu tout espoir de le retrouver », affirme son frère. Les deux filles d'Awad, âgées de cinq et huit ans, s'accrochaient toutes deux fermement à ses jambes pendant que les visiteurs du HCR s'entretenaient avec lui.

Le HCR supervise les déplacements dans le pays d'origine d'Awad, en aidant à identifier les membres de famille perdus et en fournissant une assistance aux déplacés.

* Les noms ont été modifiés pour des raisons de protection

Par Andrew Purvis à Marsa Matrouh, Egypte