Les sites congolais ferment après le départ des derniers réfugiés angolais
Les sites congolais ferment après le départ des derniers réfugiés angolais
DILOLO, République démocratique du Congo, 30 mai (UNHCR) - Un dernier convoi de 263 réfugiés angolais a quitté des camps de réfugiés dans la région sud-congolaise de Kisenge pour rentrer au pays. Ce départ met fin à un programme de soutien aux réfugiés qui a duré plus de vingt ans.
Des centaines de personnes se sont rassemblées, ce vendredi, au poste frontière de Dilolo, entre le Congo et l'Angola, pour dire adieu au groupe de 263 réfugiés angolais qui quittaient Kisenge, dans la province du Katanga. En plus des réfugiés, le convoi de 15 camions et bus de l'UNHCR transportait également une quantité importante d'effets personnels que les réfugiés avaient accumulés au fil des années. Deux camions étaient réservés aux seuls moutons et chèvres.
« Nous avons fui en 1984, à pied, à travers la brousse, pour traverser la frontière angolaise », se souvient Maria Kasova, son bébé bien attaché sur son dos avec un tissu coloré. Plus de 20 ans plus tard, Maria fait patiemment la file pour monter à bord du camion de rapatriement. « Mon mari m'a déjà écrit d'Angola. Il est reparti avec un convoi antérieur et est en train de nous construire une nouvelle maison. »
Les camions surchargés progressent avec grand fracas sur les pistes en sable de la savane du Katanga, soulevant des nuages de poussière sur leur passage, laissant derrière eux des sentiments mitigés chez les gens qui ont accueilli pendant si longtemps les réfugiés et les organisations humanitaires.
« C'est un jour symbolique pour nous, tout comme pour les réfugiés », a déclaré le Vice-Gouverneur de la province katangaise à la foule assemblée à Dilolo. « Le temps de la souffrance et de l'exil a pris fin : les Angolais ont à nouveau la liberté de vivre dans leur pays. Cependant, leur départ ainsi que celui de l'UNHCR laisseront un vide dans notre communauté. »
La plupart des réfugiés angolais étaient des fermiers ; ils ont fourni de nombreux produits à l'économie de Kisenge. La responsable du bureau de l'UNHCR à Kisenge, Awada Houssein, décrit ainsi l'impact du départ des réfugiés : « Une fois que l'opération de rapatriement a commencé, il était difficile de trouver des tomates et des pommes de terre sur le marché. »
Le convoi de rapatriement organisé par l'UNHCR, de Kisenge vers l'Angola, constitue la deuxième fermeture de camps de réfugiés en République démocratique du Congo (RDC), cette année, après la fermeture des camps de Ngidinga, fin mars 2005. Au total, quelque 42 000 réfugiés angolais installés en RDC ont bénéficié du programme de rapatriement volontaire de l'UNHCR depuis qu'il a débuté en 2003.
Les habitants de Kisenge ont aussi déclaré que la présence des travailleurs humanitaires et de l'UNHCR allait leur manquer : au fil des ans, elle était devenue partie intégrante de leur communauté.
« L'espace consacré aux réfugiés doit être préservé, et la communauté locale récompensée », a insisté Aïda Haïle Mariam, déléguée adjointe de l'UNHCR en RDC. « C'est la raison pour laquelle nous partons en bons termes avec cette communauté qui a si généreusement hébergé des réfugiés angolais pendant plus de 20 ans. »
L'agence pour les réfugiés laisse derrière elle six écoles parfaitement équipées, soit 165 classes. Elle a aussi passé le relais pour d'autres infrastructures, particulièrement dans le secteur de la santé. A présent, il ne tient qu'aux autorités congolaises d'utiliser ces atouts pour le bien de la communauté locale.
Environ 600 réfugiés angolais ont décidé de rester dans la région de Kisenge, en dépit des avertissements de l'UNHCR qui annonçaient la fin de l'aide au rapatriement. Certains resteront en RDC définitivement, d'autres attendent que leurs enfants aient fini leur scolarité pour rentrer d'eux-mêmes. Ces « retardataires », qui organisent leur retour individuellement, recevront tout de même le formulaire de rapatriement volontaire qui leur assurera l'accès au colis de retour et au programme de réintégration lorsqu'ils rentreront en Angola.
Pour les réfugiés qui ne désirent pas rentrer, l'UNHCR fournira de l'aide à l'intégration dans les communautés congolaises.
Parmi les obstacles au retour en Angola, le piteux état des routes dans les zones dévastées par la guerre et le danger des mines antipersonnel sont particulièrement préoccupants. La récente épidémie du virus mortel de Marburg a aussi ralenti le retour vers la province angolaise de Uige. Les retours vers cette région ont cessé. D'autre part, l'agence a déjà commencé des travaux de réhabilitation des routes le long des principaux couloirs de rapatriement. Une collaboration étroite avec le gouvernement angolais et le Service des Nations Unies de l'action antimines est essentiel pour sécuriser les zones de rapatriement.
Le programme angolais de rapatriement volontaire se poursuivra pour d'autres camps de réfugiés à plusieurs centaines de kilomètres au nord-ouest de Kisenge - à partir des provinces de Bandundu et du Bas-Congo, jouxtant les provinces angolaises du nord, ainsi que de Kinshasa. On estime à 22 000 le nombre de réfugiés angolais hébergés dans des camps en RDC. Ils s'ajoutent aux 72 000 réfugiés angolais qui, selon les estimations, se sont installés spontanément en RDC.
Par Jens Hesemann à Dilolo